[TERMINE]Kyoto 2, electrik bungaloo [Nissa & Maya]

Désormais assise sur les genoux, je la regarde un peu de haut. Qu'elle se plaise à rester dans son déni, sur la comparaison. Je n'ai pas envie de perdre du temps à batailler sur un sujet perdu d'avance... mais je ne lui laisse pas le reste :

« Si tu m'avais bien écoutée, tu saurais qu'il est loin d'être nul »

Maya le sait. J'ai déjà parlé de lui, seulement en bons termes. Ça me fait un peu mal intérieurement de ne pas avoir été écoutée, ou simplement comprise. Alors à sa remarque suivante, c'est le pompon. Elle veut savoir ce que j'ai aimé ?

« J'aimais qu'il me laisse respirer, sans m'étouffer dans l'étau de la jalousie. J'aimais qu'il ne me mette pas la pression pour obtenir ce qu'il voulait. J'aimais qu'il me laisse mon espace vital, sans aller toujours trop vite. J'aimais qu'il... »

Je pourrais continuer longtemps comme ça. J'espère qu'elle a eu toute  sa dose de comparaison, et ne va pas surenchérir derrière. Je n'ai pas encore franchi la limite de ma colère, mais qu'elle essaye encore de me provoquer, et là, ce sera l'explosion.

Tout bonnement blasée, j'ajoute :

« L'amour, ce n'est pas une compétition »

Elle n'a pas du tout intérêt à me contredire.

Si elle m'a réellement écoutée, pourquoi me provoquer en le catégorisant de nul ? Ce n'est pas comme si de mon côté, j'avais manqué de respect à Yuna. Ça ne m'aurait même pas traversé l'esprit de faire une chose pareille.

Et là, l'ambiance change.

Mes reproches ont été entendus.

Mais je ne compte pas m'excuser.

Surtout que, Maya ne le fait pas non plus.

Ce serait comme punir un enfant, et le prendre ensuite dans ses bras en le consolant. Il n'apprendrait pas, ne comprendrait pas la punition, et recommencerait. Sûrement, tout comme Maya. Alors même si je la sens peinée, je ne l'aide pas à trouver ses mots.

Je m'assoies sur le bord du lit, en soupirant.

Le silence s'éternise, s'étire à l'infini au point où j'en perds le fil. J'hésite à partir prendre l'air, sans claquer la porte derrière moi, histoire de lui laisser la possibilité de me rejoindre. Mais avant d'avoir le temps de le faire, des excuses retentissent.

Ou du moins, ce qui y ressemble mais sans une once de conviction.

« Tu sais, Maya, si les excuses ne sont pas suivies par des actes, elles n'ont aucune valeur ? »

Je lui tourne encore le dos, toujours assise sur le bord du lit. Sa dernière phrase tombe comme un couperet ; au lieu de réaliser, d'assumer cette dispute, elle me reproche à nouveau quelque chose. Je retiens un soupir, et finit par me rapprocher d'elle.

« Parfois, oui, je le suis. Tout comme je suis heureuse, triste, gênée tout en étant amoureuse à tes côtés. »

Je pose mon regard sur son visage attristé, et cette fois-ci, laisse échapper un soupir.

« Je ne veux pas lâcher l'affaire. Alors si tu veux rester avec moi, il va falloir faire des efforts »

À ses côtés, mes yeux croisent les siens.

« Pas juste toi... toutes les deux, ensemble »

C'est à elle de décider si elle est prête à ça.

Sa simple réaction, incarnée par juste un « mmm... » me laisse interdite. Y a mieux comme manière d’acquiescer, mais c'est déjà de pris, et j'espère qu'elle s'en souviendra lorsque ses mauvais côtés prendront le relais...  

Comme-là, où elle s'insurge sur ce petit mot tout à fait anodin :

« Pas gênée dans le sens tu m'ennuies, mais dans le sens où tu me fais rougir et battre mon cœur »

C'est d'un niais, j'en ai presque honte. Mais au point où j'en suis avec Maya, à marcher sur un terrain miné, à force, je préfère y aller doucement, et éviter la pétarade. Si je venais à être exaspérée comme la dernière fois, je ne serai pas la seule touchée.

Même si je ne doute pas de sa sincérité, ce n'est pas le cas de sa notion de l'effort. Faire le strict minimum, c'est loin d'être assez. Alors ouais, je reste un peu sceptique sur le sujet, et je suis sûre qu'elle peut en faire bien plus.

« Ça prendra le temps que ça prendra, mais fais de ton mieux, d'accord ? Je le ferai aussi... »

Quand elle me tend les bras, j'hésite. Le message est-il vraiment passé ? Franchement... je l'espère, de tout mon cœur, pour le bien de notre couple. La punition n'a plu lieu d'être – même si à la base c'était juste une taquinerie, je l'enserre tendrement.

« T'es toujours partante pour voir la psychologue toutes les deux ? »

J'attaque ce sujet-là, mais c'est important.

Ah bah voilà ! Maya est finalement rassurée après ma justification. Il lui faut vraiment pas grand chose pour prendre la mouche. Je ne sais pas combien de temps je vais réussir à me maintenir patiente, puisque je sens déjà la peinture s'écailler.

« Pas grave ça ! Tkt, j'en ai un de rechange en tant que timelord »

Sa phrase suivante aurait pu me faire rougir, mais pas du tout. Elle se voile la face si elle le pense réellement, et ça me met un peu mal à l'aise sur les attentes d'une telle déclaration. Mais bref, on entame le sujet de la psychologue :

« Pas sûre que ce soit une bonne chose d'être plus rapide dans cette catégorie-là. »

Toujours enlacée, je pose la tête sur son épaule :

« On pourrait aller la voir à la rentrée ? Comme ça, ça te laisse le temps de trouver le courage, et on commence bien l'année scolaire »

Je souffle sur ses cheveux un peu rebelles.

Petit hochement de tête à son « pratique ». Si on part sur cette logique, Maya pourrait très bien être mon compagnon, ma Rose... ouais, nan, pas du tout. Il n'y aura jamais une telle alchimie entre elle et moi pour ne serait-ce que frôler une compétitivité.

« On y va surtout en premier pour ta misandrie, non ? »

Là, comme ça, je me vois assez mal confier à la psychologue le couple qu'on forme, Maya et moi. Peut-être par la suite, lorsqu'on se sera un peu ouvert mutuellement, on pourrait parler de ce qui coince dans notre relation, et tout mettre à plat.

« Attends... quoi ? »

La même chambre ? Oulah...

« T'as pas peur qu'on ne se supporte plus à force d'être ensemble ? »

Je  sais pas si je vais avoir les épaules pour.

Alors... sa question me fait pouffer un peu par le nez. Évidemment, c'est un problème majeur ! Si elle continue dans cette voie-là, ça pourrait finir cette fois par une exclusion définitive. Même pour elle, le fait de ne plus se disputer avec tous les garçons de la planète, pourrait être salutaire.

« Tu te fatigues en pensant qu'ils sont fatigants »

Si elle n'était pas si hostile envers eux... ça changerait totalement la donne.

« Ce n'est pas que je ne veux pas... »

Mais j'ai un peu peur. La promiscuité, ça aide à se rapprocher, mais peut devenir ingérable sur le long terme. On se verrait du réveil jusqu'au coucher... et si l'idée ne me dérange pas trop avec Tsu, le faire avec Maya me laisse penser au pire.

« C'est juste que.. des couples romptent après avoir commencé à vivre ensemble parce qu'ils ne supportent pas la vie à deux... »

Je n'ai pas encore dit non, donc on verra...

Petit soupir. Je ne compte pas continuer la conversation sur les garçons, tout simplement du fait de la mauvaise foi de Maya. Elle est bornée, et bien peu de choses peut la raisonner.

Il y a un sujet plus important : l'attribution des chambres.

« Je ne suis pas défaitiste... je prends juste en compte une possibilité »

Apprendre à se connaître ? C'est vraiment quand elle veut et quand ça l'arrange, ça. Même si je sens de l'amertume monter au fond de ma gorge, je garde cette réflexion pour moi.

« Bon quoi ? Bon vent ? »

Mon ton est un peu froid, alors que je me défais de son étreinte.

« Tout pour toi est sujet à dispute ! C'est pas possible ça ! Comment tu veux qu'on vive ensemble si je ne peux pas aligner deux mots sans que tu le prennes mal ?! »

Ça y est, la froideur laisse place à la colère.

Bien sûr, c'est une possibilité triste. Mais faut ouvrir les yeux un peu sur notre couple, il lui faudrait pas grand chose pour éclater. Alors elle a beau dire ne pas le prendre mal, j'en reste dubitative.

« Évidemment que je m'inquiète ! Je n'ai pas envie de brûler des étapes ! »

D'accord, ça la stresse, je veux bien le comprendre. Mais si elle arrêtait un peu de faire la gueule pour tout et n'importe quoi, on n'en serait probablement pas là... et je ne remettrai pas en cause la stabilité de notre relation. Encore une fois.

« On a peut-être pas la même conception d'un couple ... »

Elle vise le fusionnel, et moi l'indépendance.

Ouais, le doute prend forme. Si on n'a pas les mêmes attentes, on peut pédaler dans la semoule très longtemps comme ça. Au fond de moi, je suis presque sûre de comment va se dérouler le reste de cet échange, et ça me fatigue d'avance.

« Ma définition ? Ce que tu dois faire ? »

Je m'assoies en tailleur sur le lit. Ça mérite réflexion autant pour bien formuler comment je ressens tout ça, et aussi ne pas me prendre la tête une énième fois avec elle. Je sens toujours la colère vibrer dans mes veines, et mes doigts. Alors doucement, je saisis sa main entre les miennes.

« Moi aussi, je veux passer du temps avec toi. Tout comme j'ai envie aussi de partager des bons moments avec mes amis ou meilleures amies. »

Mon regard se perd un peu dans le vide, tandis que je mets un peu d'ordre dans mes pensées.

« Tout comme j'ai besoin d'indépendance. Un couple n'est pas un boulet au pied... Notre relation, pour moi, au bout de ces deux mois, doit nous laisser du temps, et nous habituer l'une à l'autre »

Je presse doucement ses doigts.

« Pour moi, on n'est pas prêtes à vivre ensemble. Il n'y a qu'à voir toutes nos disputes... tu ne crois pas ? »

Malgré ça, j'ai envie de continuer de l'aimer.

Voilà, Maya a l'air d'avoir finalement réaliser ce qui cloche. Je n'ai pas voulu être cassante, mais je ressens tout de même sa déception... franchement, je suis un peu perdue dans tout ça... alors si elle venait à me donner un argument de poids pour l'attribution des chambres, je l'écouterai !

« Ce n'est pas des disputes, mais juste des chamailleries pour toi ? »

Là est le problème. La paroi séparant les deux est trop fine... on a du mal à définir quand c'est une plaisanterie, ou quand c'est du sérieux. Du moins, je le ressens de cette manière.

« Je vais y réfléchir, et prendre un peu de recul »

Ou plutôt, appeler à un conseil de guerre ! J'ai besoin d'avis extérieur, juste et impartial... même si je sais déjà plus ou moins ce que pourrait être leur avis, j'en ai tout de même besoin.

Ce week-end était presque comme un test.

Parfois, même souvent désormais, Maya dégage cette impression de toujours rechercher la discorde. Elle boude pour rien, exagère mes propos négativement et en fait toujours tout un plat... un peu comme une dramaqueen, d'une certaine manière.

Cette réalisation me fait assez peur. Même si on apprend à cohabiter ensemble, qu'est-ce qui pourrait vraiment esquisser une amélioration si elle se complait dans les drames... ? Je baisse les yeux sur nos mains entrelacées, avant de lui répondre, un peu la tête ailleurs.

« Pas forcément... je ne suis pas du genre à bouder, et encore moins aussi longtemps. Par contre, j'ai du mal à déterminer, si toi, tu boudes vraiment »

Heureusement, elle n'insiste plus pour la chambre. Si ne pas la choisir m'inquiète un peu, une nouvelle rencontre, une possible amitié même pourrait en découler ! Alors ce n'est pas si mal de ne pas être avec Maya, ou même avec Tsu ! Et qui sait ? Peut-être la rng nous mettra sur le même chemin.  

« Bien sûr ! Et toi... tu l'es ? »

Ça doit pas être facile non plus de son côté.

Franchement, non, cela ne me rassure pas. Maya a beau dire, j'ai énormément de mal à y croire, et ne serais pas si étonnée de la voir bouder pendant plusieurs heures, voir même des jours. Après tout, même si c'était différent, elle m'a esquivée pendant deux mois.

« Y a intérêt ! »

Ayé, elle s'acharne à me faire culpabiliser ; elle va me rabattre les oreilles avec cette histoire de chambre pendant longtemps je pense... enfin bref, j'espère juste me tromper ! En tout cas, hors de question de me laisser abattre ! Je lui souris, avant d'ajouter :

« Quoi qu'il en soit, on pourra toujours être dans la même chambre l'année prochaine ! »

Non, je ne vais pas émettre de doute sur ça.

Alors... je doute peut-être un peu d'avoir les plein pouvoirs sur elle. Un câlin, un bisou, et on chasse la moue boudeuse de son visage ? Ça me semble bien trop simple... il va forcément y avoir un hic, quelque chose qui coincera le programme Maya.

« Je ne suis pas magicienne tout de même ! »

Je pensais réellement faire mouche avec ma remarque sur l'année prochaine, une promesse sur le long terme. Au lieu de cela, elle écourte la conversation à ce sujet, ce qui en soi, n'est pas plus mal. Peut-être étais-je un peu trop aigrie en pensant qu'elle continuerait de jouer avec ma culpabilité.

« Tu sais... le garçon aurait pu être gay, tout comme la possible fille avec laquelle je vais être colocataire. Mais t'inquiètes pas, tout ira bien »

Je lui dépose un bisou sur le coin des lèvres.

« Ta future colocataire aussi n'a pas intérêt à faire de bêtises ! »

Même sans être jalouse, il y a des limites.

Oh mon dieu ! Mais quelle phrase de lover ! Au lieu de m’empourprer, une main devant la bouche, je ne peux m'empêcher de rire un peu bêtement à cette réplique tac-o-tac. Sans le vouloir, je lui ai tendu la perche !

« Alors selon toi, j'ai besoin de mes pouvoirs magiques pour être belle ?! »

Faire semblent de s'offusquer : Check ✓

« Tous les garçons sont dans le même panier  pour toi ? »

Ça m'étonnerait, vraiment, il y a forcément des exceptions. Après si sa haine des garçons est si profondément ancrée, je me demande comment va s'y prendre la nouvelle psychologue. Peu importe la méthode, ça sera long et loin d'être de la tarte !

« Pourquoi il n'y aurait pas de bêtises de ton côté, mais seulement du mien ? »

Cette fois-ci, je ne fais pas semblant de prendre la mouche, trop sérieuse. Ça m'intrigue un peu... est-ce un manque de confiance ? En elle, ou en moi ? Je m'interroge alors qu'elle m'attrape pour faire un énième câlin en prétextant devoir en profiter.

« Mh... On va rester agglutiner l'une à l'autre, et oublier les besoins vitaux, comme... manger ? »

Surprise, je commence déjà à avoir la dalle !