Le cours de littérature s’est terminé un peu en retard, aujourd’hui. Il est quinze heures trente et Nobu sort de l'amphithéâtre la tête pleine. Ce n’est pas une mauvaise chose, bien au contraire. Il aime se sentir assiégé d’informations. C’est bien la raison pour laquelle il a continué ses études. S’il voulait quelque chose de simple, il serait resté dans sa petite ville portuaire, avec ses parents. Parce qu’il leur doit beaucoup, pas question de se tourner les pouces. Il doit travailler, d’arrache pied. Quand les cours sont difficiles, il a l’impression de bien faire ses devoirs.
Alors, il flotte. Il flotte dans les couloirs, le temps de remettre ses pensées en ordre. Il flotte, et profite de cet état. Il est de ceux qui aime bien se sentir un peu à côté de ses pompes, de ne pas complètement maîtriser son corps. Alors, oui, il croise quelques énergumènes qui le poussent, et qui râlent, parce qu’il est au milieu du couloir, et qu’il fait attention à rien n’y personne.
Le contact des corps des autres est même réconfortant. Il a l’impression d’être soutenu par leur présence, comme en plein concert. Alors, il avance, un peu penaud. Il avance et il continue de bousculer des personnes polies qui s’excusent, et d’autres moins polis qui l’insultent. Ils bousculent même les épaules d’une petite blonde.
Une petite blonde aux longs cheveux colorés.
Une petite blonde dont il se souvient.
Une petite blonde qui s’appelle Maya.
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Le jeudi 8 février 2018
- InvitéInvité
Bon, le fait d'être en couple ne change pas la routine. Les cours, tout ça. Surtout que vous approchez doucement de la fin de l'année scolaire, avec les examens finaux. Forcément, ça devient un peu plus hectique, un peu plus agité. Pas de beaucoup, mais ça ce voit, lentement mais surement. Après, tu as envie de dire que tu t'en fichez. Tu n'es pas la plus maligne du monde, mais tu travailles dur pour ne pas redoubler. Une fois, pas deux !
Bref, dernier cours de la journée, forcément ça s'agite, ça se bouscule. Et ça t'énerve. C'est le problème d'être petite, c'est qu'on te marche un peu dessus. Mais ça se fait entendre quand tu te fais bousculer. Comme là.
"Hey, fais attention quand même !"
Pfff, les garçons. Tu en as marre, parfois. Mais tu n'as pas le temps pour ça. Tu l'as déjà vu, peut-être ? Bah, ça change rien, sa tête ne te dit rien la.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Oh désespoir ! Nobu regarde la petite blonde avec des yeux de poisson. Il est complètement sorti du rêve. Leur dernière (et première) rencontre remonte à novembre dernier. Nobu n’a jamais croisé Maya, pendant tout ce temps. Et pourtant, il n’a cessé de penser à elle. Le lendemain de leur discussion, il s’en est voulu. Pourquoi a-t-il dévoilé autant de lui à une inconnue ? C’est sûrement un peu de l'alcool. Ce n’est même pas comme s’ils avaient eu une superbe vibe. Maya était un peu trop curieuse, voire indiscrète… Ah. C’est peut-être ça. Nobu manque de volonté, et il lâche prise assez rapidement.
Très vite, il se ressaisit. Il espère assez vite, pour ne pas être attrapé. Elle n’a pas l’air de le reconnaître, pas du tout. Alors, il se demande. Est-ce qu’il parle avec sa vraie voix ? Ou est-ce qu’il joue un peu en la modifiant ?
Lorsqu’il est une Drag Queen, Nobu ne féminise pas sa voix. C’est qu’elle est déjà très aigüe, alors il ne considère pas en avoir besoin. C’est trop difficile. Mais maintenant, il comprend que ça pourrait trahir son anonymat.
Allez, on tente ! Il essaie de sonner plus grave. « Oups, je suis vraiment désolé. » Au milieu de la phrase, il perd le ton et le son aigü de sa voix surgit ! Et merde. Il est vraiment incapable de se montrer masculin.
- InvitéInvité
Hum… Hum… Il est désolé. Tu as envie de dire que ce n’est pas vraiment suffisant.
"Mouais, fais gaffe quand même."
C'est une discrimination qui conte les petites, c'est ça ? Ce vilain ! Mais il est bizarre quand même. Ou alors il est en pleine mue ? Nan il est trop grand (grumf)… vieux pour ça.
"On ne s'est pas déjà croisé ?"
Tu n’es pas psy, tu es sociologue. Mais parfois, tu es perspicace. Un peu trop. Surtout quand ça embête les autres, en fait. Même si ce n’est pas toujours voulu, ce résultat. Un gars avec cette voix… oh.
"Ah, tu est-ce mister."
Oui, tu insistes sur la partie "miss". Ça va ça reste assez subtil, tu ne dis pas clairement qui il était.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Pendant un instant. Pendant un instant, seulement, Nobu a l’impression d’être sauvé d’affaire. Car même si sa voix a déraillé, il pense qu’elle ne l’a pas reconnu. Pourquoi elle le reconnaîtrait, de toute manière ? Il a été si discret. Ces derniers mois, il a évité de la croiser. Pas de face, du moins. C’est que Maya, elle se voit de loin. Il n’y a pas des dizaines de petites blondes aux cheveux colorés. Alors, elle a eu le temps de penser à autre chose.
Par exemple, aux examens.
Par exemple, à noël et à sa famille.
Par exemple, à la meuf qui était pas sa meuf mais pas son amie mais peut-être un peu sa meuf.
Mais quand Maya pose la première question, Nobu sait qu’il est foutu. Il voudrait bien se défendre, dire non, mais ce serait trop bizarre. Et puis, de toute manière, il n’a pas le temps de trouver une excuse, de s’excuser et de raconter qu’il est nouveau là… Ni même de parler de son visage commun.
Elle a compris. Oh que oui, il est “ce miss-ter”.
« Euuuh… » Il a peur de répondre, mais il sait aussi que ça ne sert à rien de mentir, ce serait encore plus étrange. « Je crois. »
Non, mais ça n’a plus aucun sens ce qu’il dit. Il est complètement angoissé.
- InvitéInvité
"Je ne pensais pas te croiser ici, ça va ?"
Une discussion normale, tranquille. Calme. Pas de grand secret ou quoi.
"Ou alors je te terrifie à ce point là ?"
Oui, tu le tenace un peu. C'est vilain, c'est sur. Mais c'est amusant, un peu.
"Mais tu veux peut-être discuter autre part."
Histoire dont on ne vous entend pas parler de chose... gay. Mon Dieu, ça fait peur, c'est sur.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Elle l’a trouvé si vite, sans même chercher. Nobu n’a jamais eu l’impression que Maya cherchait à tomber sur lui. Il pensait être comme un fantôme que l’on avait oublié. Et finalement, sa phrase à elle lui semble encore plus ridicule.
« Tu ne pensais pas me croire dans…» Il marque une pause. « Les couloirs des cours ? » Ils sont quand même dans la même section. Mais il essaie de se rattraper. Il commence à être désagréable, alors qu’elle fait juste la conversation.
« Je veux bien, oui…» Il regarde autour de lui, y’a tellement de monde. « Le konbini, ça te dit ? J’ai faim. J’t’offre un truc si tu veux. »
Tout, n’importe quoi, tant qu’ils s’éloignent.
- InvitéInvité
Incroyable ça, quand il est étudiant ici lui aussi. C'est dingue, vraiment.
"Ça me va."
Vous barrer d'ici pour discuter tranquillement quoi. Le truc classique et normal.
"Alors, tu deviens quoi du coup ? Et la petite miss également ?"
La miss, c'est lui aussi. Il va comprendre.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Il aimerait rouler des yeux, mais il n’ose pas. Nobu a du mal à comprendre si Maya est sincère ou si elle ne l’est pas. Si elle est vraiment désagréable, ou si elle essaye d’être sympathique. Que ce soit l’un, ou que ce soit l’autre, Nobu n’est pas certain de passer un bon moment. En plus de la difficulté de tenir son identité secrète, il doit essayer de comprendre quelle posture adopter. Rire ? Pas rire ? C’est qu’il n’a pas envie de vexer Maya, il ne le faut pas. Et il a raison d’avoir peur. Déjà, il y a quelques jours, un gamin a failli vendre la mèche et faire échapper son secret. Son homosexualité, pas qu’il soit Drag Queen ! Donc ce n’est pas une peur irrationnelle. C’est une peur très, très, très rationnelle.
Nobu n’a aucun moyen de savoir si Maya a pris des photos de lui lors de la soirée de leur rencontre. Et elle aurait pu ! Etrangement, Nobu n’est pas avare de clichés quand il est une drag queen. Après tout, c’est la rançon du succès. S’il veut se faire un petit nom dans la scène Kobéenne, il se doit d’être visible dans les réseaux sociaux. Tant que personne ne cherche à croiser son identité avec lui en civil...
Ils avancent dans les couloirs. Nobu avance le pas certain. Même si elle est petite, Maya semble tout à fait nerveuse. Elle n’a aucun mal à suivre son rythme. De moins, il en a l’impression. Alors qu’il avance, il répond. Le “miss”, le fait un peu grimacer, mais il comprend que Maya essaie de parler de “Aomame” comme d’une tierce personne. Et c’est parfait comme ça.
« Plutôt bien, je crois ? » Pas question de parler ici du black-mailing avec l’homophobe. Nobu aimerait bien prévenir Maya, histoire qu’elle fasse attention, mais quand ils auront quitté l’établissement. « Quant à la miss, aussi. Elle est montée sur scène pour la première fois, c’était quelque chose à voir ! » C’est drôle, de parler de soi à la troisième personne, mais après tout, Aomame, c’est quelqu’un d’autre.
- InvitéInvité
"Ouaip, tu m'avais dit. J'ai vu un bout, c'était sympa."
Ça n'est pas étonnant que les drag show ne t'intéresse pas vraiment, mais tu regardes toujours au moins un peu par principe et par soutien. Ça n'est pas parce que tu n'aimes pas trop que tu dois détester ! Vous êtes plus ou moins tout ensemble dans ce combat de toute façon.
"C'est une bonne nouvelle si elle s'amuse bien."
C'est le plus important, au final. Au moins il ne fait pas attention à ta petite taille pour la marche. Certains ralentissent en présence de personnes de petite taille, ais tu marche vite ! Et vous êtes dans un coin plus calme assez rapidement.
"Il y a un truc qui a l'air de t'embêter. Je te dérange, c'est ça ?!"
Forcément, quand tu es perceptive pour ce genre de chose, tu le prends personnellement… Tu ne changeras jamais.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Elle a vu un bout ? Nobu écarquille les yeux. Il ne pensait pas que la blonde était venue à noël pour profiter des Drag Queen. C’est qu’elle ne doit toujours pas avoir réglé son histoire avec sa copine. Noël, c’est fait pour être entre amoureux. Et puis, un bout. Comment on ne peut voir qu’un bout d’une performance de trois minutes ? Nobu en vient à la conclusion : il était trop chiant, alors Maya a profité du moment pour filer aux toilettes. Autant éviter les mauvaises représentations, et profiter du show des meilleures Drag Queen de Kobe.
Il ne le prend pas mal, il sait qu’il est débutant. Et puis, en effet, le principal c’est de s’amuser. Il hoche la tête, doucement. C’est que c’est un peu cher, aussi, comme activité. Pour le moment, Nobu s’en sort avec du maquillage, des perruques et des vêtements empruntés à sa Drag Mother, mais il faudra bien qu’il coupe le cordon… financier. Pas sûr d’être prêt à mettre autant d’argent.
Faut qu’il trouve un petit boulot…
Nobu est dans ses pensées, à réfléchir à comment brosser une perruque pas chère d’Aliexpress pour éviter de payer une somme exorbitante pour son prochain shown quand Maya s’arrête…
Et Nobu ne s’attendait pas à un tel changement de ton. « Euh.. Pardon ? » Il fronce les sourcils. C’est elle qui est venu lui parler, et lui proposer d’aller dans un coin plus calme, pas lui… Quoi que, et si c’était pas pour parler ? Il est pas prêt pour se battre, lui. Alors, il regarde tout autour, pour s’assurer que personne ne puisse les entendre. « Je suis pas à l’aise de parler de mon activité de Drag Queen dans des lieux publics, c’est tout. »
- InvitéInvité
Dommage. Ça aurait été sympa, pour une fois.
"Nan mais ca je sais, il ne faut pas parler du vilain mot en "g" en public, tout ça."
Ce qui est nul mais bon. Hey, même à terme Nissa se sentira pousser des ailes et te tiendra la main en public… juste pas à Kobe.
"Ce qui est un peu dommage d'après moi, mais bon. Si quelqu'un m'embête à ce sujet, il se mange un coup de boule, c'est tout."
Fille ou garçon, pas de discrimination envers ceux qui en font en premier lieu !
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Il hausse les épaules. Il sait bien, Nobu, que Maya fait du sarcasme. De toute manière, elle ne semble que parler que de manière sarcastique. Comme si c’était sa deuxième langue. Pourtant, elle a pas l’accent d’une française. C’est pas le sport national de ce pays ?
“Drag queen”, Nobu ne le considère pas comme un mot vilain, c’est seulement un mot privé. Un mot qui ne concerne que lui, et les personnes qu’il aime. Et Maya, maintenant. Maya qui semble prendre à coeur.
Il comprend, pourquoi elle est aussi affectée par le besoin de silence de Nobu. Elle, contrairement à l’étudiant en littérature, semble vouloir se battre pour ses droits. Elle est fière d’être lesbienne, et n’a aucun souci à le crier haut et fort. Nobu, il l’a bien compris, lui seulement :
« Je n’sais juste pas m’battre. »
Un coup de boule ? Il aimerait bien pouvoir en foutre. Mais il n’a pas l’impression que la violence arrêterait de stigmatiser l’homosexualité. Et puis, même si ça pouvait, il n’a aucune technique, est tout petit, et maigrelet. Un coup de Nobu, c’est la caresse d’un autre. Il ne pourrait même pas faire de mal à une mouche.
- InvitéInvité
Seulement à moitié avec toi.
"Mais bon, si on se laisse faire les choses ne vont pas changer."
La plupart des changements dans les sociétés du monde entier ne sont pas apparus de manière très… posée. C'est même le contraire.
"Et si les concernés ne veulent pas comprendre de manière calme il n'y a pas trente six mille solution."
Après bon, tu es impulsive et un poil violente. Au moins tu es engagée.
"Sinon dans même pas dix ans ca sera interdit d'être LGBT, on sera considéré comme des gens.avec des problèmes mentaux et envoyé en rééducation."
Oh, c'est déjà un peu le cas, même au Japon. Dans certains pays c'est la peine de mort, donc bon… ca veut pas dire que c'est mieux ici, simplement moins pire.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Pas littéral ? Comment "donner un coup de boule" peut ne pas être littéral ? C'est qu'il commence à se faire une image de sa camarade. Et Maya, c'est drôle, mais Nobu la voit bien donner des coups de boules à des gars pas sympa. A leur faire des croche-pattes aussi. Peut-être même leur faire bouffer du sable ! C'est pour ça, que Nobu a un peu peur d'elle, est-ce qu'elle a même une limite ? Bien sûr. Et le narrateur exagère. Nobu n'a pas sipeur.
« Tu as raison. »
Il ne le dit pas pour faire plaisir à Maya. Il le pense vraiment. En fait, il sait bien qu'en se taisant, il ne fera pas évoluer les choses. Mais Nobu n'est pas certain d'avoir le cran de pouvoir les faire évoluer, les choses. Il a trop peur de devenir un porte parole, il n'est pas certain de pouvoir supporter la pression que cela demande. Alors, il préfère ne pas faire grand chose, et subir, en attendant que les autres fassent pour lui.
« Mais concrètement... Tu fais quoi, toi , contre tout ça ? »
Au fond, peut-être qu'il manque juste d'un cadre ?
- InvitéInvité
"Facileo on récolte des fonds pour mettre la tête des vieux crétins à prix."
C'est bien évidemment une blague, aussi morbide soit elle.
"Déjà j'assume ce que je suis, peu importe l'avis des autres. Mais je ne conseille pas à tout le monde de faire pareil."
Parfois, on t'insulte. Alors tu insultes en retour, oh, tu ne vas pas te laisser faire comme ça.
"Après il y a des salons de discussion, mais aussi des idées pour agir. Plus on en parle aux gens, plus on a de chance de se faire comprendre."
Mais le plus important, d'après toi, c'est de ne pas s'écraser. Alors tu évite de le faire, pour les autre.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Le sarcasme, toujours le sarcasme, encore le sarcasme. Nobu commence à comprendre le style de Maya. Lui qui avait demandé quelque chose de sérieux. Il aimerait vraiment comprendre comment elle arrive à s’engager dans la politique LGBT, dans un pays aussi peu ouvert que le Japon. Nobu a trop peur, d’aller toquer à la porte des associations, parce qu’assumer c’est important, et que c’est politique, mais que s’engager, c’est encore autre chose.
« Je suis assez impressionné par ton impertinence. »
Il ne le dit pas méchamment, même si “impertinence” peut être mal pris.
« Je pense que j’aurai trop peur de décevoir mes parents, à trop l’assumer. »
Il n’habitent pas Kobe, mais les rumeurs circulent vite. Il a eu peur, quand tout le monde a appris pour lui à Osaka, que des vidéos soient diffusées sur les réseaux sociaux. Ses parents n’utilisent pas internet, mais son grand frère, si. Et son grand frère, il a un avis très tranché sur l’homosexualité. Il est de ceux qui ont grandi avec des convictions fortes. Un homme, ça va avec une femme, jamais l’inverse !
Pauvre Nobu, qui aimerait pouvoir vivre pleinement, auprès de sa famille.
- InvitéInvité
"Il y a plusieurs solutions pour ça."
Plein, en fait. Mais l'acceptons… c'est compliqué. Déjà de soi, ensuite de la part des autres. Même pour toi, ça a été compliqué. Mais bon, la n'est pas la question, et il est rare que tu parles de ton propre chemin. Faites ce que je dis, pas ce que je fais, tout ça.
"Tu peux tenter d'en discuter avec eux, tranquillement. Tâter le sujet comme on dit."
Mais bon, tu n'es pas assez subtile pour ce genre de chose.
"Ou alors, purement et simplement les ignorer."
La méthode bourrine. La tienne.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Et c’est qu’elle a raison, la petite blonde. Ce sont les seules deux manières de faire. Au fond, Nobu, il aimerait bien que ses parents le sachent déjà, et qu’il n’ait rien besoin de dire. Et puis merde ! Pourquoi on est obligé de faire un coming out, quand on est gay ? Pourquoi les hétéros non !
« Ce serait tellement plus simple si on n’avait pas besoin de se justifier tout le temps… »
Parce qu’ignorer sa famille, Nobu ne peut pas le concevoir. Et pourtant. Pourtant il n’est pas d’accord avec l’idée qu’ils se sont construits de lui. Nobu, c’est leur ascension sociale. Grâce à ses études, il aura un bon travail, une bonne situation, et pourra leur payer une belle retraite. Tout ça, avec femmes et enfants. Alors, la bonne situation, Nobu n’est pas contre, mais est-ce qu’ils l’accepteront toujours sans petits enfants ?
« Tu choisis quelle solution, toi ? »
- InvitéInvité
Il faut espérer. Et faire bouger les choses. C’est pour ceci que tu te bas, après tout. L’homosexualité — et autre — c’est normal, c’est juste différent. Pas de quoi en faire un fromage. Il y a des raisons pour lesquelles d’autres pays ont approuvé le mariage entre personnes du même sexe, même si ça a souvent été à grand coup de manifestation. Mais va demander ça aux gentils et traduis’ Japonais, pour rire.
"Déjà si on arrête d’être prit comme des monstres ou des aliens, ça serait bien, pour commencer. Mais le japonais moyen est arriéré à ce sujet. "
Ça, c’est dit. Au moins c’est clair. Tu as toujours été très incisive à ce sujet, parce qu’il n’y a pas vraiment de débat à avoir, avec un "bon" et un “mauvais” côté.
Alors pourquoi tu n’en causes pas à ta famille ? Joker.
"Je m’en fiche d’eux, je leur cause uniquement quand c’est nécessaire. Peut-être en cadeau d’adieu, quand je prendrai vraiment mon indépendance. "
Et ça sera fun. "papa, maman, je suis gay, si vous n’êtes pas content, tant pis, si je ne suis plus votre fille, je m’en fiche". Ça sonne pas mal. Dans ta tête, ils vont forcément refuser la chose. C’est pas plus mal s’ils l’acceptent, mais ça ne changera pas grand-chose non plus.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Dans quelques années ? Nobu a du mal à le croire. Il a l’impression que le Japon ne rattrapera jamais son retard sur le reste du monde. Parfois, il se met à rêver de partir, aller dans un pays qui a légalisé le mariage et l’adoption pour les personnes homosexuelles. Et souvent, il retombe sur la dure réalité : même dans ces pays, l’acceptation n’est pas évidente.
« J’aimerai pouvoir te contredire mais… » Force est de constater qu’elle a raison. Nobu n’aime pas l’idée de parler de ses pairs comme des “arriérés”, mais les traditions ont ici la vie dure. « Les vieux, je pense que c’est cause perdue, mais si au moins les jeunes peuvent nous lâcher la grappe… » Ce serait dans le sens de l’évolution, n’est-ce pas ?
Nobu est surpris de ce que dit Maya. Ah, oui. Elle n’a pas les mêmes relations avec sa famille. Maya semble en avoir gros sur la patate, à ce sujet. Nobu, jamais, au grand jamais, il pourrait supporter de ne plus être de leur famille. « Tu préfères les rejeter que de te faire rejeter, au final ? »
- InvitéInvité
"Faudrait plus de canicules."
Quoi ? Ce n’est pas de ta faute si les vieux relou y sont plus vulnérables. Si au moins ils étaient un peu plus sympas…
"Le problème, c’est que les vieux éduquent les jeunes. Mais certains jeunes veulent changer les choses, donc ça aide. "
Heureusement d’ailleurs. Serais-tu aussi affirmée sur le sujet sans un peu de soutien ? Peu de chance, malgré ton caractère. Tu es courageuse (ou stupide, ca dépend des points de vue) mais il y a des limites…
"C’est pas pareil."
Tes parents. Un sujet épineux. Que tu ne veux certainement pas aborder.
"Ça joue, mais ce n’est pas uniquement à cause de ca."
Et il n’a pas besoin de savoir. S'il insiste, ca risque de t’énerver. « Mais tout t’énerve ! ». C’est vrai, mais là, c’est différent. Enfin, non. Enfin si. BREF.
"Peut être que si tu tentes un truc de pseudodrag’ pour le prochain festival du campus… "
Et pourquoi pas, après tout ? Il y a peu de chance que ca passe, mais ca pourrait être drôle.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Nobu ne peut retenir un rire. Plus de canicules ! Il n’est pas du genre à espérer la mort de personnes. Même pas de vieux. Même pas de vieux racistes et homophobes. Peut-être qu’il n’irait pas les pleurer sur leur tombe, mais quand même. Pourtant, la blague de Maya le fait rire, à gorge déployée. C’est vraiment trop con, mais ça lui fait du bien.
« J’ai envie d’espérer que les jeunes s’éduquent un peu par eux même, et en contradiction avec leurs parents… »
Surtout avec internet, les réseaux sociaux, les téléphones, et toute cette technologie qui fait peur à la génération d’avant. On se demande bien pourquoi !
Et tout à coup, l’ambiance devient plus froide. Et Maya se referme, aussi. Nobu le sent. Il a mis les pieds dans le plat, alors qu’il ne le souhaitait pas. Il a du mal à imaginer se disputer avec ses parents, alors il oublie parfois que toutes les familles ne sentent pas la rose. Alors, il ne répond pas, à ce sujet, et il le laisse mourir. Il ne veut pas savoir pourquoi elle s’énerve, et c’est bien son droit à elle.
Ils se rapprochent doucement du konbini. Le ventre de Nobu commence à râler, c’est vrai qu’il a faim. Il mangerait bien quelques biscuits, juste pour le câler. De toute manière, pas besoin de compter les calories, la piscine ça supporte tous les excès.
Il commence à penser au gâteau qu’il va prendre quand Maya parle de nouveau de drag. Cette fois, il ne s'énerve pas, et il n’est pas surpris non plus, parce qu’il n’y a personne autour pour les entendre. Il répond, le plus calmement possible :
« Je ne crois pas être prêt pour ça, encore. »
- InvitéInvité
Au moins ta blague (c'est une blague, pas vrai ? Si si, ça en est une…) le fait rire, c'est déjà ça.
"Le problème, c'est qu'on récupère en grande partie l'éducation de nos parents. S'ils te disent que quelque chose est vrai, tu vas souvent les croire. Surtout quand tu es petit."
C'est le principe de l'éducation. Le nombre de vérités et de mensonges proféré sont aussi importants les uns que les autres. Le père Noël, tout ça…
"Et soyons francs, tu serais aussi informé si tu n'étais pas concerné ?"
Pour toi ? Pas sur. Le nombre de choses que tu ne connais pas. Il y en a beaucoup. BEAUCOUP. Comme tout le monde. Et ce sont des sujets tout aussi graves.
Et le sujet de tes parents est soigneusement évité. Bien. Ça t'évitera de t'énerver pour rien.
"Normal."
Le faire comme ça, de but en blanc, c'est un peu… compliqué.
"Quand je vois que certaines personnes sont fascinées par le crossdressing, c'est pas si éloigné que ça."
Bon, il y a des différences, mais c'est dans le même "type de loisir" en quelque sorte.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Nobu hoche la tête. Elle a raison, et pourtant, il aimerait bien pouvoir dire le contraire. Petit, Nobu rêvait d’être comme son père. Adolescent, comme son frère. Il a tout appris d’eux et il lui est difficile de nier ce qu’ils pensent, ou ce qu’ils disent. Pourtant, il sait que sa famille est loin d’être modèle et qu’ils ont beaucoup à apprendre d’un point de vue racisme et homophobie. Ils ne sont pas foncièrement méchants, juste ils ne comprennent pas, parce qu’ils ne connaissent pas.
« Evidemment que non. »
Nobu est né dans une famille de pêcheurs. De vrais bonhommes. Le genre qui n’ont pas beaucoup de loisirs à côté du travail. Le genre qui n’ont pas le temps de se demander qu’est-ce que l’homosexualité. S’il a commencé à y réfléchir, ce n’était vraiment pas par gaieté de cœur. Et des fois, il aurait préféré ne jamais vraiment le savoir.
« Le crossdressing ? » Nobu se tourne vers Maya. Il a déjà entendu ce mot, mais il n’a jamais vraiment cherché ce que c’était.
- InvitéInvité
Enfin bon, le sujet suivant.
"Ouaip. Tu connais forcément, non ?"
Qui ne connais pas ?
"Là c'est plus précisément les mecs qui se déguisent en filles. "
Et les filles en mecs. D'ailleurs la tenue un peu masculine de Nissa... damn elle est sexy dedans. Mais la n'est pas la question.
"Ce n’est pas aussi glamour que le crossdressing, mais ça y ressemble."
Et pourtant ça n'est pas mal vu. Comme quoi tout est une question de culture.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
« Bah, euh. Oui ? »
Nobu est étonnamment confus. En fait, ce qu’il fait, en faisant du Drag Queen, c’est aussi considéré comme du crossdressing. Il y a dans cette grosse catégorie tellement de possibilités ! Il y en qui sont plus stigmatisés - lui, par exemple -, et d’autres bien plus tranquilles - les cosplayeurs, en convention. Au final, il n’a jamais vraiment réfléchi à ces autres situations. Il ne connaît aucun garçon qui s’habille en fille, hors son entourage homosexuel, ni de fille qui s’habille en garçon.
« Cela dit, il y a habillé en garçon et habillé en garçon. » Il précise. « Un Drag King, ce sera stigmatisé, c’est beaucoup de maquillage, ça performe le genre. Alors qu’une fille qui porte un veston et un pantalon, c’est rien d’autre qu’un vêtement. Le pantalon est bien moins genré que la jupe. »
Là-dessus, Nobu en serait presque jaloux. Il aimerait que les vêtements n’aient pas de genre. Il aimerait pouvoir le dire, aussi. Mais il sait que ce n’est pas vrai, et que s’il voulait porter une jolie robe dans la vie de tous les jours, il serait pointé du doigt et porté en exemple.
- InvitéInvité
"Ouaip, c'est sur. Et je tiens à préciser que maintenant ça n'est plus genré."
À une époque, ça l'était. C'était un vêtement d'homme ; et des héroïnes se sont levées et ont décidé que c'était complètement stupide, ce qui a été très efficace. Bon après tu dis ça, mais tu n'aimes pas vraiment porter de pantalon. Tu ne trouves pas ça confortable. Et la robe c'est un moyen d'affirmer ta féminité. Étrange, n'est-ce pas ?
"C'est dommage, parce que j'irai presque jusqu'à dire que les jupes ça va à certains mecs."
Et c'est un gros effort de ta part, toi qui est réputée pour être misandre.
"Faut vous battre pour ça les gars."
D'une certaine manière, c'est chacun son tour. Toi en ce moment tu te bas pour que les robes ait cette technologie interdite : des poches !
"Pour le coup nous les femmes pouvons nous donner quelques techniques."
Tu as un petit sourire satisfait. C'est souvent le cas quand tu mets les femmes en valeur.
- InvitéInvité
Le jeudi 8 février 2018
Il hoche la tête. C’est comme le drag, au final. Toutes ces pratiques, ça évolue tellement rapidement ! Il y a encore quelques années, les femmes ne performaient pas le genre féminin comme Drag Queen. Aujourd’hui hommes, femmes, et tout ce qui est entre les deux font ce qu’ils veulent quand ils le veulent. Enfin, bien sûr, la communauté queer n’est pas toute gaie, et Nobu sait que les personnes déjà margnialisées ont parfois du mal à s’y faire une place. Elle a eu vent d’une camarade noire qui se faisait refuser toutes les scènes parce qu’elle n’était pas “japonaise”. Nobu a eu du mal à le croire. Pourquoi vouloir faire subir aux autres ce que la société te fait subir ?
Quand Maya parle des jupes masculines, Nobu s’exclame, d’un coup : « Carrément même ! » Puis, il rougit. Il s’est emporté, pour le coup. « Y’a un créateur français. Jean-Paul Gaultier. Il a fait des jupes pour les hommes, et vraiment, c’est sublime. Le masculin perd en rien à porter des robes. » Qu’est-ce qu’il aimerait oser les porter. Pour le moment, il ne s’y tente pas. Ni à ça, ni aux vêtements trop colorés. En fait, il a peur. Il ne veut pas être pointé du doigt comme “le gay”. Mais au fond, il adorerait s’assumer plus.
« Tu as raison, faut qu’on se batte. » Il hoche la tête. « Abolir les limites de la masculinité, c’est certainement aller vers le bon sens de la société. Plus de genres, que des individualités ! Après, va savoir comment on peut lutter… »
C’est pas comme s’il existait un club des gays à Kobe.
- InvitéInvité
Tu prêches l'intérêt des jupes à un convaincu. Bien sûr qu'un gars comme lui adore les mecs en jupe. Tu te demandes si c'est son kink. Question con. Passe à la suite, ça n'est pas vraiment la peine de penser à ceci… Chacun ses gouts, tout simplement.
"Ah ? Je ne connais pas. Je ne suis pas très mode."
Ironique, vu comme tu t'habilles. Mais tu te tiens au courant uniquement pour les trucs gothiques. Tu es une jolie gothique !
"Ça ressemble à quoi ? Et j'imagine qu'en plus ça doit couter une blinde sans trop de raison."
Les habits de créateurs sont parfois abusés… Ou alors tu juges sans trop connaitre.
"Pour se battre, on revient à cette histoire de groupe. Si tu ne veux pas en rejoindre ça, ne va pas aider. Après tu peux tenter seul, mais c'est plus compliqué. Enfin, il y a toujours des actions à prendre seul, mais c'est difficile d'être discret."
En groupe, une ou deux personnes peuvent servir de tête de groupe et d'affiche. Tous les gays ne veulent pas être connus. À raison, au Japon. Mais ça tout le monde le sait. Lui inclut.