Les comptes non recensés seront supprimés lors de la maintenance alors n'oubliez pas de poster dans ce sujet !
- InvitéInvité
Dans un soupir, elle se met à regretter son geste de la veille. Moon avait acheté deux places à l’aquarium de Kobe : une pour elle, une pour une étudiante du club d’arts plastiques. Elle voulait s’entraîner à peindre les poissons. En dernière minute, l’adolescente a décommandé, “raison familiale”. Malheureusement, les places sont non-remboursables.
Elle s’est trouvée bien bête, avec ses deux tickets pré-achetés. Après avoir appelé son maigre carnet d’adresse, en quête d’une amie avec qui prendre du bon temps à l’aquarium, elle a cru devoir abandonner. C’est l’été, et personne n’est disponible. Satanées vacances ! Tant pis, elle irait voir les poissons toute seule.
Et finalement, une idée.
Le souvenir d’un rendez-vous réussi, et de quelques messages échangés. Depuis la soirée du 17 juillet, Moon et Ryuji ne se sont plus revus. Il y a bien eu l’afterwork, mais trop gênée par la présence de leurs collègues, Moon a préféré ignorer son partenaire.
Le pauvre.
Alors, elle a attrapé une enveloppe, y a glissé le ticket prépayé. En guise d’invitation, elle a écrit sur une petite feuille de papier à correspondance : “J’avais une place en trop. Si vous êtes disponible, je serai en face de l’aquarium à l’heure inscrite sur le ticket.” Sans plus attendre - il ne faut pas trop réfléchir à ce genre d’idées - elle a dévalé les escaliers pour poster l’enveloppe dans la boîte aux lettres de l'intéressé.
Seule, devant l’aquarium, elle se met à penser qu’il n’a pas reçu sa lettre. Ou peut-être trop tard. Qu’il est peut-être occupé, en rendez-vous, avec des amis ou pire avec une femme. Après tout, ils ne sont rien d’autre que des amants d’un soir, elle n’a rien à redire.
Elle est juste un peu déçue.
Pourtant, elle s’est préparée comme pour un rendez-vous. Une robe en lin rouge, assez légère, qui met en valeur ses cheveux lâchés. Un peu de maquillage - moins que la dernière fois - et quelques bijoux dorés. Cette fois, elle a troqué ses hauts talons pour des sandales plus confortables.
- InvitéInvité
Factures, factures...
Publicités, publicités et encore... publicités.
Oh, le dernier numéro de Hobby Japan !
... et une invitation ?
Relever le courrier relevait (sic) d'une tâche plutôt fastidieuse, pour ne pas dire chiante, en fait. Ryuji détestait ça, car cela voulait souvent dire factures à payer et moult pubs sans queue ni tête. S'il disposait d'une cheminée, il aurait de quoi allumer le feu avec tout ce papier gaspillé qui ne demandait qu'à s'embraser sur-le-champ. Cette fois, cependant, il y avait un petit "plus" pas du tout désagréable. Non, il ne s'agit pas du numéro Août 2017 de Hobby Japan, bien qu'il l'ait attendu de longs jours, mais bel et bien de cette invitation à l'aquarium de Kobe. Et bien plus que l'invitation en elle-même, c'était la personne qui lui avait déposé dans sa boîte aux lettres qui rendait l'événement important... Moon.
C'est qu'elle l'avait un peu hantée, la prof de cinéma, depuis leur dernière rencontre. Sans compter l'afterwork, où elle l'avait royalement ignorée – il faut dire que Ryuji lui-même n'en menait pas large, entre la cascade de Sake Bomb et le minois de sa coréenne qui lui faisaient tourner la tête. Il y eut des échanges par messages évidemment, mais la flamme devait être rallumée sinon elle risquait de s'éteindre pour de bon. "Ne m'oubliez pas", avait-elle prononcé avant de fermer la porte de son appartement. Oh que non il n'avait pas oublié, bien au contraire. Il lui avait signifié une fois par message, au retour de cette soirée entre collègues, mais il n'eut pas la réponse escomptée.
Mais quel autre meilleur moyen de raviver leur flamme qu'un rendez-vous... dans un aquarium ! Le décalage était complet mais il comprenait l'idée. Se revoir dans un lieu 100% neutre était une bonne idée. Il occulta momentanément le fait qu'elle disposait juste d'une place en trop, préférant croire qu'il s'agissait là d'une excuse pour l'inviter, typique du "Ne crois pas que j'ai directement pensé à toi, idiot !" si commun aux mangas et animes chers au coeur du trentenaire. Il sourit en finissant sa cigarette, sans réellement se rendre compte qu'il allait arriver en retard, très peu courtois. Puis finalement, la pièce tomba et il se transforma en la balle la plus rapide jamais tirée. Cheveux, dents, lunettes de soleil sur le nez et petite tenue pas piquée des hannetons malgré son manque d'élégance en comparaison de celle du 17 juillet dernier.
Il rejoignit l'aquarium le plus vite possible, évitant au maximum d'arriver plein de sueur, déjà qu'il détonnait par sa tenue, il ne voulait pas avoir l'air débraillé pour autant. Il avait bel et bien la place sur lui, son briquet et ses cigarettes (plus question de se retenir, ça non), son portefeuille et même son appareil photo, le grand luxe. Quitte à aller voir des poissons et autres animaux marins, autant chercher de beaux clichés... Et peut-être voler le portrait de Moon au détour d'une galerie, qui sait ? Une fois sur place, il la repéra assez facilement malgré ses cheveux détachés. L'air décontracté lui allait plutôt bien, même si il se doutait qu'il devait encore y avoir un stade de décontraction supérieur. Elle restait élégante, même en mode touriste du samedi.Désolé pour le léger retard, j'ai eu un contre-temps... Merci de m'avoir attendu et merci pour l'invitation, ça me fait plaisir
C'était plus ou moins sorti tout seul. Aie. Ce mois sans la voir ni l'avoir lui avaient ravagé le cerveau. La journée s'annonçait déjà mémorable.
- InvitéInvité
Il ne viendra pas.
Son cœur est lourd. Mais elle ira quand même à l’aquarium se consoler, et voler un peu de fraîcheur. Après tout, elle n’a aucune envie de rentrer chez elle : son climatiseur est encore en panne, et elle risquerait de croiser Ryuji. Comment garder la face suite à ce rejet effectif.
Elle s’apprête à se lever quand une voix masculine la sort de sa torpeur. Bon dieu. Lâche-t-elle par surprise. La tête dans la lune, persuadée de finir la journée seule, Moon ne faisait plus attention à ce qui l’entourait. Et difficile de cacher sa surprise.
Les yeux ronds, la bouche en cœur, elle regarde Ryuji comme un fantôme, avant d’arborer un large sourire.
Il est venu.
Merci d’être venu.
Elle n’y croyait plus. Le voir, ça lui fait plaisir à elle aussi - et ce même dans cette tenue décontractée -. Sur ce, elle se lève, le salue d’un signe de tête poli - elle ne va pas non plus l’embrasser devant tout le monde -, et se dirige vers l’aquarium. Ils tendent leurs billets, avant de pénétrer dans le noir.
L’onde des premiers aquariums se reflètent sur les murs. C’est finalement assez intime, comme lieu, l’aquarium, malgré les quelques familles venues s’y promener. Les lumières sont tamisées et le son de l’eau réconfortant.
Qu’est-ce que vous aimeriez-voir en premier ?
Même s’il y a un parcours défini par des flèches, Moon n’est pas contre l’idée de se perdre dans les allées, de changer le chemin, de s’abandonner à Ryuji dans l’un des recoins.
- InvitéInvité
Elle était belle une fois sa coquille de femme fatale entrouverte à coups de Kabedon, la Moon un peu plus enjouée était vraiment plaisante. Pas que celle qu'il avait vue lors de leur rencard soit repoussante, oh non loin de là, mais Ryuji faisait partie de ceux que le naturel et les choses un peu mignonnes font fondre. Et rien qu'avec leurs salutations gênées, il était servi. Il sentit ses oreilles rougir et chauffer, sûrement à cause de ce fichu soleil du mois d'août, sans nul doute. Après tout, pour quelle autre raison !?
Il la suivit dans le complexe, en profitant pour détailler sa tenue, un passe-temps qu'il notera probablement parmi ses activités favorites si ce genre de petites escapades se reproduisaient. "Reste concentré et pas juste con et centré, Ryu !", se dit-il à lui-même, alors que ses yeux s'étaient plantés plus de deux secondes sur le bas du dos de Moon. Rester sérieux, rester digne, rester sérieux, rester digne, penser à ce pourquoi il était venu : que voulait-il voir en premier dans cet aquarium ? Toi.
, lâcha-t-il sans s'en rendre compte, comme si c'était une réponse naturelle. Ahem. Euh. Je veux dire. Hm.
Bravo Ryuji, cinq minutes à peine après être entré dans l'aquarium et il faisait déjà une gaffe. Record battu mon garçon. Il faudra qu'il en parle à sa mère lors de leur apéro-visio mensuel, elle sera morte de rire. Enfin non, peut-être ne pas lui en parler, il se sentait déjà bien assez ridicule comme ça. Aux antipodes totales du Ryuji séducteur et assuré qui avait décroché la lune, sans mauvais jeu de mots. Au fond, c'était ça son vrai visage, autant qu'elle s'en rende compte. On ne peut pas être cool et avenant en toute circonstance et, au fond de lui, il espérait qu'elle le sache et s'en rende compte.On pourrait peut-être aller là-bas ?
, lui glissa-t-il ensuite à l'oreille en pointant vers une allée moins peuplée.
C'était l'allée menant vers les prédateurs. Bon, pas un choix des plus judicieux mais il aimait vraiment les requins, les raies et autres célèbres poissons carnassiers. Ca faisait partie de ses petites bizarreries un peu touchantes. Enfin, paraît-il.
- InvitéInvité
Je note. Lance-t-elle avec une certaine malice.
Après tout, si elle ne s’était pas comptée dans les catégories “poisson en aquarium”, elle ne peut pas nier avoir elle aussi bien envie d’admirer son rencard. Elle est juste un poil plus discrète que lui. Difficile d’ignorer ses oeillades.
Allons-y.
Enjouée, et satisfaite de la réponse de Ryuji, Moon se permet de nouer leurs mains pour le tirer jusqu’à l’allée des requins. Sa poigne est légère, il pourrait s’en défaire à tout instant. Mais elle avait envie de le toucher, de le sentir un peu à elle.
Arrivée devant l’aquarium, Moon a des petites étoiles dans les yeux. Elle avait oublié combien c'était beau. Entre les grands et impressionnants requins, quelques petits poissons colorés se frayent un chemin. Tout en gardant la main de Ryuji dans la sienne, Moon s’approche de la vitre, pour pouvoir observer les animaux de plus près. Certains sont cachés derrière les rochers et elle aimerait pouvoir les regarder.
Dans son sac, elle a apporté avec elle un petit carnet à dessin et des crayons. Mais elle n’ose pas le sortir pour croquer. Elle sait que Ryuji est prof de design, et à priori pas trop mauvais en dessin, alors qu’elle est complètement novice en la matière.
Regarde ! Le petit requin à tâches ! Elle montre du doigt le petit animal en arrière-plan, qui nage dans les profondeurs.
Sans vraiment bien s’en rendre compte, peut-être encouragée par l’enthousiasme de la vue, Moon en abandonne le vouvoiement.
- InvitéInvité
Il tressaillit lorsqu'elle saisit sa main, un comble alors qu'il l'avait teasée et chauffée à blanc le mois dernier. C'est qu'il ne s'attendait pas à ce rapprochement physique si... Soudain et naturel en fait. Ce n'était absolument pas négatif, bien au contraire d'ailleurs. Il enserra sa main avec la sienne et put enfin goûter a sa douceur. Comme il s'y attendait, elle était vraiment douce.
Direction les grands prédateurs ! L'appareil photo - un modeste DSLR d'un certain âge mais qui en avait encore dans le ventre -, était prêt au chaud dans sa seule main libre, l'autre toujours prise par son date. Moon était presque extatique, lui pointant ça et là plusieurs espèces de requins, dont un petit à tâches. Ryuji aurait aimé pouvoir le reconnaître pour l'impressionner mais quelque chose en lui lui dit qu'il n'était plus l'heure pour ce genre de jeu.
C'était l'heure de qui craquera le premier visiblement. Il mourait d'envie de prendre des clichés mais il tenait a garder la main de Moon dans la sienne, tandis qu'il avait remarqué qu'elle semblait vouloir faire quelque chose, sans pour autant mettre le doigt dessus. Lui vint l'idée d'un défi. Vas-y, croque !
, lui dit-il avec un grand sourire. Tu dois avoir un carnet et un crayon dans ton sac, non ? Dessine ! Moi je prendrai quelques photos. Mais on ne juge pas hein, un référent de club photo qui cadre mal ses clichés, ça la fout mal...
Il rougit. Évidemment le club était un prétexte, il voulait garder un peu de contrôle dans cette situation en totale roue libre. Pourtant habitué du hors piste, c'était l'une des premières fois où il se sentait mal à l'aise, mais en bien !
Comme pour vouloir la motiver à passer a l'action, il se sépara d'elle quelques secondes, s'éloigna d'un pas pour saisir son appareil et le pointer directement sur elle. Son sourire jusqu'aux oreilles était perceptible même derrière le boîtier. Allez. Sinon c'est toi que je prends en photo.
, dit-il en riant de bon cœur.
Le plan était béton. Une Moon interloquée, presque perdue d'avoir perdue la main de son date en apparence, gênée d'être devant l'objectif, sur fond de vie sous-marine dans tous les recoins. La scène était tellement belle, il en rougit si fort que ses oreilles purent se mettre a fumer a haute pression.
- InvitéInvité
Heureusement, le coupable se détache de Moon et fait quelques pas en arrière. Juste assez pour laisser à la trentenaire le temps de reprendre ses esprits. Un soupir de soulagement, que Ryuji manque de prendre en photo. A l’instant où le DSRL pointe vers elle, Moon prend la pause.
Les vieilles habitudes.
Pas question d’être prise en traitre, pas question de fuir. Le dos bien droit, les jambes ancrées dans le sol, Moon sourit à la caméra. Ses yeux se plissent même un peu. Avec une lumière si basse, la professeur de cinéma doute du résultat de la photo. Il lui faudrait un objectif avec un peu plus de diaph, et le boîtier n’est pas le plus neuf du marché.
L’obturateur se déclenche.
Aussitôt, elle se rapproche de Ryuji, se penche vers l’appareil, tout en glissant une main sur l’épaule du professeur pour l’équilibre. D’un œil curieux, elle veut, elle aussi, s’admirer sur la photo, prête à la supprimer si elle ne se trouve pas à son avantage.
C’est pas si mal. Glisse-t-elle à l’oreille de Ryuji, dans un murmure. Tu me l’enverras.
Sur ces mots, Moon se détache de son français, et se dirige vers un petit banc, en face de l’aquarium. A côté d’elle, un petit garçon se déchaîne, apparemment excité par les requins, mais aussi un peu fatigué par la visite. Elle ne peut empêcher un sourire attendri, avant de sortir le cahier et sa trousse de crayons de son sac.
Elle est un peu gênée, à l’idée de croquer. Elle fait tourner un crayon gris entre ses doigts, hésite à le poser sur le papier. Depuis quelques semaines, elle prend des cours particuliers avec un lycéen. Si elle n’est pas devenue Rembrandt en l’espace d’un mois, elle a tout de même perçu une évolution dans sa pratique. Ses traits sont un peu plus fluides, plus assurés. Par contre, les proportions et la perspective, ce n'est pas encore tout à fait ça.
L’une des raisons pour laquelle elle voulait dessiner d’après modèle.
Dans un léger soupir, sûrement pour se donner du courage, elle se met à détailler le corps du petit requin tacheté, qui s’est rapproché entre-temps de la vitre. Il est beaucoup moins impressionnant que les autres, mais également bien plus gracieux. Elle commence à détailler sa forme. Ce n’est pas si simple, l’animal bouge, mais en substance, ce n’est pas trop mal.
Lorsqu’elle sent la présence de Ryuji, Moon pose une main sur son dessin, pour le cacher, et relève les yeux :
Pas de commentaire, monsieur le prof de design. D’un ton hâtif, avant d’avouer dans un soupir un peu gêné. Ce n’est honnêtement pas terrible.
- InvitéInvité
*click* fit le vieil appareil et l'image d'une jolie trentenaire, tout sourire, s'afficha sur l'écran. Il aurait préféré quelque chose de plus spontané mais il dut se résigner à reconnaître qu'elle savait se mettre en valeur, comme si elle avait l'habitude d'être prise en photo. Peut-être par ses précédents dates ? Ou non. C'était le maintien d'une professionnelle, après tout on ne devient pas prof de cinéma comme ça, il doit bien y avoir une histoire derrière ça. Il lui demandera quand ils mangeront un bout.
Moon s'était rapprochée entre-temps. De la fumée s'échappa de ses oreilles quand elle s'approcha de lui pour regarder dans l'écran de l'appareil photo ; une chose qu'il ne supportait habituellement pas, comme regarder par-dessus on épaule lorsqu'il avait crayon en main, mais là... ça passait, étrangement, si on décompte la gêne et la chaleur. Au moment où elle complimenta son cliché pas si top que ça, techniquement parlant, brisant un interdit qu'il fixe en général dès le départ (les oreilles c'est sacré, il est super sensible), il dut renforcer sa prise sur le DSLR pour ne pas la plaquer au mur et l'embrasser. C'en était trop, la Moon du jour était trop mignonne pour lui.
Il avait bel l'air, le gars qui avait fait le mec chaud la dernière fois, maintenant presque tétanisé par la proximité entre lui et... et quoi d'ailleurs ? Collègue ? Amie ? Partenaire ? Petite copine ??
Pendant qu'il était dans la lune, Moon s'était mise en position dessin. Objectif: le petit requin tacheté. Ryuji n'était pas ichtyologue pour un sous mais il crut reconnaître une roussette. Il demandera à un employé de l'aquarium, par acquis de conscience mais il l'appellera Lucien le Requin. La coréenne était donc en plein dessin de Lucien, concentrée comme Ryuji l'était sur elle, sur sa façon de tenir le crayon, le carnet, ... réprimant l'envie de remplacer ce crayon l'espace d'un instant, il se décida à se rapprocher d'elle en se penchant vers son dessin.Je suis sûr que c'est de l'exagération.
rassura-t-il en lui bougeant lentement la main. Promis, je regarde juste, pas de jugement ni de critique sauf si demandé !
Il mit la main droite sur le coeur comme pour signifier un serment puis passa derrière elle pour mieux voir le croquis. Pour une débutante, franchement, c'était vraiment pas mal et en toute honnêteté, en ce qui concerne le vivant, le professeur de design n'en menait pas large pour autant ; il était plutôt habitué aux paysages, au design de meubles, voire de vêtements, et aux poses lascives mais ça c'était avant... et hors de question qu'elle l'apprenne. Ca ferait mauvais genre si elle savait qu'il avait bossé sur de l'animation pour adulte, de quoi torpiller toute chance de la revoir et ce, de manière définitive.C'est vraiment pas si mal...
, lui glissa-t-il dans l'oreille. Oeil pour oeil, oreille pour oreille. Pas parfait mais rien n'est parfait. Tu verrais mes dessins, une honte.
Il osa un timide baiser sur le haut de sa tête en se relevant, l'air de rien suivi d'un On continue ?
des plus naturels en lui tendant la main. A son tour de faire du chemin vers elle. Petit à petit. Les raies, tortues marines et autres concombres de mer les attendaient !
- InvitéInvité
Mais finalement, encouragée par Ryuji, elle lève la main.
Rien que quelques instants, juste le temps qu’il puisse observer les traits, mais pas assez pour qu’il puisse détailler la forme. Rapidement, elle referme le carnet, qu’elle tient bien fermement sur ses genoux.
Pas besoin de mentir. Elle hausse les épaules. Un prof de design, ça sait dessiner un minimum.
Le contraire serait étonnant. Après tout, Moon ne remet pas en question son habilité à tenir une caméra ou à naviguer sur un logiciel de post-production. Elle n’est pas professionnelle, mais ses connaissances suffisent à l’enseignement. Et alors qu’elle s’apprêtait à ranger son carnet, se lever, pour la suite, les lèvres de Ryuji s’écrasent sur le haut de sa tête.
Surprise, elle pose une main sur ladite tête, et recule de surprise. Dans le geste, son coude frappe le bras de l’enfant à sa droite. Elle se tourne immédiatement, à la fois désolée et gênée. Le môme - à priori plus chiant que mignon - se met à pleurer. Décontenancée, Moon fait quelques signes de main pour le consoler.
Pardon, pardon, tu as mal ?
Il ne répond pas, mais continue de brailler. Merde, merde, merde. Elle avait pourtant remarqué la turbulence du gamin. Même si le coup de Moon n’était pas violent, il a suffi à déclencher la machine à pleurs. Certainement plus fatigué que blessé, l’enfant a bien besoin d’aller courir dehors.
Mais c’est trop tard, et la mère du brailleur se dirige vers Moon, l’air furieux. Elle attrape la main de son enfant, le colle à sa jupe.
Qu’avez-vous fait, madame ?
Dans une courbette polie. Je suis désolée, je l’ai un peu bousculé. Moon ne relève pas la tête. Elle est certaine que le gamin n’a pas un bleu. Mais elle n’a aucune envie de se disputer avec la mère. Quand elle s’énerve, elle peut brailler. Et elle ne veut pas montrer cette facette d’elle-même à Ryuji.
Pas déjà.
- InvitéInvité
"Qu'elle est dure envers elle-même" pensa-t-il. C'est vrai qu'il n'avait pas observé son dessin au détail mais quand même, pas de quoi se flageller. Puis il faut bien commencer quelque part... Décidément, entre la petite Nissa et ça, il avait rencontré peu de gens fiers de leur coup de crayon, mais pour l'heure il avait d'autres chats à fouetter, ou plutôt une situation à désamorcer : soudain un enfant chouinant et sa mère énervée apparurent !
Forcément, Ryuji se retourna vers la scène lorsqu'il entendit la mère hausser le ton. Il avait assisté du coin de l'oeil à ce qui s'était produit et le petit n'avait rien, puis Moon s'était assurée qu'il aille bien, gagnant un point au passage. Soit, le comptage des qualités attendra. Pour l'heure il devait trouver la meilleure façon de régler le souci. Inutile d'utiliser la manière forte, on ne parlait pas de voyous l'agressant dans la rue, puis c'était une mère de famille, il n'allait pas hausser le ton sur une mère de famille ! Deuxième option, régler le souci de manière diplomate et pacifique, ce qui semblait être la meilleure décision à prendre. Mais après, il pouvait aussi tout autant la laisser se débrouiller comme une grande, mais ce n'était clairement pas la bonne voie à suivre s'il voulait la meilleure fin. Il opta pour l'option B. Commença sa quête, en trois étapes simples.
Etape 1 : ne pas avoir l'air d'une menace.
Il s'approcha des deux femmes et de l'enfant encore larmoyant, l'air décontracté et avenant, le plus naturel possible en fait. Il se baissa à son tour pour observer le bras du petit, évidemment il n'avait rien, mais vaut mieux se mettre dans la peau du petit, sans doute crevé et surpris par l'interaction physique. T'es solide !
lui dit-il en riant.
Etape 2 : se mettre le petit dans la poche.
Ryuji se releva banda un vague semblant de biceps, pour joindre le geste à la parole, ce qui fit ricaner le petit. Voir les gens se tourner en ridicule, c'est ce qu'ils préfèrent, surtout les adultes. Il aurait pu prendre une pose d'anime mais c'eut été un peu too much. Il se concentra ensuite sur la dragonne.
Etape 3 : calmer la dragonne et sauver la princesse.
Il prit son air le plus poli tout en posant une main rassurante sur l'épaule de sa coréenne qui se répandait encore en excuse mais qui, il en était sûr, était capable de bouillir intérieurement. Il devait vraiment désamorcer la situation, alors il joua le petit ami modèle. S'adressant à la mère en ces termes : Pardonnez ma compagne, j'ai été tactile et elle a été surprise. Je suis sûr que votre grand garçon va très bien et a juste été surpris. Moi aussi ça me surprend encore quand une si belle femme me touche même par mégarde !
Le gamin se mit à rire et à prendre une pose de super héros, visiblement le choc n'était pas si grand que ça au final. La mère, elle, ne décoléra pas instantanément mais dut poursuivre son rejeton un peu trop turbulent qui dévalait déjà une volée d'escaliers les bras en arrière comme un Naruto en montée de sucre. Ryuji crut l'entendre leur dire que ça passera pour cette fois mais il n'en fit pas plus attention que ça, il écoutait distraitement en agitant les mains, en mode politesse automatique comme le font si bien les Japonais, comme son papa lui avait appris. C'était sa technique secrète pour quand sa mère s'énervait... et même si le stratagème était gros comme une maison, ça marchait toujours. Une famille de professionnels. Une fois la dragonne partie, il se tourne vers Moon.Ca va ? Désolé c'est ma faute, j'ai attaqué par surprise. Je me ferai pardonner : t'as carte blanche.
dit-il avec la voix la plus rassurante possible.
Ils avaient gardé la même posture que lors de l'altercation avec la mère de famille, autrement dit très très proches. Oreilles rouges, Ryuji sourit à Moon. Il prenait de très gros risques, à lui donner carte blanche, surtout en guise de dédommagement pour quelque chose dont il n'était en réalité qu'à moitié responsable... Et encore ! Mais bon, ça fait partie des petites choses imprévues avec lesquelles il faut jongler. Papa serait fier.
- InvitéInvité
Mais, tel un prince sur son cheval blanc, Ryuji galope à son secours.
Il s’y prend bien, le bougre, avec le gamin. Les pleurs s’arrêtent et laissent place à un large sourire. Les épaules de Moon se détendent, ils vont peut être calmer le feu dans les pupilles de la mère. La jeune professeur s’excuse de nouveau, d’un geste de tête.
La main de Ryuji sur son épaule est réconfortante. Finalement, elle n’avait pas envie de se battre seule face à cette femme, et sentir un peu de soutien n’est pas désagréable. Depuis combien de temps on n’a pas pris sa défense comme ça ? Avec les années, Moon a eu l’habitude de tout gérer seule, et de ne pas se montrer vulnérable.
Ce n’est pas si mal, de lâcher du lest.
Si le qualificatif de “compagne” la surprend - elle le note pour plus tard -, elle ne fait mouche. Après tout, c’est la meilleure manière de se présenter devant la mère. “Ma collègue-voisine-flirt” n’est certainement pas aussi sérieux. Et quand l’enfant fuit, Moon se permet un soupir de soulagement. La pression s’échappe de son corps, elle pourrait s' écrouler.
Mais elle tient bon.
Elle attrape le bras de Ryuji, comme un soutien et lui offre un petit sourire. Après tout, ce n’est pas de sa faute, si elle a réagit aussi violemment, si l’enfant était aussi proche de son coude, s’il était assez fatigué pour être au bord des larmes, si la mère était si en colère. Elle murmure :
Je garde cette carte blanche pour un peu plus tard. Allons voir les méduses.
Moon lâche sa prise, caresse le long du bras de Ryuji de sa main, avant de s’éloigner. L’aquarium des méduses est juste à côté. De grands espaces ronds illuminés de néons dévoilent différentes espèces. La salle est vide de monde. La lente danse des animaux est belle.
La trentenaire se tourne vers son partenaire :
C’est joli, les méduses, ça ferait de belles photos.
- InvitéInvité
Pour un... peu plus tard ?
, répéta-t-il, bouchée bée avant de la voir partir toute seule direction les méduses.
Il la suivit, bien évidemment. Que voulait-elle dire par "plus tard", au juste ? Ca l'amusait de le plonger dans ses pensées à chaque fois qu'elle ouvra sa bouche ou elle ne le faisait pas exprès ? A moins que ce soit juste Ryuji qui soit simplement compliqué, allez savoir. En tout cas il se décidé à planquer ça dans un coin de sa tête, il règlera l'histoire entre lui et lui-même au retour à l'appartement. En parlant de ça, il ignorait s'ils allaient rentrer tous les deux-tous les deux ou juste tous les deux et se souhaiter la bonne soirée comme si de rien n'était.
Il était hypnotisé, la bouche grande ouverte. Le balai des méduses devant ses yeux l'avait littéralement scotché. Si la salle avait été noire de monde, il n'en aurait pas pris compte tant le spectacle était fascinant. Il prit automatiquement son appareil pour prendre quelques photos, il cherchait les formes géométriques particulières, il s'amusait à imaginer des visages aussi. Il se voyait bien retoucher la couleur de certaines d'entre elles pour en faire des guirlandes lumineuses. Ca ferait un parfait fond d'écran d'ailleurs.
Il en avait presque oublié Moon et lorsqu'il tourna la tête, il voyait le reflet des méduses dans ses yeux, eux aussi plantés sur l'aquarium. Ils étaient seuls, totalement seuls. Il pourrait tenter n'importe quel rapprochement physique, mais il était en manque de réponse, il avait un certain besoin de connaître la raison de sa présence, si c'était juste un hasard, si c'était simplement car il fallait utiliser une place en trop, ou plus que ça. Il se retourna totalement pour lui faire face et prit alors une grande inspiration.Dis... Ca fait un mois. Est-ce que tu sais, maintenant ?
demanda-t-il, la voix tremblante et les yeux vissés sur le sol.
Il devait en avoir le coeur net, même si tous les signes étaient là pour lui indiquer qu'il était/qu'ils étaient sur la bonne voie. Mais un mois d'attente, surtout quand on demande de ne pas oublier, c'est long.
- InvitéInvité
Elle prend quelques captures, et les observe, satisfaite.
Toute fière de ses photographies, elle s’apprête à les montrer à Ryuji, mais alors qu’elle se retourne, elle lit dans les yeux de son partenaire plus de doutes que de joie. Alors, elle range immédiatement son téléphone - ni vu, ni connu - pour l’écouter.
Est-ce que... je sais ?
Elle glisse une main dans ses cheveux, la moue un peu désolée. Non, elle n’en sait rien. Après tout, elle ne connaît rien du bonhomme. Si ce n’est sa profession, son origine, et son lieu de domicile. Elle n’est pas certaine de vouloir tout brûler pour un presque inconnu. Aussi attirant soit-il.
Alors, elle secoue la tête de droite à gauche. Non.
Moon se retourne vers les méduses, pour éviter le regard de son partenaire. Elle sait qu'elle n'est pas sympa. Elle oscille entre signaux positifs et signaux négatifs. Alors que pour Ryuji, tout semble clair, Moon est encore un peu perturbée. D’une certaine manière, elle attendait ce rendez-vous, rien que tous les deux, pour pouvoir apprendre un peu plus du franco-japonais. Avant de prendre une décision.
Laisse moi le temps de te connaître un peu avant, hm ?
Lance-t-elle dans soupir. Décidément, ce rencard est un peu plus foireux que ce qu’elle avait imaginé. Improvisé, elle n’avait pas vraiment pris le temps de choisir la date ou le lieu du rendez-vous. Sans ce fichu billet en trop, Moon ne l’aurait peut-être même pas relancé.
- InvitéInvité
Et là... froid polaire. Il l'avait cherché, après tout, à être beaucoup trop frontal, c'était probablement son gros défaut, son incapacité à savoir comment agir convenablement et normalement en fonction des gens et des contextes. A croire qu'il était peut-être plus intéressant une fois alcoolisé, en tout cas c'est l'impression qu'il a eue en écoutant la réponse de Moon. Il aurait dû s'y attendre. Déçu, il se tourne à son tour vers les méduses. Ils sont littéralement à portée de main mais il retient la sienne de tenter de rejoindre la sienne.Trop frontal, hein?
osa-t-il demander après de longues secondes de calme.
Elle voulait juste apprendre à le connaître. Le souci c'est qu'il était quasi certain qu'elle finirait déçue du voyage. Pas qu'il ait été spécialement secret avec elle mais elle n'avait vu que les meilleurs de ses bons côté et sans parler des mauvais, il n'était absolument pas convaincu que même ses qualités les plus banales soient suffisamment intéressantes pour qu'elle décide de s'attarder sur lui et ne pas passer son chemin. Comme le mois dernier, il avait l'impression d'avoir un peu gâché leur rencontre, ça faisait très "loi des séries", un peu trop à son goût. Il déglutit. Elle voulait le connaître, elle allait être servie.Bon. Foutu pour foutu... Commençons par le commencement.
dit-il en soupirant. Ryuji, trente ans, j'ai bossé dans l'animation pour adultes mais ça m'a gavé alors que j'adore le dessin. J'ai plus touché un crayon depuis des mois à part pour les cours. J'adore les fraises et le cassis. Je suis incapable de gérer les distances avec les gens, je suis soit trop proche, soit trop distant, irrévérencieux, je danse entre les conventions sociales. J'ai mis mal à l'aise une étudiante et j'ai joué à des jeux d'arcade avec une autre, dans la même semaine, celle où on s'est rencontrés toi et moi. Et en plus je fume.
Il marque une pause. Il a tout lâché comme ça sans réfléchir et ne peut réprimer un face palm. Trop d'infos, trop de détails, trop tôt, trop trop trop. Il incline la tête vers le haut, la main toujours plantée sur son front, l'autre pendue au bout de son bras. Il a mal au crâne car il s'en veut de tout lâcher comme un idiot. Mais foutu pour foutu. Je m'emballe vite, je suis vite découragé, c'est pénible même pour moi. Mais eh, j'ai des qualités à part faire mon malin à parler Français et à faire mon show. Je ne suis pas prise de tête car je me prends déjà pas mal la tête moi-même, c'est bien suffisant.
Foutu pour foutu, tu parles. Il grogne aussi silencieusement que possible, à moins que ce soit son estomac noué. D'une part il avait faim, de l'autre il bouillonnait ; très paradoxal le garçon. Il aimerait pouvoir faire de son mieux et que cela puisse se sentir, à défaut de se voir, mais force est de constater que quand il était avec elle, il paniquait littéralement comme un gosse lors de son premier exposé d'histoire devant toute une classe et un prof bien trop calé sur son sujet et charismatique. Il eut une pensée envers Ogawa en pensant au prof d'histoire, il aurait pu rire en d'autres circonstances mais il était bien trop occupé à se bouffer.Bref. Je parle trop, aussi. Désolé, j'ai foutu en l'air ton invitation... Si tu veux rajouter une carte blanche à ton deck, je ne suis pas contre...
conclut-il finalement, recommençant à respirer normalement.
- InvitéInvité
Elle tourne la tête, pour le regarder, alors qu’il s’empêtre d’explications. Le débit est trop rapide, mais malgré ça, Moon essaie de se souvenir de tout. Au dépit de tout ce qu’il semble penser de lui, elle ne trouve pas ça repoussant.
Les yeux de Ryuji refusent de rencontrer ceux de Moon, qui cherche pourtant son regard. Alors, lorsqu’il a terminé son monologue :
Tu penses trop.
Dans un petit sourire. En quelques pas, elle se positionne face au professeur de design. Il ne pourra pas éviter son regard longtemps. Elle pose une main sur sa joue, puis glisse jusqu’à une mèche de cheveux tombée devant ses yeux. Du bout des doigts, elle la coiffe derrière l’oreille de Ryuji.
Je m’en fiche pas mal que tu aies dessiné des corps nus ou que tu fumes. Pour les étudiantes, on en reparlera.
Un petit haussement de sourcil, pour appuyer son point. Après avoir passé quelques heures avec Ryuji, c’est assez simple de compter sur de la maladresse plus que sur de la méchanceté. Et puis ça raye une des questions qu’elle comptait lui poser : à priori, ça pourrait correspondre à la description de Nissa.
Laisse juste du temps au temps.
Sur ce, elle pose sa deuxième main sur la joue. Et après un petit regard autour d’eux, s’assurant qu’aucune famille ne les ait rejoint, elle tire le visage de Ryuji vers le sien pour l’embrasser sur la commissure des lèvres.
- InvitéInvité
Décidément, elle était pleine de surprise. Il se laissa faire, bien évidemment qu'il allait se laisser faire. On ne fuit pas devant ce genre d'acte. Il espérait juste que la sensation de chaleur dans ses oreilles n'était qu'une sensation et que son oreille ne l'ait pas brûlée au moment où elle repositionna l'une de ses mèches derrière elle. Il lui rendit le baiser tant qu'il le pouvait, glissant sa main dans son dos en douceur. C'était plutôt agréable ce genre de moment, avec juste quelques méduses comme témoins. Enfin, jusqu'à-ce que d'autres visiteurs se rendent compte de l'existence de cette partie de l'aquarium.
Il la laissa repartir, reprendre une position plus "convenable" pour les jeunes yeux des visiteurs, qui étaient venu voir la vie sous-marine et pas la manifestation d'hormones chez des sujets humains de trente ans, en milieu aquatique certes. Il ferma ensuite les yeux et se caressa le front et les tempes avec une main, glissant l'autre le long du bras de Moon, jusqu'à la sienne. Il la regarda du coin de l'oeil et fit la moue, les sourcils froncés.J'ai mal à la tête.
Puis il eut comme un sursaut et commença à chercher comme un furieux dans les poches avant de son jean, puis celles à l'arrière, pour finalement en sortir un boitier noir en plastique rigide assez commun. Il l'ouvrit et échangea la paire de lunettes de soleil qu'il avait accrochées sur le col de son t-shirt comme tout bon touriste contre une paire de lunettes de vue. Ces lunettes étaient aussi communes que le boîtier les protégeant. Il n'avait pas à proprement parler de problèmes de vue mais la basse luminosité ambiante couplée aux éclairages de aquariums et surtout sa prise de tête lui avaient filé la migraine ; l'une des solutions était cette paire de lunettes. Il posa son accessoire sur son nez, reprenant soin de rattacher quelques-uns de ses cheveux avec l'un des élastiques qui traînent toujours autour de son poignet.Ca va mieux !
s'exclama-t-il, soulagé. J'ai pas trop l'air sérieux avec mes lunettes ?
Il ria de bon coeur avant de reprendre la main de Moon dans la sienne. Ils n'avaient pas encore fini leur visite de l'aquarium après tout et même si sa migraine venait probablement de sa faim, il voulait qu'elle ait au moins fait le tour des espèces, pris des photos, dessiné, ... bref, profité de ses tickets ! De bon coeur, il l'extirpa de la cache aux méduses en direction d'une aile consacrée aux tortues marines. Elle donnait un peu sur l'extérieur, ou en tout cas l'espace était plus ouvert, un peu plus animé aussi. Les bruits d'eau étaient couverts par l'animation des visiteurs mais il leur trouva un coin avec un banc, donnant directement sur un aquarium dans lequel on voyait plusieurs espèces de tortues évoluer avec des poissons et certains crustacés. Il l'invita à s'assoir avec lui.On échange ?
, proposa-t-il en tendant son appareil photo et en pointant le carnet dans le sac. Quitte à prendre des photos pour t'en faire des souvenirs, je préfère autant que tu le fasses avec ça, même s'il est un peu vieux, il fait le taf !
- InvitéInvité
Le comble, pour une femme en recherche désespérée d’epoux. C’est qu’elle ne voit pas Ryuji comme l’une de ses cibles potentielles. Disons qu’il n’est pas passé par les circuits traditionnels. Elle ne parlera pas de lui, à ses copines, il faut mieux éviter. Soit elles s’emballeraient et risqueraient de dégoûter Moon, soit elles auraient à coeur de juger leur rencontre.
Ryuji a mal à la tête. S’il ne s’était pas mis à gesticuler dans tous les sens, elle lui aurait bien proposé d’aller boire un verre, de s’asseoir, de prendre un peu de temps en dehors de ces aquariums - après tout, les places étaient davantage pour son étudiante que pour elle -, mais les lunettes sur le nez, il promet aller mieux.
Un léger rire, sincère, caché par la paume d’une main. Un peu, si. Ce n’est pas que les lunettes lui vont mal, simplement qu’elle ne s’était pas préparée à le voir en porter. La monture, simple, durcit un peu le visage du professeur. Mais ça ne te va pas si mal.
Moon serre doucement la main de Ryuji, alors qu’elle le suit jusqu’à la prochaine salle. Elle espère qu’il a compris, maintenant, qu’elle s’est laissée éprendre pour lui. Pas question de l’entendre de nouveau se dévaloriser ainsi. Le Ryuji assuré est bien plus sexy.
Quand il lui tend l’appareil : Avec plaisir.
La professeur de cinéma n’a aucune intention de reprendre ce satané carnet à dessin. Et encerclée par la foule, elle aurait trop honte de croquer. Alors, sans se faire prier, elle ouvre son sac, en sort cahier et crayons, les pose à côté de Ryuji, et attrape l’appareil photo.
A tout à l’heure. Clin d'œil.
Du petit banc, la vue n’est pas superbe. Les familles gâchent les points de vue, et l’appareil n’a pas un zoom suffisant pour se permettre de le pousser à fond. Et puis, après tout, ça ne fera pas de mal à Moon de s’activer un peu. Elle laisse son sac aux pieds de Ryuji, et s’avance vers l’aquarium. Elle prend plusieurs photographies, et ne lésine pas sur les angles de prise de vue. Sérieuse, elle ajuste balance des blancs, ISO, et diaph, avant de penser à ses cadres. Elle se tord, s’accroupit, se met sur les pointes, pour capturer plusieurs souvenirs des tortues marines. Elle manque de bousculer un enfant, mais la leçon est apprise, et se recule juste avant l’accident.
Alors, estimant avoir assez de photographies de l’animal, elle rejoint discrètement Ryuji. Sans demander l’autorisation - après tout, l’avait-il fait, lui ? - elle pointe le DSLR sur le visage de son partenaire au travail.
Click
Ca va vraiment mieux, la tête ?
- InvitéInvité
"Allez Ryuji, comme à l'entraînement" se dit-il à lui même en récupérant le carnet de Moon. Une fois partie, il observa en premier lieu le dessin de requin qu'elle avait fait précédemment. Franchement, elle était trop dure avec elle-même, il n'était pas si mal. Si elle s'entraînait et ne lâchait pas, elle pourrait vraiment s'améliorer, il en était sûr. Enfin bon. C'était à lui de dessiner cette fois. Comme il l'avait confié plus tôt, cela faisait des mois qu'il n'avait plus tenu de papier ni de crayon pour autre chose que les cours.
Après un long soupir, les yeux fermés, tentant de faire abstraction du bruit qui lui tapait sur le système, il se lança enfin. Il avait pris pour cible un bord d'aquarium devant lui, au fond de la salle, duquel sortaient plusieurs feuilles d'une plante dont il ignorait le nom. Autour d'elle, des petits poissons nageaient en cercle, en tentant d'éviter une tortue qui passait de temps en temps par là. Ses traits de crayon étaient hésitants au début mais vifs. Il se rappela assez vite des conseils de son mentor, d'abord isoler les formes dans sa tête, les retranscrire ensuite et enfin seulement ajouter le détail, la profondeur et les valeurs. Il s'exécuta quasi automatiquement, sans baisser les yeux ou presque, tu vrai dessin d'observation. Les poissons et la tortue bougeaient mais il avait réussi à capturer leur forme, cela suffira pour cette fois.
De temps en temps il tournait la tête à la recherche de Moon, qui avait l'air de s'éclater avec son vieil appareil. Elle se contentait vraiment de peu, ce qui est une grande qualité ! Elle voyageait un peu partout, se tordant parfois pour avoir le bon angle, s'agenouillant, se mettant sur la pointe des pieds. La voir s'affairer comme ça le fit sourire, il l'imaginait faire pareil le matin en choisissant une tenue ou quelque chose dans le genre, avec la même mine concentrée, le regard vif. Il revint à son bout de carnet et à sa tortue, qu'il tenta de reproduire le plus fidèlement possible, ses errances sélénites ayant duré suffisamment de temps pour laisser le champ libre à l'animal.
Il fut interrompu par une Moon sauvage, apparaissant de derrière un groupe de personnes, appareil à la main, chargé comme une arme à feu. Elle le pointa sur un Ryuji concentré, sourcils froncés, sur sa feuille. Il était presque certain de se mordre la lèvre pile à ce moment là en plus... Un click très reconnaissable plus tard, le voilà immortalisé sur la carte SD de son propre appareil photo. Il releva la tête, hébété, et regarda directement Moon en faisant la moue.Non mais ça va ?!
, dit-il faussement vexé. Je t'avais dit de photographier des souvenirs, non ?
Son ton était moqueur. Il lui tira même la langue du coin des lèvres avant de sourire et de rire silencieusement. Sa migraine allait de mal en pis, le brouhaha alentours mixé à la concentration n'avaient pas fait bon ménage. Peut-être était-il en manque de sucre ou de caféine, il avait sauté son café du midi pour ne pas trop arriver en retard, c'est que sa Moon l'attendait impatiemment... d'ailleurs il n'eut pas le temps de lui en parler qu'elle posa la question la première.Hmmm... Officiellement ?
grogna-t-il en grimaçant. Bof. Je mangerais bien un bout, pour rien te cacher. Je t'invite ?
Il se releva, évita l'attaque surprise d'un vertige et une fois ses appuis sécurisés, se dirigea directement vers Moon, réduisant la distance à quelques centimètres, mais pas trop peu non plus. Juste assez pour poser son index sur son nez comme un batteur poserait une baguette sur une symbale.C'est à ton tour de choisir, cette fois
chuchota-t-il en souriant.
- InvitéInvité
L’ambiance n’est effectivement pas des plus reposantes. Tant pis pour les poissons, c’est à priori déjà la fin de la visite. Moon les quittera néanmoins sans regret. Si l’aquarium est touchant par sa beauté, il est également bondé de monde. Quelle idée de se promener un samedi, en plein été, alors que la fraîcheur des climatiseurs est bien plus attrayante que la chaleur des rues.
Si tu invites, alors.
Mieux vaut un Ryuji repu et sur ses pieds, qu’affamé et malade. En l’invitant, il remet la balle au centre : 2 partout. Il ne semble vraiment pas bien aller, son pauvre ami, et Moon ne prend pas vraiment le temps de réfléchir au meilleur restaurant du coin. Après tout, la bouffe, ce n’est pas vraiment son rayon. Si elle ne déteste pas un bon plat, elle mange davantage pour se nourrir que par plaisir. Piètre cuisinière, ses assiettes manquent souvent de goût.
Mais elle a de la chance. D’une part, l’aquarium se situe dans le même quartier que leur immeuble, alors elle sait quels établissements éviter. Ensuite, elle a eu le temps, en attendant Ryuji, de détailler les lieux. Elle a repéré un petit restaurant aux voiles rouges, apparemment italien. La terrasse était remplie, mais il semblait y avoir beaucoup de place en salle. Et si la chaleur a coupé l’appétit de Moon, son partenaire serait certainement ravi de pouvoir manger copieux.
En slalomant entre les enfants, ils se dirigent d’un pas lent mais décidé vers la sortie. Elle salue les agents d’accueil en sortant du lieu, poliment, et est soudainement frappée par la lumière du soleil et par une bourrasque de chaleur. Oui, elle n’a définitivement pas le temps de réfléchir à mieux, elle veut retrouver la fraîcheur d’un climatiseur tout de suite.
Là, ça t’irait ?
Elle pointe du doigt le fameux restaurant italien. Certainement trop cher pour la qualité, le commerce semble profiter de la proximité avec l’aquarium. Mais peu importe, Moon veut se réfugier le plus vite possible dans les lieux.
- InvitéInvité
Bien sûr que j'invite. Ce serait manquer à tous mes devoirs.
, dit-il en tentant un clin d'oeil, une mauvais idée en cas de migraine.
Ryuji était touché par la hâte de la coréenne, qui slalomait entre les visiteurs, son compagnon sur ses talons, presque balloté comme un sac porté à bout de bras. La scène était drôle à voir, on aurait pu supposer qu'ils s'enfuyaient comme des voleurs après avoir commis quelque méfait. (Mal?)heureusement, non, pas de méfait à l'horizon, juste un couple décidé à sortir de ce traquenard, dont une femme visiblement soucieuse de l'état de santé de son bon ami, pâle comme un linge et subissant sa propre existence. Les migraines et Ryuji c'était une belle histoire de relation abusive depuis sa plus tendre enfance, une affaire de famille, même. Mais sa soeur était encore plus touchée que lui. Pour une fois, eh.
Une fois dehors la vague de chaleur frappa les deux trentenaires en plein face, manquant de terrasser le roux sur le coup. Un KO technique en perfect no hit pour le soleil, foutu adversaire imbattable. La moindre guinguette, le moindre petit stand, suffirait à lui permettre de passer le cap, pourvu qu'elle propose un tant soit peu de clim, par pitié. Il avait hâte que la grisaille ramène sa fraise et chasse ce ciel trop bleu et pas assez couvert à son goût. En plus c'est la saison des parapluies bientôt, le prétexte idéal au moindre petit rapprochement... Son esprit malade et déjà à moitié dans l'au-delà sourit à cette idée lorsque Moon proposa le premier restaurant, un Italien, à proximité de l'aquarium. Il accepta sans même réfléchir, peu importe !
L'intérieur était quasi vide, les gens préférant profiter de la terrasse. Les fous, à l'intérieur on était mieux mis et la climatisation fonctionnait aux petits oignons. Déjà, Ryuji se sentit mieux et put puiser dans ses forces pour saisir la carte et formuler sa commande au premier serveur passant par là. Il aurait aimé parler italien pour se la péter comme au resto de la dernière fois mais d'une il ne parlait pas un traitre mot d'italien et de deux, il devait vraiment avoir l'air entre la vie et la mort et bien ridicule. Une petite nature mais que voulez-vous, les migraines quand ça frappe, ça frappe plutôt fort... Il baragouina qu'il voulait avant tout du soda bien frais et deux bouteilles d'eau elles aussi fraiches, une pour chacun d'entres eux, avant d'enchainer sur une simple part de pizza, juste assez pour se caler.
Les boissons arrivèrent assez vite et il se jeta sur le soda comme un drogué n'ayant pas eu sa dose. Son cocktail hypersucré se déversa dans son organisme, dilatant ses pupilles. Le sucre et la caféine firent assez vite leur effet, dieu merci pour lui. Il reprit des couleurs et esquissa un sourire gêné, grimaçant tout de même à moitié avec l'oeil droit entr'ouvert.C'est marrant, t'es bien moins mignonne avec un seul oeil. J'ai pas intérêt à être borgne.
, plaisanta-t-il en tendant sa main pour la remercier. Désolé, ça m'a pris de court. Tu as eu le temps de voir ce que tu voulais au moins ?
Il était inquiet de savoir s'il avait "gâché" d'une manière ou d'une autre ses plans de visites sous-marines, bien qu'à en croire les photos prises, elle en avait plutôt pas mal profité à sa façon. Au pire ils y retourneront, il l'invitera cette fois-là, et ils choisiront un jour moins peuplé... Puis surtout Ryuji prendra des munitions pour tenir le choc, ou juste déjeunera le matin, par exemple. Il soupira de soulagement en sentant le vent frais dans ses cheveux. Manquait plus qu'une glace et il était refait. Ou un bain. Avec un verre de whisky on the rocks et une cigarette, peut-être, pour vraiment être tranquille et détendu.
Il finit par ouvrir les deux yeux plus ou moins convenablement, alors que la commande était arrivée assez rapidement, les joies de la restauration plus ou moins rapide à proximité de lieux touristiques ! Il sourit à Moon et engloutit sa pizza sans attendre d'y être invité, il était en mode survie après tout. Une fois sustenté il essuya les potentielles tâches de sauce et de garniture sur son visage ou ses mains. Mort de faim mais pas mal élevé pour autant ! Pour la trentième ou quarantième fois de la journée il sourit à Moon.Je suis sauvé ! Ca va mieux... Ca va toi ? Tu veux... qu'on fasse autre chose après ça ou on rentre ?
dit-il le plus naturellement du monde, oubliant l'espace d'un instant le côté gênant du "on rentre" qu'il avait demandé.
- InvitéInvité
Ne t’inquiète pas, je n’avais pas pris les places pour moi, donc j’ai vu le nécessaire.
Tant pis pour les rêves du professeur de design : sa place en trop l’était vraiment. Pour un premier rendez-vous, elle ne se serait pas ruée sur l’aquarium. Il y a trop de monde pour créer une quelconque intimité. Elle aurait certainement choisi le musée, pour profiter du silence du lieux, et de ses grandes pièces. Le secret des tableaux est bien plus fascinant à décrypter que la nage des poissons, aussi beaux soient-ils.
Les plats sont servis. Comme elle l’attendait, la salade est pauvre. Elle aurait préféré que Ryuji en ait pour son argent, mais au moins, ici, il fait frais. Et puis, lui ne semble pas se plaindre de la qualité du menu, engloutissant la pizza comme s’il n’avait pas mangé depuis des lustres. Elle aura vu plus charmant.
A sa question, elle hoche doucement la tête :
Ce n’est pas moi qui avait mal à la tête. Un léger sourire, elle n’avait même pas vraiment faim, la chaleur coupant toute envie. Mais je ne vais pas rentrer tout de suite.
Avec la température et son climatiseur cassé, ce serait la mort par cuisson assurée. Mais donner cette raison laisserait une ouverture à Ryuji pour l’inviter chez lui. Même si le rendez-vous était réussi, Moon n’est pas encore prête à voir l’intérieur de son voisin. Il ne faudrait pas que ça casse les fantasmes qu’elle se fait de lui. Dans un petit sourire, elle s’excuse quelques instants :
Je vais aux toilettes, je reviens tout de suite.
Sur ce, elle se lève, attrape son sac et se dirige vers les toilettes, laissant à Ryuji le temps et l’espace de régler l’addition. Devant le miroir, elle vérifie que son maquillage n’ait pas coulé. Malgré le soleil, elle s’est encore tartinée de fond de teint. Ce n’est pas demain que Ryuji la verra sans son masque. Elle sort sa trousse à maquillage, pour faire quelques retouches : certaines cicatrices colorées commencent à percer la couverture. Elle en profite pour reposer une couche d’encre à lèvres roses, et remonte. Elle rejoint Ryuji, sans se rasseoir.
Je vais acheter quelques livres à la librairie. Tu veux m’accompagner ?
Ce n’est pas parce qu’elle n’est pas prête à rentrer chez lui qu’elle veut clore ce chapitre.
- InvitéInvité
Et elle partit avec son sac jusqu'aux toilettes. Une activité somme toute normale, naturelle, me direz-vous ! Après tout, qui n'irait pas aux toilettes... Sauf qu'évidemment, dans l'esprit de Ryuji Yamashiro, où chaque détail compte, cela ne parut pas si anodin. Il régla la note en mode automatique, bien trop cher pour ce que c'était, "Merci le placement.. profiteurs" se dit-il en vérifiant le montant de son repas pas si bon que ça.
Une fois revenu à table, il s'assit et la gamberge débuta. Elle était partie aux toilettes, cela faisait déjà un petit moment... Elle avait pris son sac aussi. Peut-être qu'elle ne lui faisait pas confiance ! Ou bien elle s'était éclipsée pendant qu'il avait le dos tourné. S'il s'avérait que ce fut le cas, il n'en survivrait pas. Ou tout du moins il rentrerait penaud chez lui pour s'isoler pendant des heures devant des comédies romantiques, armé de son pot de glace préféré... son activité fétiche lorsqu'il avait besoin d'un peu d'endorphines.
Heureusement pour lui et le pot de glace qui échappa à un sacrifice sur l'autel de la tristesse pour cette fois, elle finit par revenir. Il fut soulagé, c'était simplement un raccord maquillage. Il n'était pas assez observateur pour remarquer les failles mais suffisamment pour voir les raccords en cours de journées. De plus, il avait assez trainé avec sa soeur pour reconnaître les signes. Il se dit qu'elle n'avait pas grand chose à rectifier ou bien qu'elle travaillait efficacement, lui qui était plutôt habitué à attendre des heures que la salle de bain soit libre ou avant de partir manger dehors. Infernal.Va pour la librairie !
annonça-t-il en se levant, en bien meilleure forme qu'à l'arrivée. J'espère trouver du matériel et peut-être un ou deux romans à lire.
Ce n'était pas un grand grand lecteur mais il était quand même amateur de bonnes fictions. De biographies aussi, celles sur les grands inventeurs ou d'autres personnages historiques importants. Il cherchait avant tout à découvrir quelque chose à apprendre, pour s'y lancer furieusement plusieurs journées voire soirées d'affilée avant de lâcher une fois sa soif de connaissance satisfaite. La durée était variable en fonction du sujet, si ça concernait quelque chose qui l'intéressait déjà de base, cela pouvait prendre des jours et même des semaines.
Il ouvrit la marche et lui proposa de la suivre, indiquant une librairie qu'il avait repérée dans les environs. Elle devait forcément l'avoir vue elle aussi, après tout ils n'étaient pas si loin de leur quartier d'habitation et en quatre mois, elle était susceptible d'avoir déjà fait son repérage elle aussi. La librairie en elle-même était calme, loin des grandes enseignes que l'on peut trouver dans les centres commerciaux. Il eut l'intuition que c'était ce genre de lieu qui intéresserait plutôt Moon, mais il pouvait encore se tromper. Après tout, ils apprenaient à se connaître, la surprise était encore au menu !Ca t'ira ici tu crois ? Ou bien tu préfères aller dans un magasin plus grand ?
- InvitéInvité
C’est très bien, allons-y.
Une petite cloche sonne à l’entrée du duo. Un petit frisson parcourt le corps de Moon, du bas de son dos, au haut de sa tête. Le bruit, aigu, est réconfortant, et la brise du climatiseur n’est pas de refus. Elle balaie le magasin du regard. Ce n’est pas la première fois qu’elle achète des livres ici, mais n’est pas finalement arrêtée sur le choix.
Depuis quelques mois, elle n’a pas lu de roman. Trop sérieuse dans ses lectures, elle n’ose pas s’abandonner à la fiction. Des essais, elle en a des tonnes dans sa bibliothèque. Cinéma, philosophie, et même architecture. Mais depuis le début de l’été - peut-être à cause de leur romance naissante - elle a envie de lire quelque chose d’un peu plus exaltant que des théories scientifiques.
Et si naturellement, elle se serait dirigée vers le petit rayon des essais artistiques, elle prend aujourd’hui une autre direction.
Je vais vers les romans. Si tu veux voir autre chose, on peut se séparer, et on se retrouve plus tard.
Après tout, elle ne connaît rien des goûts du bonhomme, et ne voudrait pas l’empêcher de se diriger vers ce qui lui plaît. Il a parlé de roman, un peu plus tôt, mais il n’a pas à garder la face devant elle. Elle aussi, il lui arrive aussi de lire quelques BDs.
Naturellement, elle marche vers les nouveautés, les détaille du bout des doigts. Mais rien ne la frappe. Si elle reconnaît quelques noms d’auteur, aucun n’a une plume suffisante pour la consoler avec le roman. Elle avance, jette un coup d'œil vers les livres étrangers, mais se tourne quasi-immédiatement. Tant qu’à lire de la fiction, ne pas se jeter vers une traduction. Et finalement, dans les rayons les plus classiques, Moon pose un doigt sur un livre. Le Musée du silence de Yoko Ogawa. Elle avait aimé Cristallisation secrète qu’une amie lui avait prêtée, mais n’avait pas pris le temps d’en découvrir davantage. Elle tire le livre, l’attrape, et ne revient pas en arrière.
Une fois qu’elle a fait un choix, Moon ne le questionne plus.
Plongée dans les livres, elle en a presque oublié son compagnon, qu’elle a complètement perdu de vue. Le roman fermement tenu, elle se tourne pour retrouver Ryuji.
- InvitéInvité
Visiblement, le choix de cette petite librairie était le bon. Pas de quoi sauter au plafond, ce n'était pas non plus le genre de réaction qu'il attendait d'elle, mais elle avait l'air suffisamment enthousiaste pour y entrer sans broncher. La climatisation les accueillit par son souffle salvateur, Ryuji frissonna et il était sûr que Moon également. S'il y avait probablement un point commun indéniable entre ces deux-là ce samedi d'août, c'était leur fuite de la chaleur écrasante de Kobe. La librairie faisait office de havre de paix, de sérénité et de fraicheur. Parfait.
Cela faisait longtemps qu'il n'avait plus passé la porte de l'endroit, le gérant avait eu le temps de revoir l'agencement de sa boutique, tant et si bien que Ryuji ne reconnaissait plus rien. Moon, elle, sembla moins perturbée ou avait plus l'habitude que lui des rayons des librairies car elle s'était automatiquement dirigée au rayon romans. Grand bien lui fasse, ils se retrouveront à la fin de leurs emplettes. La boutique n'était pas très grande mais elle était bien fournie, on pouvait y trouver ce qu'on voulait si on prenait la peine de chercher, en particulier dans les tas de bouquins disposés sur les tables au centre. Des fins de séries, des exemplaires un peu moins beaux, certains étant mal imprimés, ... bref, le coin des bonnes affaires, notamment pour les étudiants fauchés qui venaient souvent aux alentours.
Le gérant avait visiblement pris en compte les remarques de certains visiteurs trouvant l'assortiment mangas assez pauvre puisqu'il s'était finalement décidé à l'étoffer, proposant plusieurs références assez diverses, du shonen basique et mainstream à des références plus confidentielles, celles proposées à un public averti. Ryuji rougit en passant devant cette catégorie en particulier. Dans d'autres circonstances il aurait fouillé, tentant de voir si l'un des volumes dont il a signé le dessin s'était retrouvé par hasard dans le rayonnage, plusieurs années après publication. Peut-être serait-il reparti avec l'un d'entre eux, n'ayant pas pu obtenir tous les exemplaires d'éditeur, faute de budget, qui sait ?
Mais pour l'heure, et vu le regard de Moon qui balayait la librairie à se recherche – pas au point d'un Sauron surveillant les Hobbits en Mordor ou Moscou surveillant l'avancée des troupes du bloc de l'Ouest durant la guerre froide –, il décida de s'abstenir. Après tout, il n'en avait pas besoin. Par contre il embarqua trois volumes d'un shojo qui avait débuté cette année et dont il n'avait lu que quelques scans sur le net. C'était assez de geekeries pour la journée, probablement assez pour Moon. En général, ce genre de choses – surtout les comédies romantiques –, cela fait fuir les prétendantes.
Il se tourna à son tour et s'arrêta net, évitant de justesse l'accrochage puis l'accident. Visiblement ils eurent la même idée et s'étaient mis en direction de l'autre quasi en même temps. Il laissa échapper un soupir de soulagement et un petit rire.C'était juste ! Tu... as trouvé ce qu'il te fallait ?
, demanda-t-il en tentant de lire le titre du roman sélectionné.
Connaître les goûts de l'autre, c'était la base pour toute relation, qu'elle soit amicale ou bien plus. Il n'était certes pas un grand grand lecteur mais il savait s'intéresser à tout ce qui passait à portée de ses yeux. En général il essayait, se donnant entre trois et quatre chapitres avant de prendre une décision, préférant les histoires qui commencent vite et fort aux récits plus lents. Il fallait réussir à capter son attention de gosse en montée de sucre dans un magasin de bonbons un jour de déstockage.
l tenta une approche, essayant de délicatement prendre le livre de sa coréenne. La manoeuvre n'était pas innocente, il voulait le payer. Il avait l'impression que les calculs n'étaient pas bons entre eux, puis peut-être que ça pourrait lui refaire gagner des points, juste histoire de consolider sa place. En attendant sa réaction, deux doigts pinçant délicatement le livre, il la regarda dans les yeux, en silence.
- InvitéInvité
A la question de Ryuji, Moon tend le roman, sans une once d’hésitation. Elle n’est pas du genre à avoir honte de ses lectures. Yoko Ogawa est plutôt réputée. Je n’ai pas lu de roman depuis longtemps, j’espère que ce ne sera pas trop mal.
Moon n’a pas lu un mot du résumé. Le titre, aussi mystérieux que réconfortant, l’a convaincue. En rentrant, elle le glissera dans sa bibliothèque, avec les rares romans qu’elle a conservés. Peu matérialiste, elle revend ou prête les fictions qu’elle a terminées sans sourciller. Pas besoin de les relire. Moon considère qu’il y a tellement d’histoires à découvrir, qu’elle n’a pas le temps de se plonger deux fois dans la même.
Les doigts de Ryuji agrippent le livre. Elle comprend tout de suite où il veut en venir. Et sans poser plus de questions, elle lâche le roman. Elle a bien les moyens de se l’offrir, mais il faut savoir se laisser gâter. Ce n’est pas le plus luxueux des cadeaux, mais le geste fait plaisir à Moon. Elle laisse son partenaire se rendre jusqu’à la caisse, sans le suivre.
Ses yeux glissent le long des rayons. Finalement, elle n’a pas pris le temps de regarder le reste. Naturellement, elle rejoint l’allée des essais, mais il n’y a aucune nouveauté sur les sujets qui l’intéresse. Elle continue sa promenade, jusqu’aux mangas. Elle en lit peu. Très peu. Quelques fois, quand l’envie lui vient de se détendre par une romance, elle lit sur son téléphone. La plateforme coréenne Webtoon - dans sa langue maternelle - épanche ses envies de BD.
Elle détaille les différents rayons. Elle est bien perdue dans cet univers. La professeur s’arrête un instant devant le rayon Hentai. Pas perturbée pour un sou, elle en attrape un, et glisse un œil sur la couverture. La confession de Ryuji dans l’aquarium n’est pas tombée dans l’oreille d’une sourde. Alors, quand elle le voit se rapprocher, elle lui montre le livre.
Tu as dessiné pour un des mangas en rayons ?
Elle a beau avoir l’air coincée, Moon n’est pas prude pour un sou, elle garde un air à priori imperturbable. Elle a déjà feuilleté ce type d’ouvrages. Ce n’est pas sa machine à fantasmes, mais elle est curieuse de connaître un peu plus de cet honteux passé que Ryuji lui a révélé désespérément dès leur deuxième rendez-vous.
- InvitéInvité
Elle laissa finalement le livre partir, elle avait visiblement compris la manœuvre peu subtile de Ryuji. Il posa naturellement les yeux sur la couverte et la quatrième, parcourant le résumé avec un petit intérêt. L'histoire d'un musée, d'archivage d'objets mystérieusement liés entre eux. Un policier fantastique ? Il ne pouvait pas être étonné des goûts de Moon après tout, il ne les connaissait pas encore. Il nota de se rappeler de lui demander en prêt, si elle fait partie de ces gens qui prêtent leurs livres. Naturellement ces yeux tombèrent sur le nom de l'auteur. "Ogawa... Un rapport avec Yukio, le prof d'histoire ?" se demanda-t-il avec les sourcils froncés. Probablement pas, ce serait trop gros.
Il secoua les épaules après lui avoir souri sur sa remarque au sujet de quand remontait son dernier roman lu et se dirigea vers la caisse. Le gérant n'était visiblement pas là, c'était un jeune qui le remplaçait, peut-être son petit-fils. Il devait avoir la vingtaine à tout casser, il l'avait déjà vaguement croisé sur le campus donc il en déduit qu'il devait être étudiant. Ils se saluèrent poliment comme le veut la bienséance. Si le patron avait été là, ils auraient pu rigoler, voire partager un verre de sake en discutant dessin... et peut-être que le vieux lui aurait chuchoté quelque chose du genre "J'ai dégoté deux ou trois ouvrages pas piqués des hannetons, tu m'en diras des nouvelles Ryu-kun.". Mais bon, ce sera pour une prochaine fois ! Il repassera, avec Moon ou sans elle, pour vérifier l'état des stocks de mangas et peut-être glisser un autre roman pour elle dans sa besace.
Il partit en direction de la sortie, passant forcément devant le rayonnage consacré aux mangas et la fameuse catégorie qu'il avait bien fait exprès d'esquiver. Evidemment, comme si l'avoir lâché lors d'un moment de panique n'avait pas suffi, il fallut qu'elle en fasse une remarque et pose LA question qui fit sursauter Ryuji et le sortit de son petit nuance de petit ami modèle qui gâte sa copine. Avait-il posé son trait sur l'un des scénarii publiés et disponibles dans cette étagère ? Il devait y en avoir, il n'était pas spécialement un dessinateur dont on s'arrachait les illustrations mais il avait carburé à une époque, bossant sur presque tout tant que ça payait. Il déglutit. Inutile de tenter une esquive, elle bloquait la sortie.Pas celui-là en tout cas !
dit-il en ajustant ses lunettes pour mieux regarder le trait. Tu veux que j'en trouve ?
La réponse était trop naturelle, même pour lui. Au fond de son cerveau, une lumière rouge s'activa, l'alarme était lancée. "Trop honnête, trop naturel, trop frontal Ryu." se dit-il, s'imaginant se mettre des claques avec un éventail derrière le crâne. Il voulut se reprendre immédiatement mais foutu pour foutu, autant ne pas paraître trop ridicule et refaire la même que devant les méduses, une fois avait suffi pour la journée, la semaine, voire le mois ou l'année. C'est comme si une paire de testicules en béton avait poussé en quelques secondes. De quoi être fier.Alors. Il se peut qu'il y en ait ici. J'ai fait un peu de tout, mais pour ma défense on manquait souvent des bulles ou du scénario, j'ignore la moitié des histoires sur lesquelles j'ai bossé. Il y a sûrement de tout. Du gentillet, de la romance, du trash...
, énuméra-t-il, lancé sur le sujet. J'ai même dessiné du boys love, du yaoi, une belle expérience ! Mais j'aurais aimé ne faire que du wholesome, des trucs avec du scénario, des relations, de la romance saupoudrée de scènes plus spicy... et pas juste des poitrines et des fesses gratos...
"Quoique, c'était plaisant de dessiner des culs." se dit-il en réprimant un "huhu" qui l'aurait grillé. Il eut l'impression d'avoir bien attrapé la balle en vol et d'avoir effectué un ramassage dans les règles. Pas de home run pour Moon, pas de trébuchage pour Ryuji. La partie pouvait continuer. Au fond il bouillonnait, mourait d'envie de crier à cause de la gêne. Autant il assumait grandement, voire s'en vantait, de son passé avec ses congénères masculins, autant dans ce genre de cadre, c'était toujours gênant.
- InvitéInvité
Soudain, elle imagine l’appartement de Ryuji. Conserve-t-il ses ouvrages, comme des trophées, dans l’une de ses pièces ? Existe-t-il une bibliothèque spéciale manga pour adulte ? Ou les cache-t-il précieusement sous son lit, comme un adolescent ? Elle est curieuse de le découvrir, mais ne voudrait pas griller ses cartouches trop vite.
Elle n’est même pas sûre de vraiment vouloir approfondir cette relation.
Pas qu’il soit laid. Pas qu’il soit con. Pas qu’il soit désagréable non plus. Mais quand son cœur commence à battre un peu trop fort, Moon a peur. Un pas en arrière, juste pour se protéger. Finalement, ce n’est pas tant leur profession, ou leur proximité géographique qui l’effraie, que l’intention de s’engager dans une nouvelle relation. De devoir aimer de nouveau.
Sur la pointe des pieds, elle glisse le manga dans la fente qui lui est destinée, et se tourne vers Ryuji, l’air souriant.
Je veux bien que tu en trouves, oui.
Sincère, honnête, pas le moindre rouge sur les joues. Après tout, elle a déjà vu des corps nus. Lui aussi. Il n’y a pas raison d’être embrassés.
- InvitéInvité
Alors qu'il s'attendait à la voir satisfaite et, un peu naïvement certes, qu'elle lâche l'affaire, Ryuji s'étonna de sa demande. En même temps, c'était de sa faute, s'il n'en avait pas parlé avec force de détails, peut-être qu'elle n'aurait pas montré de l'intérêt pour son travail passé. En tout cas il ne parvenait pas à percevoir la moindre once de jugement dans la requête, en témoignait son air souriant et très naturel.
Quel idiot aussi. Ils avaient tous les deux trente ans. Au bout d'un moment, des corps nus ils en avaient forcément vus, si pas en vrai au moins en photo ou même dessinés. Aucune raison de s'inquiéter de montrer cette partie de lui, après tout elle l'avait signifié plus tôt dans l'aquarium : elle s'en fichait pas mal qu'il ait dessiné des corps nus. Il sourit et s'exécuta, lui tendant le petit sac contenant leurs achats.
Il balaya le rayon aussi vite que possible, à la recherche d'un titre qui lui disait quelque chose car rares étaient les jobs pour lesquels il avait toutes les informations, bien souvent cela se limitait à des indications du scénariste sur les poses ou l'âge représenté des personnages, de petits détails techniques aussi comme la forme du sourire, l'expression souhaitée... la taille des sexes turgescents et autres amplitudes de poitrines et de fessiers. Il aurait préféré lui montrer ses travaux d'école, ses dessins d'observation de corps nus plus artistiques que ces travaux de commande plus grivois, mais bon, il avait décidé de jouer franc jeu. Il jouera jusqu'au bout.
Il saisit finalement trois volumes dont il avait notamment signé la couverture, sous un pseudo différent à chaque fois. Etant plus récents, il voulait éviter que l'on ne l'associe avec ce passé là, ne voulant pas risquer son embauche à Kobe. L'histoire n'avait que peu d'importance au final, c'étaient les dessins qui intéressaient probablement sa compagne, qui l'attendait patiemment le sac dans les bras, alors il se retiendra d'en parler avec force de détails cette fois. Il les afficha devant elle comme un magicien montrerait des cartes pour un tour, en éventail.Alors dans l'ordre : les deux extrémités c'est ma couverture, celui du milieu j'ai collaboré sur les dessins dans les pages. Pas mon meilleur travail mais ça donne une idée de ce que je faisais il y a trois ou quatre ans.
, dit-il en prenant un faux air nonchalant, pour noyer son stress.
Ses mains ne tremblaient pas, il fit tout pour. Il avait chaud mais mit ça sur le compte de la chaleur et quant à ses frissons au long de l'échine, ils étaient causé par la climatisation qui soufflait dans son dos, rien de plus rien de moins. Il forma un tas avec les trois volumes une fois le coup d'oeil de Moon effectué et les garda en mains, prêts à être saisis, ouverts, retournés et observés sous tous les angles.J'ai des ébauches plus artistiques et fines à la maison. Je te montrerai si ça t'intéresse. Je préfère largement le dessin d'observation en direct mais je manque de pratique et de modèle, surtout.
Il la regarda dans les yeux. Ce n'était pas techniquement une invitation à se mettre à nu devant lui, son chevalet, son papier et ses crayons mais pourquoi pas, au final ? Tout jusqu'ici avait été plus qu'étonnant, de leur rencontre à la conclusion de leur premier rendez-vous ; même cette journée était plutôt improbable ou tout du moins surprenante, et en très positif de surcroit. Il sentit ses joues rosir et la finit par la fuir du regard, préférant se concentrer quelques secondes sur le coin du mur près du plafond, qui était plutôt beau pour un coin de pièce...
- InvitéInvité
Trois volumes.
Moon se penche, le sourire toujours aussi mâlin. Elle attrape l’un des trois, celui du milieu, pour l’ouvrir. Elle détaille les pages, à la recherche de ce que pourrait être une page de Ryuji. Mais elle le ferme finalement assez vite. Attrapée par son propre jeu, elle manquerait presque de rougir.
Je vois.
Glisse-t-elle, presque inaudible. A vrai dire, elle ne voit rien du tout. Malgré son goût pour l’art, elle est bien incapable de dire avec assurance quels corps ont été tracés par Ryuji dans les pages de l’ouvrage. Ses yeux balaient les couvertures avec un peu plus d’intérêt - elles sont, heureusement, un peu moins explicites -.
Elle fait tomber le manga à la remarque de Ryuji.
Prétextant une maladresse, elle se penche pour l’attraper. Mais cette fois, il a gagné, ses joues sont rougies. Elle le savait audacieux, mais de là à parler de modèle vivant. Elle ne lui laisse pas le plaisir de voir son embarras, et le visage caché par ses cheveux détachés, elle range le manga à sa place.
Et quel genre de modèle cherches-tu ?
Cachée dans ses cheveux, c’est plus simple de se montrer courageuse. Et même si le cœur de Moon tambourine, sa voix ne la trahit pas. Toujours aussi calme. Dans une toute autre situation, elle aurait pu glisser ces mots à l’oreille de Ryuji, le ton provocateur. Mais ils sont dans une librairie, et quelques clients se promènent dans l’allée. Leurs regards ne sont pas dénués de questions.
- InvitéInvité
Il ne remarqua pas sa gêne, trop occupé par la sienne et par l'observation de ce sublime coin de mur. Il s'était imaginé le décorer de toutes sortes d'accessoires pour le mettre en valeur, maroufler un morceau de toile peinte tel Valérie Damidot. Ce n'est qu'au moment où il entendit l'un des volumes tomber qu'il se finit par se ressaisir, sorti de sa rêverie par le bruit de papier tombé au sol.
Il recentra le regard sur Moon, affairée à ranger le volume à sa place, se cachant derrière ses cheveux. Troublée ? Quand elle sembla reprendre de la contenance pour lui demander quel genre de modèle il cherchait, il hésita. Il n'y avait pas réellement pensé à dire vrai, trop las de ne plus en trouver ces derniers temps et ce malgré plusieurs annonces aux descriptions les plus vastes possibles, afin de toucher plusieurs publics. A Tokyo il en avait pas mal et même chez lui à Okinawa, bien que les recroiser les jours suivants était plus gênant s'il avait eu le malheur de prospecter dans son voisinage. Pire qu'un lendemain de soirée torride, étrangement les femmes semblent préférer se donner que s'afficher, en tout cas c'était l'expérience qu'il en avait.
Il hésita. Livrer ce genre de choses lui sembla tout-à-coup très intime, étrangement. C'est comme décrire sa femme idéale, en un sens, il craignait qu'elle ne le prenne mal si son modèle idéal ne lui ressemble pas, ou qu'elle soit dégoûtée si c'était au contraire le cas.Une femme, je sais, c'est évident.
commença-t-il en se rapprochant un peu, la suite s'annonçant plus intime. Je cherche l'esthétisme de la pudeur, les émotions derrière les non-dits, je pense qu'une fois nus il ne reste plus grand chose derrière quoi nous cacher. On se livre totalement. Je veux capter la réalité des corps, les lignes tordues par les poses, jouer avec ombre et lumière.
Il hésita. Parce qu'en tant que dessinateur, il trouvait les traits et autres courbes de sa collègue intéressantes, il aimerait les transposer sur papier comme il ne put s'empêcher de les capturer "sur pellicule" plus tôt devant l'aquarium aux requins. Mais sa demande de se laisser du temps, d'apprendre à se connaître, cadenassait cette éventualité. La peur de la faire fuir, encore.
Il soupira, il s'était perdu dans sa tirade. Après une grande inspiration il reprit, les yeux fermés comme pour s'imaginer la modèle parfaite et tenter d'extraire le visage de Moon de son champ de vision. Ne pas se laisser biaiser par sa beauté, en somme.Des cheveux fins qui peuvent s'emmêler, des yeux vifs dans lesquels je pourrais me perdre en dessinant un portrait... Une poitrine discrète, je suis fatigué des seins énormes irréalistes, je veux du vrai. Des lèvres rondes et charnues que l'on croquerait volontiers, comme des cerises. Une femme désirable et désirée à laquelle rendre modestement hommage au crayon.
Il se figea et rouvrit subitement les yeux, écarquillés, plantés sur Moon. Il compta les points qu'il venait d'énumérer dans sa tête et mis à part la poitrine dont il n'avait aucune idée.. cette description collait très bien à Moon. Trop bien à Moon. Visiblement entre raison et passion, c'était la passion qui avait remporté le duel. Échec et mat pour sa tenue. Parler d'art et de dessin avec lui passera forcément pour quelque chose de gênant, de dangereux, d'inapproprié, désormais.
Il ferma les yeux et inspira profondément, comme un condamné à mort attendant sa sentence. Trop frontal, Ryuji.Pardon. Je... me suis laissé emporter. On peut oublier ça si tu préfères.
, murmura-t-il en rangeant les deux volumes restants à leur place.