[Osaka] A little party never killed nobody Ft. Tessa

On lui a interdit ? C’est possible ça ? Les parents ne cesseront jamais de m’étonner par leur côté abusif. Tessa est majeure et vaccinée que je sache.

« Parce que tu pensais qu’être majeure t’autoriserait à vivre la débauche auprès d’un cavalier de petite vertu ? Tu t’es fourvoyée Tessa Yorke. »

J’ai pris un ton d’homme de la haute hautain et dédaigneux. C’est tellement absurde qu’il vaut mieux en rire. Je referme mes doigts au-dessus des siens et nous nous plaçons pour le slow. Ni trop proche ni pas assez comme au début avec Emily, je pense ne pas la rendre mal à l’aise.

Les premières notes de piano débutent la danse. Tessa me prend au dépourvu en me demandant de lui traduire la chanson. Inutile de rappeler que mon système d’irrigation faciale fonctionne parfaitement.  

« Euh... C’est une chanson d’amour... »

En sachant ce qu’elle veut dire, on aurait tous les deux préféré danser dessus avec une autre personne. Le premier couplet est déjà passé alors je prends le second en route. Même si je ne fais que traduire c’est gênant et j’évite de regarder Tessa.

« Je te promets la clé des secrets de mon âme
Je te promets la vie de mes rires à mes larmes
Je te promets le feu à la place des armes
Plus jamais des adieux rien que des au revoir. »

Je traduis au fur et à mesure de nos pas et je me dis que je n’aurais jamais la force de chanter une chanson comme celle-là en face de... Hem. Ce qui m’effraierai le plus serait une réaction contraire à ce que je recherche. Qu’elle soit tellement gênée qu’elle me rejette. Je traduis le quatrième couplet mais, le dernier vers hum... Non je ne peux pas traduire, ça parle de rythme de hanches là, trop gênant ! Donc, cinquième couplet, elle n'y verra riiiien.

« Je te promets mes bras pour porter tes angoisses
Je te promets mes mains pour que tu les embrasses
Je te promets mes yeux si tu ne peux plus voir
J'te promets d'être heureux si tu n'as plus d'espoir. »

J’espère que ça ira tout à l’heure quand je devrais chanter, ça se rapproche...

Une très belle chanson oui, chanté par l’un des meilleurs. Je ne dirai pas que je suis fan du rock de Johnny Hallyday mais on ne peut pas nier qu’il sait toucher avec sa voix. La chanson a beau avoir été écrite par Jean-Jacques Goldman, il se l’est complètement approprié. La question de Tessa ne me fait pas beaucoup réfléchir, j’en connais déjà la réponse.

« Oui, ce n’est pas ce que j’écoute mais elle est très belle. Et non, j’aurais trop peur de la réaction en face. Et toi tu pourrais ? »

Je ris nerveusement rien qu’en y pensant. Il faut un sacré courage pour oser se dévoiler de cette manière. Juste écrire un poème est déjà quelque chose d’assez personnel. Est-ce qu’un jour je serai inspiré à écrire une chanson d’amour ? Qui sait, tout le monde y passe.

Les sixième et septième couplets me font sans mal penser à Tessa et Neil. Si j’ai bien compris tous les messages entre les lignes, on dirait que les deux... N’assument pas trop vouloir retenter quelque chose. Je dirais même que c’est Neil qui assume le moins, ce qui ne l’empêche pas de faire son jaloux, culoté tout de même !

La chanson arrive à sa fin et nos pas s’arrêtent. Je boirais bien un petit cocktail avant la prochaine et dernière danse avec Hana. On a un peu de temps.

« Tu veux boire quelque chose avant la dernière ? »

Oh, elle pourrait ? Je fixe Tessa avec étonnement mais hoche la tête quand elle précise qu’elle ne fera pas déclaration si longue pour autant. Cela me fait penser que... C’est sûrement elle qui a dû faire le pas avec Neil. Vu comme il affectionne l’engagement. On apprend des choses à force de traîner avec les mêmes personnes au club et aux vestiaires. Ce n’est pas lui qui irait pousser la chansonnette auprès d’une fille. Ils sont trop mystérieux, je veux savoir des trucs moi ! Malheureusement la situation ne s’y prête pas alors je vais devoir me faire une raison.

Je nous guide jusqu’à la table centrale et Tessa en profite pour revenir sur les paroles de la chanson. Oh non... Elle a remarqué. Elle ne pouvait pas moins s’en tenir aux sonorités ?! Gêné, je me racle la gorge et lui jette un coup d’œil rapide. Tout compte fait, j’aurais mieux fait de traduire directement, c’est deux fois plus gênant sans le contexte du slow ! Quel imbécile !

« Ah... Euh... T’as bien suivi ! C’était... »

Aucune échappatoire et j’ai beau chercher un peu, pas une phrase improvisée ne me vient. N’est pas auteur-compositeur qui veut ! Je lui murmure la traduction, les joues roses, sans oser la regarder.

« Des secondes insouciantes au rythme de tes hanches... Hem, tu veux quel cocktail ? »

C’en sera un ananas, citron, grenadine pour moi. Quelque chose avec du peps pour me remettre de ce moment gênant.

Répéter la phrase n’était, mais alors pas du tout, nécessaire ! Je suis certain que si je l’avais dis pendant le slow Tessa n’aurait pas ce sourire amusé. Vilaine va. Ou est-ce qu’il y a un serveur de libre ?

Elle en rajoute en plus. Mon regard cherche les deux hommes les plus susceptibles de me faire répéter mes paroles. Je fais la moue, peut-être que j’ai un sixième sens.

« Je... Pense que Neil était trop occupé à passer l’interrogatoire d’Emily. Et ton père... Quand même il doit bien la connaître cette chanson, un petit peu, non ? »

Bien sûr que si, j’en suis persuadé. Ou m’en persuade, c’est au choix. Rire nerveux. De toute façon je ne fais rien de mal à traduire. Tessa choisi de prendre le même cocktail que moi et je nous les commandes dès qu’un serveur se présente à nous. La boisson me désaltère et je sens mes joues reprendre leur température normale.

« D’ailleurs j’ai entendu ma mère appeler Neil «mon bichon» en raccompagnant Addison. Si t’avais vu sa tête, un mélange de «encore un surnom bizarre» et «je suis trop fier de moi» ! Attends-toi à le voir sur une page de magazine. Tu t’en remettras ? »

Allez, c’est mon tour un peu. Je souris tout en portant mon verre fraîchement arrivé à mes lèvres.

Hm hm, en est-elle bien certaine ? Mon expression ne cache pas mon scepticisme couplé à un peu de malice. Je la vois bien complètement absorbée par les photos oui, à l’abri des regards, à l’observer pendant plusieurs minutes en soupirant de façon niaise. L’image devient un peu trop nette dans mon esprit, mon rire menace de me trahir davantage.

« On verra, on verra ! C’est sûr qu’il n’aura plus la paix ! »

Pour l’heure, se moquer de son nouveau surnom suffit à nous divertir. Tessa a la même idée que moi.

« Oh moi aussi ! Je ne compte pas le lâcher avec ça. Il va nous détester. »

Ça n’en sera que plus drôle ! Je suis Tessa en buvant quelques gorgée de mon verre et je hoche la tête à ce qu’elle dit.

« Oui, c’est aussi l’occasion pour elle de voir d’éventuel mannequins apprêtés, leur posture et tout le reste. Le pire est que pas mal de jeunes le savent et comptent bien se faire remarquer. En général, soit elle propose de passer des castings, soit, mais c’est plus rare, elle recrute directement. A ta place je ne crierais pas victoire trop vite, la soirée n’est pas finie... »

Je hausse les sourcils, l’air de dire, ton tour arrive... Après avoir bien discuté, il est temps d’enfin prendre part à la dernière danse. Je quitte Tessa qui s’en va rejoindre Emily, Addison a enfin son frère pour elle toute seule et moi, c’est vers ma sœur que je me dirige. Son fiancé s’en va danser avec notre mère.

« Hoy Hana-nee, tu danses ? »
« Dis donc toi ! Je n’ai pas le droit à l’accueil de princesse dont j’ai entendu parler ?! »

Ne pas rire aux éclats m’est vraiment difficile mais je tiens bon, le poing contre mes lèvres. Parce qu’elle a déjà entendu parlé de moi en ce court laps de temps ? Les informations vont trop vite ici, je me rappelle comment j’ai renversé Emily tout à l’heure, oh non...

« Je plaisante, je plaisante. Si mademoiselle veut bien m’accorder cette danse. »
« C’est mieux, avec plaisir petit-frère. »

Je tends ma main qui reçoit la sienne, sur laquelle mes lèvres s’échouent deux secondes. C’est un slow qui clôturera les parties dansantes. Quoi de mieux que La vie en rose d’Edith Piaf pour cela ? Mes pas dirigent doucement la danse et ma sœur n’attend pas très longtemps pour me faire passer un interrogatoire.


« Alors, monsieur le gentlemen. Est-ce qu’il y a quelque chose que j’ignore par rapport à ta chère cavalière ? »
« Mais non, roh. On est amis c’est tout. Nos mères pensent juste qu’il y a matière à plus alors que non. »
« Bien, bien je te crois... Puisque j’attends toujours de rencontrer une certaine Riku... J’aurais pensé la voir ce soir. »

Je rougis d’un coup et fait la moue en pensant à elle.

« Je l’aurais bien invité, mais elle traverse quelque chose de compliqué en ce moment... »
« Oh... Je comprends... La pauvre, soit là pour elle. »

Sans répondre, je hoche la tête et nous continuons à danser et discuter. Ils ne parviennent toujours pas à se décider sur une date de mariage. Je soupçonne Hana d’en avoir un peu peur, je n’en mènerais pas large à sa place non plus. Sans penser à tous les invités qu’il y aura, des centaines de personnes. Nous discutons un peu de ma vie à Kobe, le campus, les amis que je me suis fait et puis la musique prend doucement fin.

C’est vrai, chacun veut tenter sa chance, mais c’est aussi la règle du jeu. Tant que tout le monde y gagne. Même Jade - à mon grand malheur - a déjà eu son petit moment de gloire. En mettant son caractère peste de côté, elle reste une jolie fille après tout.

Assez parlé des fanas de mode. Taquiner ma sœur est bien plus intéressant. Même si elle finit par bien vite me rendre la pareille. Hana me manque beaucoup, j’ai l’habitude de beaucoup discuter avec elle et le décalage horaire important limite nos échanges. On en profite donc autant que possible durant la danse jusqu’à que cette dernière prenne fin à son tour.

« Je n’ai pas eu droit à mon renversement non plus. Décidément petit-frère. »
« Hana-nee... Tu vas être renversée, ouvre tes oreilles. »
« Voyez-vous ça, surprend-moi. »

Elle pose un baiser sur ma joue et s’en va rejoindre son fiancée. Quelques secondes plus tard, c’est Tessa qui me rejoint et s’enquit de la santé des pieds de ma sœur.

« Bien sûr que non, tu veux ma mort ? »

Je n’ose même pas imaginer le regard noir qu’elle m’aurait réservé si j’avais osé.

« Alors, contente d’avoir survécu au marathon dansant ? »

De mon côté, ma boule au ventre fait son grand retour. C’est bientôt l’heure, dans une dizaine de minutes. Respire. Discuter avec Tessa m’aide à me détendre. Les minutes défilent et ma mère me fait un signe discret, non loin du piano.

« Tu m’excuses ? »

J’abandonne Tessa pour me rapprocher de ma mère, et de Neil. Elle passe sa main dans mes cheveux et nous laisse un peu tous les deux.

« Prêt ? »

Neil me fait un sourire confiant et hoche la tête pour acquiescer avant de répondre.

« Imagine les nus, si tant est que ça marche vraiment pour déstresser ! Mais plus sérieusement, concentre toi sur la musique et oublie le reste, ça va aller. Y'a aucune raison pour que ca se passe mal. »

Il finit avec un petit clin d’oeil avant de s’asseoir derrière le piano. Sa solution me fait rire même si je doute qu’elle m’aide.

« Ouais... T'as raison. Au pire je ferme les yeux. Merci en tout cas. »

Je lui souris à mon tour et m’empare du micro juste avant que ma mère ne prenne la parole. Bon, j’ai peur.

« Je vous demande votre attention. Afin de terminer la soirée en beauté, mon cher fils va nous interpréter deux titres, accompagné de Marshall-kun au piano, merci à lui. J’espère que vous apprécierez ce présent. Je vous laisse avec Je te le dis quand même de Patrick Bruel. »

Ma mère me fait un sourire rassurant, mon père également, sous les applaudissements de la salle. Je croise aussi le regard de Tessa avant que le silence ne se fasse. Tourné légèrement vers Neil, je souffle un coup avant de faire un signe de la tête. Il suffit que j’entende les premières notes pour que mes épaules se détendent.


« On aurait pu se dire
Tout ça
Ailleurs qu'au café
D'en bas
Que t'allais p't'être partir
Et p't'être même pas revenir
Mais en tout cas, ce qui est sûr
C'est qu'on pouvait en rire »

Neil a une façon douce et passionné de jouer, comme s’il caressait les touches. Je le vois parfois fermer les yeux. Ca me donne un peu le courage de croiser les regards de la salle au fil des vers.

« Alors on va s'quitter
Comme ça
Comme des cons devant l'café
D'en bas
Comme dans une série B
On est tous les deux mauvais
On s'est moqué tellement d'fois
Des gens qui faisaient ça »

Les prochains couplets sortent naturellement, je me sens bien et tout le stress s’est envolé. L’intensité augmente sur la seconde partie, ce qui me donne un peu des ailes sur la fin.

« Mais j'trouve pas d'refrain à notre histoire
Tous les mots qui m'viennent sont dérisoires
J'sais bien que j'l'ai trop dit
Mais j'te l'dis quand même
Je t'aime »

Ce moment où l’angoisse s’envole. Ce moment où plus rien d’autre ne compte que les émotions derrière les mots. Ce moment où les faux semblant n’ont plus leur place. C’est uniquement pour le vivre que j’aime chanter.

En l’espace de quelques secondes, plus aucun doute ne traverse mes pensées. Je me laisse porter par les notes de piano. C’est beau de savoir en jouer, je regrette de ne pas avoir la patience de l’apprendre. Si l’on voit les choses autrement, si tel avait été le cas, j’aurais joué à la place de Neil au lieu de partager le duo avec lui. C’est très bien comme ça finalement. Durant ces quelques minutes, je me sens plus proche de lui que je ne l’ai jamais été.

L’arrêt des notes fait éclater la petite bulle où je m’étais réfugié. Ou ce sont plutôt les applaudissements qui s’en chargent. J’échange un regard avec Neil qui sort aussi de son petit monde avant de balayer un peu la pièce du regard. Les invités ont l’air d’avoir apprécié. Ce qui me touche le plus est la fierté que j’arrive à lire dans les yeux de mon père, sachant que nous sommes en froid depuis mon départ. C’est dur mais je ne peux toujours pas accepter ses mots... Cette soirée n’est qu’une trêve.

« Merci beaucoup. La prochaine, je crois qu’on ne la présente plus. »

Étrangement à l’aise, je me tourne légèrement vers Neil pour voir s’il est prêt. Respire.


Cette fois la première note est la mienne.

« I keep on fallin'
In and out of love
With you »

Je ferme les yeux quand le piano m’accompagne.

« Sometimes I love ya
Sometimes u make me blue

Sometimes I feel good
At times I feel used
Lovin you darlin'
Makes me so confused

I keep on
Fallin'
In and out of love with you
I never loved someone
The way that I love you

Oh, oh , I never felt this way
How do you give me so much pleasure
And cause me so much pain
Just when I think
Ive taken more than would a fool
I start fallin' back in love with you »

Cette chanson m’a toujours touché, elle est à fois douce et puissante. L’histoire qu’elle raconte y est aussi pour beaucoup. C’est même l’une des premières sur laquelle je me suis entraînée, raison pour laquelle je l’ai choisi. Les notes s’intensifie pour le deuxième refrain.

« I keep on
Fallin'
In and out of love with you
I never loved someone
The way that I love you »

Ça, ce n’était pas du tout prévu ! Je ne me laisse pas déstabiliser par la surprise mais wow, je ne m’attendais pas à entendre la voix de Neil. Qui se marie bien à la mienne en plus. On s'échange des regards complices et je prends davantage confiance. Je vois sur son sourire qu'il a fait tomber le masque, c'est une toute autre personne. Jusqu’à la fin de la chanson, il m’accompagne sur les chœurs. Là, c’est magique !

La fin de la chanson ne signe pas pour autant de notre bulle. Je me rapproche de Neil pour lui faire une accolade sous les applaudissements. J’en profite pour le charrier en chuchotant à son oreille.

« Ben alors y'a pas que sous les douches que tu chantes ! »
« Je me suis fait prendre dans la chanson, mais c'était juste pour que tu te sente moins seul. »

Mais bien sûr ! C’est pour ça qu’il détourne le regard de gêne.

« Oh, mais c'est trop gentil de ta part, mon bichon ! »
« Fais gaffe, les bichons aussi ça mord Nolan-kun. Si t'étais pas si bien coiffé je t'ébourifferai les cheveux à défaut de te mordre ! »

J’éclate tout bonnement de rire et tente de le cacher en m’inclinant devant les invités. Neil me félicite pour sa performance et ça me fait d’autant plus plaisir. Mes parents et ma sœur ne tardent pas à faire pareil, Jade également. En fait je reçois des compliments dans tous les sens et pour une première fois en public, c’est un vrai soulagement ! Je remarque dans la foulée, Addison les joues toutes rouges mais n’ose pas m’approcher, elle est à croquer !

Ce qui m’intrigue, c’est que je ne vois Tessa nulle part. Je demande à Emily mais elle n’a aucune idée d’où elle a pu aller. Sourcils froncés, je sors mon téléphone de ma poche et vois son message. Une énigme ? Pourquoi elle m’écrit une énigme, c’est louche... Et j’aurai un gage si je ne trouve pas en plus ?! Voyons voir... Utilisé pour jouer aux jeux de société... Hmm... Pas à l’intérieur... Ah ! J’avais pensé au pion mais du coup c’est plutôt le dé et hors. C’était facile !

Je me faufile donc jusqu’à l’entrée de l’hôtel, sur le chemin je me demande si c’est parce que ça ne lui a pas plu et qu’elle ne savait pas comment réagir ? Si c’est ça, j’ai la poisse... Je retrouve ma cavalière, les yeux levés vers le ciel.

« Hey... Ça ne va pas ? J’ai été si mauvais que tu ne savais pas comment me le dire ? P’têt que j’aurais pas dû chanter, ça se trouve les autres aussi ont trouvé ça mauvais mais ne voulaient pas que je perde la face... »

Je suis en train d’imaginer qu’ils m’aient tous menti pour ne pas me faire honte et c’est un sentiment horrible. Ce n’est pas un domaine où je suis en confiance et on est entouré d’acteurs ici alors... Le sol est vachement intéressant à regarder. Le vent frais moins plaisant à subir.

« Tu vas prendre froid comme ça. »

Même si on est en juin, les nuits restent fraîches. Je glisse ma veste de mes épaules pour la mettre sur les siennes, en bon cavalier et ami.

Oh... Ouf ! Ça me rassure d’un coup parce que j’étais déjà entrain de me demander comment j’allais affronter le regard des autres en sachant la vérité. Je suis content qu’elle ait apprécié. Ce n’est pas la seule à avoir été surprise, en fait même Neil n’a pas du comprendre ce qui lui a pris.

« Merci, c’est vraiment gentil, même si je dois avoir quelques progrès à faire. Pour ce qui est de Neil, je crois que ses pensées ont traversé sa bouche ahah. Ce n’était pas prévu ! »

Et j’imagine bien qu’entendre son ex pas si ex que ça chanter, doit faire quelque chose.

« Je comprends. En fait ça tombe bien j’en vais besoin aussi. C’est la première fois que je chante devant un public, même mes parents. Le seul qui m’a déjà entendu c’est Malory, mon meilleur ami. »

J’enfourne mes mains dans les poches de mon pantalon et lève la tête.

« C’était vraiment sympa comme expérience, peut-être qu’un jour je chanterai mes chansons qui sait ! »

Etre encouragé par Tessa me permet d’un peu mieux me projeter sur cette possibilité. Je n’ai pas la prétention de faire quoi que ce soit de révolutionnaire mais tant que ça me plaît et que ça peut aussi faire du bien aux autres, c’est parfait !

« Avec plaisir ! »

Je sais que je pourrai compter sur elle pour un avis objectif et sans jugement. C’est aussi rassurant. Ce qui l’est moins c’est le soupire de Tessa. J’ai l’impression que quelque choque la turlupine. Et apparemment je ne me trompe pas. Sa question mérite réflexion... De quoi elle peut bien parler dans son cas ?

« Hmm... »

Je pense qu’on a déjà tous ressentit ça un jour.

« Eh bien, quand j’essaie d’imaginer ce que ça donnerait si je devenais un athlète pro, j’ai toujours une petite voix qui me dit que j’en suis pas capable. J’essaie de ne pas l’écouter. Et toi, c’est à quel sujet ? »

C’est plutôt étonnant venant de Tessa. Je l’imagine toujours comme réussissant toujours ce qu’elle veut grâce à son travail. Enfin, on a tous des périodes de doutes, mais de là à trouver certaines choses hors d’atteintes, c’est plus que ça. Je ne pensais pas qu’elle manquait autant de confiance en elle.

Je ne m’y connais pas en art mais déjà exposer ses toiles en galerie témoigne de son niveau, pour moi, c’est déjà une artiste. Et je n’ai aucun doute sur sa capacité à intégrer une université anglaise, d’ailleurs ça voudrait dire que je ne la verrait plus...

Pour le dernier point en revanche, ça ne dépend pas que d’elle, je ne peux pas me prononcer. Elle craint de ne pas se remettre avec Neil ? Pourtant il a l’air bien atteint par le virus de l’amour hein.

A peine le temps de soupirer qu’elle me propose de rentrer, rassurée de ne pas être la seule à se poser des questions. Si elle savait, c’est un problème universel de se triturer les méninges à longueurs de temps !

« Je suis sûr que tu feras une longue carrière, tu exposes déjà tes toiles, ce n’est pas donné à tout le monde. Et vu comme tu travailles dur, tu as toutes tes chances pour la fac. Je te rassure tu es très loin d’être la seule dans ce cas. »

Mon cœur rate un battement quand elle attrape ma main. Je crois que j’aurais beaucoup de mal à m’y faire.

« Ah... Oui, je commence à sentir le froid. Il va être temps de nous quitter en plus. »

On revient juste à temps pour écouter les dernières paroles de ma mère.

« Je tiens encore une fois à tous vous remercier pour votre présence. C’était un réel plaisir de vous recevoir et nous espérons que vous avez passé une excellente soirée. »

Elle continue en mettant en avant les cuisines de l’hôtel, leurs serveurs ainsi que la famille de Jade pour les desserts et son discours se solde par des applaudissements.

« J’ai passé une très bonne soirée pour ma part. Je suis content que tu ais été ma cavalière, au moins je ne me suis pas ennuyé ! »

Je lui présente mon bras, cavalier jusqu’au départ.

« Je te raccompagne à votre voiture ? »

Je trouve aussi qu’elle est passée vite. En même temps, quand on n’a pas à se farcir Jade comme cavalière, tout va plus vite. Je suis content que Tessa ait passé une bonne soirée et trouvé que je fais un bon cavalier voire un bon prince.

« Oui, ce serait tout de suite plus marrant ! »

Après le discours de ma mère, je me rapproche rapidement de Neil, sa mère et Addison pour les saluer avant leur départ. Je me baisse au niveau de cette dernière pour lui parler.

« Tu as passé une bonne soirée Addison-chan ? La chanson t’as plu ? »

Elle hoche la tête timidement, les joues toutes rouges, trop mignonne.

« Oui, c'était trop trop bien ! Diiis... Tu m'en chanteras une un jour Nolan-senpai ?»
« Oui, c’est promis, je chanterai ta préféré même ! »

Ce qui a l’air de lui faire très plaisir, j’ai intérêt à bien me préparer ! Addison me tend sa main comme une petite princesse et je l’embrasse doucement. Elle me surprend en me faisant aussi un bisou sur la joue. Haanw trop craquante ! Je lui fais un petit boop sur le nez et me relève pour serrer la main à Neil. Il m’attire vers lui pour me faire une accolade, que je lui rends en tapant dans son dos. Je ne m’y attendais pas, ça me fait vraiment plaisir d’en avoir vu un peu plus du vrai lui ce soir.

Je retrouve ensuite Tessa pour la raccompagner, sans oublier les bonnes manières. Sourire fier, je frisonne un peu au vent frais de l’extérieur.

« Il faut bien pour accompagner les princesses ! »

J’ai bien intérêt à considérer en particulier Addison comme telle ! Dehors, je peux aussi dire au revoir à Emily, avec qui j’ai aussi passé un bon moment.

« Nakamura-san, j'espère que tu as passé une bonne soirée, ça m'a fait plaisir de danser avec toi. »
« Merci Le Lidec-kun. Tu peux m'appeler Emily, après cette danse renversante. Le plaisir est partagé et la soirée était très agréable. »
« Ah ah, ça pour l’être. Content de l’entendre, tu peux m’appeler Nolan aussi. Rentre bien Emily. »

Je lui rend son sourire et me tourne vers Tessa qui monte à son tour dans la voiture, ma veste est encore sur ses épaules d’ailleurs. Mais c’est que j’ai affaire à une voleuse en plus !

« Confortable hein ? Je vous attends lundi chère cavalière ! »

Je regarde leur voiture s’en aller avant de retourner à l’intérieur. La salle se vide progressivement même si certains s’attardent encore. Temps pour moi de ranger le costume du prince, je suis épuisé et ma chambre m’attend.