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Gareth N. Kobayashi
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Gareth N. Kobayashi
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Mer 10 Avr 2024 - 1:21
Une brassée d’amour et une pincée d’humour
Vendredi 24 août - Dans la nuit :

Gareth aimerait s’appeler Morphée. Pouvoir entrer dans ses rêves et enfin savoir quoi chasser pour que ses nuits soient toujours paisibles. Ses pouvoirs étaient limités, là, de l’autre côté, celui des mortels, par les lois de la nature. Qu’à cela ne tienne, même David avait pu battre Goliath d’un simple caillou. Comme chaque fois que Yukio en avait inconsciemment besoin, ses doigts magiques se perdaient sur les contrées ténébreuses qui lui chatouillaient la main par leur douceur. Le haut de sa nuque, raide, derrière l’oreille, les lèvres sur son front. Puis ils continuaient leur périple à l’arrière de son crâne, tentaient de négocier avec ces viles créatures nocturnes, quelques massages en échange de pouvoir laisser son amant en paix.

Un bras fébrile l’étreignit par la taille et Gareth se laissa glisser sur le dos. Un poids rejoint rapidement le creux de son épaule et il continua sa croisade dans les tranchées brûlantes. Le souffle tremblotant contre son torse témoignait des longues batailles encore à livrer pour le libérer de ses geôliers. Malgré les appels de Morphée, il tint bon, jusqu’à ce que le calme reprenne sa place et que les démons d’outre-tombe abandonnent leurs desseins.

Samedi 25 août - Fin de matinée :

Gareth arrange le col de sa chemise bleue nuit devant le miroir de la salle de bain. Le châtain était plutôt stressé de rencontrer la sœur de Yukio. Ses souvenirs d’elle étaient extrêmement vague. Il avait dû l’apercevoir à la sortie de l’école, il y avait vingt ans de cela. Qu’allait-elle penser de leur couple ? De lui ? Peu importe lui dirait Yukio, sa sœur pourrait bien camper sous leur fenêtre, il lui verserait son café tous les matins à six heures tapantes, il avait appris à viser, avec tous les avions qu’il avait dû poser dans le gosier de son fils.

Ce dernier passait le reste des vacances auprès de sa mère, à son grand soulagement. Il aurait déjà bien assez à gérer sous sa caboche. Nul besoin en ce jour, d’avoir le joueur Chiaki sur le terrain. Capable de marquer un but contre son camp avec une question de son cru comme la dernière fois. «Papa, Gawa-chan c’est ton amoureux ?» Avait-il demandé avec tout le calme du monde, en les regardant tour à tour. «N-non, mais Gawa-chan n’aime pas resté tout seul, alors il reste avec nous, pour ne pas être triste». Ah ah... Pendant combien de temps pourront-ils encore lui mentir ? Aussi longtemps qu’il n’aura pas atteint l’âge de garder un secret.

C’était dur, de ne pas pouvoir révéler leurs sentiments librement. Dur, de ne pas pouvoir échanger des regards de plus de deux secondes dans la salle des professeurs sans attirer de soupçons. Gareth n’était pas même certain que cela servait encore de le cacher mais prudence était mère de sûreté. C’était pesant, un peu plus à chaque instant. De devoir attendre que plus aucun regard ne puisse être témoin de leur amour pour le laisser exploser.

Il arrivait qu’y penser lui cause d’insolents picotements aux yeux, un peu comme là tout de suite. Pourquoi maintenant ? Car cela le rendait heureux de pouvoir assumer librement son couple devant deux personnes qui comptaient pour chacun d’eux. Car vivre ainsi était plus douloureux qu'il ne l'aurait pensé. Mais Gareth aimerait ne pas pleurer au-dessus du bœuf qu’il préparait pour l’oyakodon, en attendant l’arrivée de leurs invitées. Encore moins lorsque Yukio n’était qu’à quelques centimètres de lui à s’affairer de son côté. Le châtain passa le dos de sa main sur ses yeux et renifla.

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Jeu 18 Avr 2024 - 0:00




Une brassée d'amour, une pincée d'humour
Samedi 25 août 2018


Musique d'ambiance

[Chez Gareth] Une brassée d’amour et une pincée d’humour Kahoru10


Parfois, je sais qu’il ne dort pas. Dans la nuit la plus profonde et obscure, lorsque les rues sont tues par la désaffection, et que mes yeux clos font face au mur seulement dansé des ombres de la Lune, il m’arrive de sentir sur ma nuque les palpations de son regard, et le souffle de ses respirations angoissées.  Dans le silence apathique de l’abime des sorgues déjà éteintes, je l’entends qui souffle à la brume léthargique de mes songes ses inquiétudes, ses craintes, ses impatiences et ses ambitions. J’écoute qui se répand, comme un murmure inconscient vibrant dans la grisaille assombrie qui nous sépare encore de l’aube. Je l’entends qui sans un bruit cherche le sommeil, sans pouvoir le trouver derrière le paravent de ses obsessions, et à mon tour, je me découvre éveillé.

Il est là qui, derrière moi, me présume aveuglé par la somnolence, et laisse s’évader, comme autant de couleurs nébuleuses, la matérialité de ses pensées, au point que je pourrais presque, si je m’en donnais la peine, les saisir au vol. En les voyant passer, je m’exècre de les contempler, et je me demande si je dois m’autoriser, fusse en le surprenant dans l’impudeur de ses méditations anxieuses, à les faire s’évanouir. Dans l’inconstance de mes positions, je pèse le pour et le contre, indécis et coupable, jusqu’à ne plus vraiment y tenir, et à tenter le moindre des compromis.

Sans paroles, ni regards, ni ostentations de ma conscience, feignant la plus paradoxale des hibernations, je me retourne, et sans un mot, appuie mon front contre la chaleur de son torse. Posé sur sa peau, dans un apparent assoupissement, je me blottis dans le creux de ses saillances, et m’y oublie, en espérant qu’il en résultera, même indirectement, une certaine forme de réconfort. Je ne sais s’il y a, dans cet acte souvent réitéré, une forme de duplicité. Au fond, je ne sais vraiment si j’ai la prétention de le rassurer, ou si je cherche juste à lui montrer, ostensiblement, que même attaché dans l’inconscience du plus insondable des sommeils, je le cherche lui, et sa peau, et sa fièvre, et son empyreume.

Parfois, et plus souvent même, c’est moi qui ne dors pas. Dans la nuit bleue, identiquement profonde et obscure, je constate avec une forme de dépit qu’il est, comme toujours, bien plus doué que moi. Sans chercher à feindre quoi que ce soit, il m’étreint, comme pour me rappeler calmement qu’il est là. Ses mains me frôlent, et déposent sur moi une attention prévenante, tandis qu’il laisse mon visage se perdre dans les failles de sa posture. Avec une tendresse habile et bienveillante, il me laisse le respirer, et ne cède au sommeil que lorsqu’il s’aperçoit que je ne lutte plus. Il glisse sur le dos, et je plonge malgré moi, comme soutenu par son corps, porté au-dessus du vide.

Avant de céder, sentant le tourbillon qui m’emporte, aspiré par les ténèbres, j’essaie de lui dire que je l’aime, et ne sachant pas bien si je suis déjà endormi, j’ignore si je prononce réellement les mots que je conçois, ou si je ne fais que les rêver.


***

Koharu était tout ce que Yukio n’était pas. Calme, intuitive, intellectuellement agile, concentrée sur l’essentiel, et sans besoin spécifiquement prononcé d’être au centre de l’attention. Le professeur n’avait jamais compris comment sa sœur faisait pour entretenir son caractère aimable et discret, et éprouvait une certaine admiration pour elle, sans toutefois ni le formaliser ni le reconnaitre ouvertement. Par un miracle des plus surprenants, et à l’opposé de son frère, elle n’avait reçu de leur enfance passée dans un foyer dysfonctionnel aucune pathologie psychiatrique. Sur ce point, le fils avait raflé tout l’héritage, loi salique oblige, et ne lui avait rien laissé. Consciente d’avoir échapper à la dissolution dans sa personnalité de troubles divers plus ou moins handicapants, elle éprouvait pour son grand frère une forme de bienveillance compassée et affectueuse, au point de sembler, de loin et pour qui ne la connaissait pas, émotionnellement condescendante à l’égard de son ainé. Bien que plus jeune, elle était manifestement dotée d’une maturité moins évanescente que le premier-né de la famille. Devant elle, Yukio tendait à perdre son assurance, son aplomb, comme un gamin devant une figure d’autorité, ce qui pouvait apparaitre comme cocasse à une assistance non-avertie, habituée aux rodomontades expansives du professeur d’histoire.

Yukio était nerveux malgré lui. Il n’appréhendait pas tant la rencontre en elle-même que l’effet de démolition explosive qu’elle pouvait produire sur son image publique au sein de son couple. Bien évidemment, Koharu allait être charmante avec Gareth, et inversement, ce n’était pas vraiment la question. Le problème était plus fortement lié à la capacité qu’elle avait à défrusquer les couches d’armure dont il s’habillait pour le révéler dans la réalité de ce qu’il était. Pour un obsédé du contrôle attaché à une maitrise permanente de l’expression de sa représentation extérieure, ce genre de chose était évidemment angoissant. Au fond de lui, il ne pouvait s’empêcher de se demander si Gareth, en concevant plus exactement les contours de sa personnalité, n’allait pas s’en trouver renversé dans ses sentiments, au point, peut-être, de ne plus vouloir de lui.

Pour éviter de trop y penser, il se concentrait sur son ouvrage culinaire, et y investissait une application prononcée. Fermé, absorbé, il faillit ne pas percevoir le désarroi de son compagnon, et mit quelques secondes à réellement réagir. Sorti de sa tâche de manière aussi impromptue qu’impréparée, il ne put que demander d’une voix innocemment paniquée :


- Euh… Mais… Gareth… Il va être bon le bœuf, t’inquiète pas… C’est pas parce que j’ai dit que normalement ça se faisait avec du poulet qu’il faut le prendre comme ça.

Tout en finissant de prononcer sa phrase, il en discerna l’idiotie, et assimila qu’il y avait peut-être autre chose que du bœuf et du poulet derrière les larmes du cuisinier. Il s’approcha, et se mit à étreindre le professeur d’arts plastiques, en lui murmurant à l’oreille, sans vraiment réfléchir :

- Je sais pas trop ce qui va pas mais je suis là, promis. T’as le droit de te moucher dans mon épaule sur mon t-shirt. Faut pas salir ta chemise. Moi je suis pas encore changé c’est pas grave.

Après une courte pause, il compléta, un peu moins instinctivement :

- Désolé, écoute pas trop mes bêtises. Je peux faire quelque chose ? Tout ce que tu veux, je suis là pour toi. J’ai fait un truc pas bien ?







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Lun 3 Juin 2024 - 16:18
Une brassée d’amour et une pincée d’humour
Irumi était tout ce que Gareth n’avait pas été. Pas tout de suite ; et jamais il ne l’égalerait. La première à le défendre contre celui qui le serrait dans ses bras aujourd’hui. La première à lui avoir appris à dire «non» face aux brimades, et oser donner son premier coup de poing, en réponse à celui qui lui tordait le ventre. La sœur qu’il n’avait pas eu.

Gareth n’avait pas peur de rien, pas même de remplacer du poulet par du bœuf dans son oyakudon. Yukio devrait avoir peur en revanche, car du peu qu’il avait entendu de Koharu, deux tempêtes allaient s’abattre sur lui. Alors il rit doucement sous ses larmes. Ca faisait du bien, ces petites phrases qui renouvelaient l’air de ses poumons.

« Hein...? Mais non, c’est pas... »

Ses doigts, resserrés autour de la taille de sa moitié, Gareth respire son odeur et ferme les yeux. Sa voix, un doux frisson à son oreille. Yukio avait le don d’être l’homme le plus adorable qu’il connaissait. Sécher ses larmes, une formalité. Il lui suffisait de l’enlacer et trouver les mots pour le désarçonner.  

« C’était bête de la mettre en plus... Je fais tout à l’envers. »

Le châtain fait semblant d’essuyer son nez sec sur son épaule, puis attrape ses joues pour poser ses lèvres sur les siennes.

« Ne jamais arrêter d’en dire, on s’ennuierait sinon. T’as rien fait, t’es génial. C’est juste la pression qui redescend. Tu sais, je pensais pas que ce serait si dur de faire semblant. Et puis... Je suis peut-être parano, mais t’as pas l’impression qu’on est déjà grillés ? Même Chiaki nous a prouvé qu’on n’était pas doués. Ou c’est juste un génie détective en devenir. »

D’ailleurs, la veste de Yukio lui allait à merveille ! Chiaki n’avait pas résisté à l’envie de l’enfiler et se pavaner avec sous l’œil affectueux mais inquiet de son Gawa-chan. Porter une telle chemise avec une glace à la main relevait d’une grande dextérité, il fallait le comprendre.

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Mar 4 Juin 2024 - 22:42




Une brassée d'amour, une pincée d'humour
Samedi 25 août 2018


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Yukio, dont la dernière rencontre avec Irumi datait de l’école primaire, n’en avait pas conservé des réminiscences très agréables. A vrai dire, il n’avait pas réellement de bons souvenirs de cette époque là, au point qu’il en avait refoulé l’essentiel en une sorte de magma mémoriel obscur, n’en gardant à l’esprit qu’une idée générale assez nauséeuse. De temps en temps, le présent faisant écho au passé, il en ressortait une scène, au gré des aléas, et devait s’accommoder de l’inconfort que cela lui provoquait. Entendre le prénom d’Irumi avait provoqué, dans le prolongement de ses épineuses épiphanies, quelques remontées acides, ainsi qu’un profond sentiment de honte. Aujourd’hui plus que dans son enfance, il détestait être pris en défaut, et par voie de conséquence, abhorrait d’être placé, par une simple présence, en face de ses errements révolus. Il eut préféré, par certains côtés, liquider son enfance, et n’être qu’adulte. Caresse sur aspiration fantasmagorique : Irumi serait bientôt là et, en un sens, elle savait tout de lui.

Elle savait ses imperfections, son sadisme, sa violence, sa vulgarité, sa brutalité, son insuffisance, tout ce qu’il avait patiemment recouvert, année après année, par des couches de politesse, d’altruisme, de générosité, de rigueur et d’humour. Elle savait ce qu’il était, au fond, et ce qu’il serait toujours, parce que le passé meurt mais demeure, et parce qu'il n'a que faire du remord, si authentique qu'il soit. Elle savait, et ce simple fait le désarmait, car il la rendait immune à ses prestidigitations aussi bien langagières que corporelles et vestimentaires. Ses tours de Jedi ne marcheraient pas sur Irumi, et c’était extrêmement contrariant.

L’étreinte de Gareth tombait à point nommé. Plongé dans une certaine forme d’appréhension, Yukio avait besoin d’être rassuré, et sentir son compagnon contre lui apaisait son esprit et ses angoisses, si bien qu’il tendit le cou pour prolonger le baiser qu’il recevait, jusqu’à atteindre les limites de sa souplesse vertébrale.

Orphelin perdu des lèvres qui venaient de quitter les siennes, il écouta distraitement les paroles de son camarade cuistancier, avant d’y répondre sur un ton faussement assuré :


- Bien sûr que je suis génial, pourquoi tu énonces des évidences comme ça ?

Il attendit trois secondes, avec une moue innocemment condescendante, juste pour agacer le professeur d’arts plastiques, avant de briser à son tour la distance qui les séparait, pour se coller à lui, et lui glisser à l’oreille, avec une voix sensément plus sincère :

- Tout va bien, t’as le droit de pleurer. Tant que c’est pas à cause de moi, ça me tuera pas complètement.

Il voulut enchaîner sur la suite de son propos, mais plonger au cou de Gareth lui avait noyé le cerveau sous l’odeur de son collègue, et il s’en trouvait, en conformité avec l’habitude, ralenti dans ses réflexions comme dans son élocution, un peu comme s’il s’était injecté, sur l’instant, une dose de produit stupéfiant.

Il décolla le nez de la peau de son amant, et rassembla ses pensées pour articuler quelque chose :


- Je… Je crois que j’ai plus vraiment envie de faire semblant. Je dis pas qu’il faut le crier sur les toits de la ville entière, mais faire tout le temps attention, ça m’épuise à force. J’ai un peu l’impression d’avoir une relation adultérine, et pour être honnête, c’est pas le genre de relation qui m’a apporté le plus de joie dans ma vie.

Il s’approcha de nouveau, en attrapant Gareth par la taille, et en lui glissant lascivement tout en le détaillant :

- Tu sais, c’est un peu embêtant de pas pouvoir te déshabiller du regard quand t’es dans la salle des profs… Un vrai effort de concentration pour pas laisser mon esprit courir sur ta silhouette.  

Le regard facétieux, les lèvres pincées, Yukio recula, et lança tout en s’éloignant vers les chambres :

- Moi aussi faut que je passe une chemise. T’as qu’à finir de cuisiner tout seul, ça t’apprendra à être séduisant.







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Lun 10 Juin 2024 - 15:52
Une brassée d’amour et une pincée d’humour
Bien sûr qu’il l’était et chaque jour il lui montre un peu plus. Gareth roule tout de même des yeux sans se départir de son sourire, Yukio avait aussi un don pour la comédie. Le châtain s’en voulait un peu de l’avoir inquiété avec ses larmes et se blottit un peu plus contre lui. Le professeur d’histoire et géographie ne répondit pas tout de suite à ses paroles. Mais l’amoureux du basket savait qu’il prenait tout le temps nécessaire à la réflexion avant d’ouvrir la bouche. Ses premiers mots lui retirèrent un poids incommensurable. Lui aussi n’en pouvait plus de se cacher comme s’ils étaient coupables du pire crime jamais commis. Rien d’autre ne pouvait plus le rassurer et calmer les battements saccadés de son cœur. Trop occupé à l’essorer de toutes ses angoisses, Gareth ne relève pas tout de suite l’aveu de sa moitié.

« Donc on ne se cache plus ? »

On ne se cache plus. C’était autant effrayant que revigorant. Peu importait ce qui les attendait, des regards, des remarques, des grimaces, ils feraient front ensemble et voilà tout ce qui comptait. Ca et pouvoir se déshabiller du regard dans la salle des profs. Mais Gareth était déjà passé maître dans cet exercice, il lui donnerait quelques cours particuliers.

« Ah oui ? Désolé de mettre à mal ta concentration... Moi j’arrive très bien à maintenir la mienne pourtant, mais mon bureau est bien placé, ça explique des choses... »

Ses mains glisse dans le dos de Yukio et il pose chastement ses lèvres sur le bout de son nez. Le contact est de courte durée car son brun s’éloigne déjà. C’est à ce moment là que ses dernières paroles lui reviennent en mémoire.

« Attend un peu. »

Il éteint le feu sous la marmite et rejoint son amant en deux enjambées, avant qu’il ne puisse se retourner. Ses bras entourent sa taille puis il chuchote à son oreille.

« On peut savoir comment tu sais quel niveau de joie apporte une relation adultérine ? Et pas de détour, tu as vendu la mèche à l’être séduisant que je suis. »

Gareth pourrait s’offusquer. Il avait la tromperie et l’infidélité en horreur. Il s’estimait chanceux d’être de ceux qui amoureux, ne voyaient plus personne d’autres. En revanche, il évitait de boire à outrance en soirée et commettre un regrettable impair. Même s’il lui arrivait par moment de déroger à sa propre règle, comme tout être humain et d’avaler un ou deux verres de trop. Le professeur pourrait donc s’inquiéter des révélations de son amant, un petit nœud discret se ficelait dans son estomac. Il refusait pourtant de lui accorder de l’importance.

Leur relation était basée sur la nouvelle confiance qu’ils avaient bâti ensemble et le passé oublié. Ils avançaient tous les deux peu importe les difficultés qu’ils rencontreraient. Le soir de leur première dispute, et le jour où ils s’était mis en couple, Yukio avait pris son courage à deux mains et allumer quelques bougies sur les épisodes sombres de sa vie. Gareth ne soufflerait pas dessus, sinon jamais son amant ne trouverait la force d’éclairer les ombres encore tapies dans ses ténèbres. Il lui avait promis et tiendrait sa promesse. Pour le rassurer, il posa ses lèvres sur l’arrière de sa nuque.

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Lun 10 Juin 2024 - 23:05




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Samedi 25 août 2018


Musique d'ambiance

[Chez Gareth] Une brassée d’amour et une pincée d’humour Kahoru10


Yukio venait à peine, dans un élan, de prendre congé, qu’il se trouvait déjà rattrapé par la patrouille, qui s’était abattue sur lui avec la fulgurance d’une équipe d’intervention sur une prise d’otages. A peine surpris, il camoufla un sourire. Gareth était un petit curieux, que d’allusives et innocentes mentions suffisaient souvent à amorcer, ce qui avait le don d’amuser le professeur d’histoire, qui veillait à ne point trop en jouer. Après tout, son petit ami n’était pas la seule personne dans la pièce à faire parfois démonstration d’une curiosité un peu malsaine.

Alors qu’il sentait les lèvres de son partenaire se poser sur l’arrière de sa nuque, il baissa la tête, et prit un air grave et compassé, avant de relever le regard au ciel et inspirer profondément, comme pour trouver le courage de délivrer le plus inavouable des secrets. Sur un ton sérieux et affecté, il empesa son discours avec les yeux fixés au mur :


- L’été s’était prolongé sur le Kansai, qui brûlait d’un enfer que Dante lui-même n’aurait pu renier. La chaleur, en lourde couverture, collait aux parois des murs blanchis à la chaux, et teintait les ombres les plus épaisses d’une étrange température, vibrante et spontanée, qui vous bondissait dessus avec la vivacité d’un fauve carnassier. Ma mère, que la canicule n’avait pas éteinte, s’était saisie d’une estivale motivation pour accomplir son grand œuvre, celui par lequel elle entendait, en étoile providentielle, passer à la postérité.

Légère pause.

- Depuis mon adolescence, cette femme n’avait eu à l’esprit qu’une unique obsession, qui colorait ses songes et ses journées, et rendait son existence aussi frustrante qu’inapaisée. Inépuisable, et jamais à court d’espoir, elle laissait surgir d’elle-même la force propre aux optimistes, et par un orgueil semblable à celui d’Icare, elle escomptait trouver à son rejeton une altière, noble et durable compagnie. Pareil hubris appelait nécessairement, par quelque morale intemporelle, à une sanction des plus entières, mais elle n’en était pas assez consciente. Bien qu’ayant essuyé échec sur échec, elle continuait à cheminer, par monts et par vaux, cueillant ci-et-là quelques innocentes fleurs de toutes saisons, pour les jeter sans ménagement sous la course de son médiocre fiston.

Petite expiration.

- Par une action déterministe aux allures mécaniques, le fils de cette pauvre femme n’était jamais à la hauteur, et malgré la resplendissance des pétales que l’on jetait sur son chemin, ne parvenait jamais qu’à décevoir, au point d’en avoir fait fané toute une prairie. Qu’on ne se méprenne point, il n’était ni désagréable, ni empreint de méchanceté, mais il cherchait, par une préoccupation des plus poétiques, la pureté romantique d’un sentiment sincère. Les bouquets entiers avec lesquels on le frappait lui semblaient bien fades, tant les fleurs qui le composaient, et les relations qui s’en suivaient, lui semblaient artificielles, et vides de toute authenticité. Pour suivre les enseignements du gamin dans le désert, le jeune homme se scandait : « c'est le temps que tu as perdu pour ta rose qui fait ta rose si importante ».

Yukio entreprit de se retourner, assez lentement, et de terminer son conte face à Gareth.

- Pour autant, las de se voir constamment observé par l’œil inquisiteur de son auguste parente, notre jeune héros, trouva quelque arrangeante amie qui, à son instar, se faisait besoin de vivre en ménage, et la présenta sans attendre à sa créatrice vieillissante. Le sort étant tissé d’ironie autant que de malice, le destin s’en mêla, et eut tôt fait d’élire ce moment pour planter, dans la morne plaine de Waterloo, la graine d’une envoûtante lysimaque. Percé par les fourches d’une sheaskipirienne dramaturgie, notre infortuné protagoniste fut plongé dans les tourments insondables des antiques tragédies grecques. Le devoir lui était connu, mais il se trouvait, à portée de sa vision et de son esprit, la promesse d’une juste idylle.

Voix moins déclamatoire, et plus attristée.

- Voyant passer dans sa main la chance d’une existence, le gamin céda aux lumières qui l’éblouissaient, et se mit à écrire, sans réellement l’avoir voulu, les lignes d’une vie dédoublée. Bien sûr, il entendait clarifier, sous la magnanime direction du ministère de la conscience, la situation, mais avant d’avoir pu procéder, il découvrit, par une disgracieuse fortuité, que son arrangeante amie l’était un peu plus qu’il ne l’aurait voulue, et qu’éprise de sa personne, elle n’avait consentie à leur assemblage qu’avec de celées attentes.

Arrêt momentané, comme pour effacer un mauvais souvenir.

- Le temps du dernier acte était advenu, et notre atrabilaire histrion, placé en impossible situation, laissa s’exprimer une certaine forme de lâcheté. Laissant derrière lui le monde se construire en son absence, il marcha le long des quais, sur le port, et s’engagea auprès du premier capitaine venu, aux fins de voguer vers le lointain coucher de Soleil, prêt à chercher dans l’exil son salut, son absolution, et peut-être une once de maturité.

Alors qu’il concluait la dernière phrase de son histoire, Yukio chercha les bras de Gareth, pour s’y blottir, avant de glisser, avec un air contrit :

- Bon en fait c’était à l’aéroport, et j’ai pris l’avion, pas le bateau, mais je trouvais que ça rendait mieux, ça donne un côté aventurier.

Renforçant son étreinte, comme pour empêcher le professeur d’art de partir, il reprit, avec un ton pénitent :

- Tu vois, quand je te dis que je fais toujours tout de travers, que je suis nul, et que ça me fait peur, je mens pas vraiment.

Il termina, toujours en resserrant son étreinte :

- Promis, c’est toi ma fleur maintenant. La seule et l’unique.







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Dim 16 Juin 2024 - 17:40
Une brassée d’amour et une pincée d’humour
La seule et l’unique. Ses pétales en frétillent de bonheur. Tout ce temps à braver pluie torrentielle, zénith caniculaire et sécheresse, à attendre sans même s’en rendre compte, qu’une âme au cœur vert vienne l’éboutonner et lui permettre de fleurir.

Il essayait et essaierait d’autant plus fort à présent, de faire naître en son âme sœur ce doux réconfort de voir chaque matin sa fleur s’épanouir. Tant que son soleil se lèverait, chaque fibre de son pédoncule se tournerait dans sa direction. Un rayon de chaleur pour une flagrance d’azalée, signe de l’amour sincère qu’elle lui portait.

Et même si durant son apprentissage, nombre de floraisons avaient fait les frais du sécateur un peu trop zélé de son jardinier des cœurs, aujourd’hui elle laissait chacune de ses feuilles à son bon soin, abaissant la muraille de son calice.

« C’est du passé. Je sais que tu n’as jamais été aussi sincère avec d’autres, et ça me touche énormément. Chaque jour je découvre à quel point tu es extraordinaire et j’ai envie que tout le monde le sache. »

Envie qu’il se balade avec un bouquet de lui-même à la main et se vante de leur idylle. Qu’ils se posent sur un banc, tous les deux, face à face, et oublient les défricheurs à leurs trousses, aigris et impétueux. Ce soleil, qui le fixait avec tant d’affection, donnerait assez de force à son feuillage pour les recouvrir et les protéger des coups de cisailles et de serpes.

« Allons voir de quelle chemise sera habillé mon soleil. »

Ses pétales caressaient doucement ses lèvres avant qu’ils n’aillent se réfugier dans leur cocon, seul témoin de leur synthèse chlorophyllienne.

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Ven 21 Juin 2024 - 21:53




Une brassée d'amour, une pincée d'humour
Samedi 25 août 2018


Musique d'ambiance

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Il était gentil le Monsieur. Ce n'était pas tous les jours qu'on disait à Yukio qu'il était extraordinaire, et ce n’était pas tous les jours qu’on le voyait comme un rayon de Soleil. Lui qui, longtemps, s’était vécu comme un spectre en sursis, ne parvenait que difficilement à s’imaginer comme une source de lumière, et bien qu’il n’entretint aucun doute quant à la sincérité des formules employées, il persistait toujours, au fond de lui, l’impression étrange que quelque chose n’allait pas, et qu’il n’était jamais qu’à une demi-seconde de l’abîme, à quelques dixièmes d’être démasqué, et vu pour ce qu’il était, quoi que ce fût.

Il accepta les compliments, comme s’il s’était agi d’un acte de foi. Dans les brumes de son propre avenir, il ne percevait rien de tangible, et ne pouvait que choisir, consciemment, de s’abandonner à la certitude. En esthète gramscien, il alliait le pessimisme de la raison à l’optimisme de la volonté, et à vrai dire, c’était avant tout parce qu’il ne voyait pas vraiment quoi faire d’autre.

Les lèvres de Gareth, une fois de plus, s’échouèrent sur les siennes, comme un vaisseau jeté sur les sables par la tempête, et plongé qu’il était dans une certaine forme de fébrilité, suite à son récit prolongé, il les accueillit avec une ardeur mal maîtrisée. Alors que le professeur d’art entendait sûrement se poser avec douceur sur l’ourlet de son visage, son compagnon les accueillit avec un mouvement d’estocade, comme s’il avait voulu les mordre, avant de les embrasser de manière presque agressive.

Un instant plus tard, et sans que Gareth n’ait vraiment le temps de réagir, il l’enserra par la taille, et le poussa fermement contre le mur, tout en s’enfouissant au creux de son cou, pour y déposer une marque qui ne pouvait promettre que d’être gênante.

Puis, il susurra malicieusement à l’oreille de Gareth :


- Là, tout le monde le saura. Tu es exaucé.

Tout en prenant un peu de recul, pour laisser à son partenaire le soin de réaliser qu’il était à présent affublé d’un énorme hématome violacé à la base du cou, le professeur d’histoire ôta son T-shirt, dévoilant le haut de son corps, qu’il laissa son vis-à-vis admirer, avant de l’enlacer de nouveau, et de murmurer avec une fausse culpabilité :

- Mon cher colocataire, vous qui m’hébergez, je dois vous avouer quelque chose.

Plus proche de l’oreille, et la voix plus basse et lascive :

- Là tout de suite, j’ai pas du tout envie de remettre une chemise.







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Lun 15 Juil 2024 - 20:15
Une brassée d’amour et une pincée d’humour
Il l’avait toujours eu, ce don pour le surprendre et le prendre au dépourvu. Deux décennies plus tôt, Gareth s’était toujours tristement étonné de la créativité que Yukio mettait en oeuvre pour le persécuter.

Aujourd’hui l’estocade lui enveloppait le cœur plus qu’elle ne le perçait. En rendait fou ses battement au lieu de les comprimer. Il le sentait, s’emballer dans sa poitrine au contact du mur. Coincé contre lui, la frayeur juvénile s’était évanouie. Il pouvait rester là, à subir les attaques de ses lèvres contre sa peau sans jamais prier les dieux qu’une échappatoire se dessine.

Les coups dans son bas-ventre irradiaient son corps d’une douce chaleur, ses dents bourreaux de ses lèvres, contenaient un gémissement frôlant l’obscénité. Le châtain voulu retenir son compagnon contre lui, mais pensait-il être en position d’exiger quoi que ce soit. Combattre la malice par la malice, telle fut la réponse insinuée par son sourire.

« Je vais en faire des jalouses... »

Le professeur d’arts plastiques n’était pas sans savoir que son brun rencontrait un énorme succès auprès de la gente féminine et jalousie auprès de la masculine. Chaque jour, il devait résister à l’envie de réduire leurs petits espoirs à néant, et ne pouvait se consoler qu’une fois la porte du foyer refermée après eux.

L’idée de cette période révolue fit bouillir un peu plus le sang dans ses veines. La brûlure au creux de sa nuque éveillait ses sens. Avide de son contact, le châtain prit tout de même le temps d’admirer une ligne d’abdominaux légère mais non moins attirante. Sa démarche altière affublée de son costume sombre n’avait jamais laissé aucun doute sur la silhouette dessinée qu’elle dissimulait. Une chemise, une affaire bien encombrante.

Gareth fit glisser ses doigts sur ses flancs, des frissons courant le long de sa nuque. L’un de ses principaux défauts avait toujours été la rancune, nourrie au grain par un certain professeur, qui méritait quelque punition pour l’énième marque laissée sur sa peau. La première qu’il voudrait garder. Ses lèvres trouvèrent leur victime en son épaule, suivies par ses dents pour rougir un peu plus sa peau.

Son dessein accompli, il revint capturer ses lèvres, fiévreux, et le fit reculer jusqu’au bord de la table du salon. Tous deux avaient oublié que dans moins d’une heure, des invitées feraient leur arrivée. Gareth était plutôt occupé à embrasser son torse en cascade. Il souffla contre sa peau :

« En fait tu es bien plus beau sans chemise. »

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Mer 24 Juil 2024 - 23:30




Une brassée d'amour, une pincée d'humour
Samedi 25 août 2018


Musique d'ambiance

[Chez Gareth] Une brassée d’amour et une pincée d’humour Kahoru10


Voilà que j’étais, à mon tour, marqué à l’épaule. Tatoué, décoré de quelques arcs rougeoyants, condamné à éviter, du moins pour la semaine à venir, les débardeurs et les sorties à la piscine. Ce n’était pas vraiment gênant, je n’étais adepte ni de la natation, ni du mauvais goût vestimentaire. En fait, j’étais presque déçu, personne ne pourrait apercevoir cette morsure, et j’avais envie de la porter comme une médaille, comme un placard, ou comme une parure. Plus grand-chose à faire de la bienséance, les gens qui ont erré sur les chemins de la mélancolie, en randonneurs lypémanes abonnés à tous les refuges, ont bien le droit, le jour venu, de jeter de la couleur sur le voile dont ils ont recouvert leur malheur. J’étais mordu, littéralement, métaphoriquement, et j’en tirais, sans vraiment savoir pourquoi, une certaine forme de fierté. Quand on a souri au bonheur d’autrui en serrant les dents, on peut cracher le sien à la face du monde, je crois. C’est petit, c’est orgueilleux, et c’est certainement inapproprié, mais c’est humain, et j’ai toujours eu besoin de m’assurer que je l’étais bien, humain.

Je le regardai observer son méfait avec satisfaction, ce qui m’arracha un sourire en coin. Il avait le regard infatué d’un artiste en contemplation devant sa première œuvre destinée à être exposée. Vu sous cet angle, il créait chez moi l’envie de lui servir des commentaires didactiques. Alors qu’il approchait ses lèvres des miennes, je résistai à lui murmurer, sur un ton docte et légèrement provocant, que malgré un léger manque de maîtrise technique, le résultat de son exercice d’apposition de mâchoire était encourageant, et qu’il faudrait constater les progrès réalisés à la fin du semestre.

Je restais coi, patient, amusé, et constant dans l’effort que je produisais pour rester maître de moi-même. Poussé contre la table, et lentement décoré de baisers déposés sur mon torse, j’avais de plus en plus de mal à ne pas céder à une certaine forme d’effervescence interne. Sans avoir pu le vérifier, j’étais à peu près certain d’avoir les joues échauffées, roses, ainsi que le front incandescent.

Je luttais, mais il ne manquait plus que quelque insignifiante bravade pour me faire chuter. Je me savais affecté par un éréthisme sur lequel je n’avais pas vraiment prise, et tentais de me concentrer sur l’idée qu’il restait encore bien des choses à faire, à préparer, à arranger. Le devoir appelait, qui de son impérieuse exigence, ne pouvait laisser les émotions et les passions s’enivrer de leurs propres possibilités. Le devoir était là, qui m’appelait, qui me regardait, la foudre aux yeux, et m’ordonnait d’ôter le mercure du brasier. Il y avait un temps pour chaque chose, et le sens du mot « adulte » se trouvait tout entier contenu dans l’idée qu’il était possible, pour un homme doué de raison et de maturité, de s’inscrire dans le respect des moments destinés à des usages appropriés.

Gareth était visiblement retombé en adolescence, et le fait qu’il relance, sur mon torse nu, tout autant de flatteries hâbleuses que d’embrassades, en était un signe éloquent. Je ne pouvais pas vraiment lui en vouloir, mais nous n’étions que deux dans la pièce, et il fallait bien que quelqu’un prenne le rôle de l’adulte raisonnable, sérieux, et évidemment rabat-joie. Il fallait que je lui réponde avec une boutade pleine d’humour, de bon sens et de responsabilité, histoire d’engager la désescalade. C’était ce que le devoir commandait.

C’était ce que le devoir commandait, et là, tout de suite, je n’en avais strictement rien à carrer. La responsabilité et le bon sens pouvaient aller se jeter du haut d’une tour, qu’est-ce que vous vouliez que ça me fasse ? Une vie à faire le bon élève devant les petites attentes de la société ne m’avait rien apporté. Niksam la plénitude de la sagesse et de la maturité. Surmoi ? Connais pas. Sens des réalités ? Ptdr, t’es qui ? Je fais ce que je veux, Spinoza peut retourner aux Provinces Unies. Je suis Yukio Ogawa, et en conscience, en responsabilité, j’assume tout, car l’important, c’est de rester fidèle à ses valeurs.

Je pose la main sous le menton de Gareth, et lui relève le visage, jusqu’à le ramener en face du mien, pour plonger dans ses yeux, et lui envoyer, sur un ton presque autoritaire :


- Et pourquoi tu n’enlèverais pas la tienne ? Que je puisse vérifier si c’est aussi ton cas.







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Dim 8 Sep 2024 - 21:01
HS:

Une brassée d’amour et une pincée d’humour
Mon oeil d’artiste ne s’y trompait pas, ces rougeurs lui seyaient parfaitement. Un sourire satisfait étira mes lèvres alors que je le poussais contre la table. Les lèvres avides de sa peau, je me baladais sur son torse, n’en ratant aucun frémissement.

Son combat interne se lisait dans son regard incandescent et je me plaisais à l’attiser toujours un peu plus. Je ne me lassais jamais d’admirer la rosée courant sur ses joues, déliant son air fier et contrôlé habituel. Une barrière dont j’étais l’unique détenteur de la clé, gardée jalousement. Dire que je le dévorais des yeux me paraissait faible, je m’abreuvais littéralement de cette vision. Insuffisante. Nous en venions à la même conclusion.

Ses doigts sous mon menton éveillèrent des frissons le long de ma nuque. Presque docile, je le laissai rapprocher mon visage du sien, nous rendant coupables de cette noyade mutuelle. Devais-je préciser que son ton un brin autoritaire me faisait beaucoup d’effet ? Monsieur voulait vérifier ma copie peut-être ? Ma main glissa doucement entre ses abdominaux, pas pressé d’abdiquer à sa directive, poussant la provocation un peu plus loin, picorant l’ourlet de sa lèvre inférieure. Je me résigne enfin à défaire d’une lenteur exagérée chaque bouton de ma chemise.

« C’est plus difficile que je ne le pensais... »

agora


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Mar 22 Oct 2024 - 23:30




Une brassée d'amour, une pincée d'humour
Samedi 25 août 2018


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Autant qu'il m'en souvienne, l'amour ne m'avait jamais étreint au point de m'empêcher de respirer. C'eut été étrange, du reste, tant mes contemporains se plaisaient à répéter que je ne manquais pas de souffle. Pour sûr, alors que le Japon était rempli d'asthmatiques résolus à la résignation silencieuse, je m'exposais, et j'en tirais malgré moi une certaine forme d'orgueil. C'était un tort, je crois, car si je ne manquais jamais d'air, j'inspirais sans être inspirant, et j'expirais comme un produit préemballé marqué du sceau de la péremption. Ma capacité pulmonaire, malgré le tabac, n'avait jamais été prise en défaut, et je comptais, jusqu'à l'exhalation de ma dernière effluve de vie, qu'il en fut ainsi. Sur mon épitaphe, les hommes écriraient sûrement "Ci-git un homme qui, nous les brisant, se ventait trop." ou un autre truc du genre. Je l'espérais, grisé par la conscience de ma futilité.

Autant qu'il m'en souvienne, je ne séchais jamais, c'était un principe, constant depuis le collège, et ce me semblait être une évidence qu'en dehors d'une perte de conscience subie, rien n'était vraiment en capacité de me taire. Telle était la voix, jamais éteinte, toujours vibrante, prête à bondir sur l'inconnu, à persécuter quiconque avait l'outrecuidance de laisser l'espace sonore inoccupé. Sur mon épitaphe, les hommes écriraient sûrement "Il s'est muet" ou un autre truc du genre. Je l'espérais, grisé par la perspective de décevoir le monde.

Bref, j'étais un peu matelot, j'avais besoin de peindre des mots sur le temps. C'est bizarre, chez les marins, ce besoin de faire des phrases. Autant qu'il m'en souvienne, et j'ai bonne mémoire.

Pourtant, je percevais dans l'instant qui m'était donné que quelque chose m'avait été retirée, comme enlevée par quelque imperceptible voleur à la tire. Ma voix s'en était allée, aspirée, noyée, ensevelie dans l'incapacité que j'avais à organiser le flot de mes sentiments, de mes émotions, de mes sensations. C'est une chose étrange, ça. C'est surprenant, un peu bizarre. C'était là, ça ne l'est plus, et vous ne savez pas vraiment où c'est passé. C'est un peu comme chercher ses clés quand on a les a perdues, ou sa dignité quand on sort d'une soirée à La Dernière Chance, ou son espérance de vie quand on passe son temps dans une cabine à UV. C'est un sentiment d'absence, à la fois neuf et familier, un truc un peu indescriptible. Et on ne sait pas vraiment si ça va durer, si on va mourir, ou juste rester comme ça, pour toujours. Sur mon épitaphe, les hommes écriraient sûrement "Il est coi, coubeh" ou un autre truc du genre.  Je l'espérais, amusé par l'idée qu'on pouvait trouver du sens à l'inepte.

J'étais là, et mes cordes vocales s'étaient évanouies, et je ne savais pas trop où elles étaient parties, et je m'en fichais un peu, parce que, pour une fois, je n'étais pas sûr d'avoir besoin des mots. Je contemplais ses yeux cristallins, et son visage empourpré d'une forme de gêne à l'idée d'être lu comme un roman de gare, sans difficulté particulière, et je n'avais qu'une seule envie, c'était de lui jaffer les lèvres. Je voulais le serrer dans mes bras, jusqu'à ce que les molécules de nos corps établissent des liaisons covalentes. Je voulais m'immerger dans son odeur, m'y enfouir, m'y noyer, jusqu'à ce que mon cerveau s'en liquéfie. Je voulais m'arracher l'âme, le cœur, et toute mon existence, et les lui donner, en le suppliant pour qu'il m'embrasse. Je voulais empaqueter dans un joli papier cadeau chaque atome de mon corps et les poser devant lui, là, en petites piles imperceptibles. Je voulais que le monde alentours disparaisse, et qu'il ne reste dans un éther figé dans le temps que lui et moi. C'était malsain, d'aimer autant, et je le savais, mais en toute honnêteté, j'étais à peu près sûr que ça me plaisait. Être là, avec lui, prêt à l'enlacer, et savoir à quoi s'attendre, était vertigineux. C'était un peu comme se trouver au bord d'une falaise, prêt à sauter, et savoir que des ailes allaient nous pousser. Je l'aimais, et c'était même un peu court. J'adorais ses plaisanteries, j'admirais son altruisme, je dévorais ses sourires, et je désarmais quand il était triste, ou gêné, ou perdu. Et moi, perdu, je l'étais.

J'étais perdu, et angoissé, et heureux, et fébrile, et rayonnant, et paniqué, et euphorique, et mort, et plus vivant que jamais.

Je l'aimais, et ça n'était pas vraiment un coup de foudre passager, parce que moi, ce que j'avais fait, c'était d'enfoncer la porte du putain de transformateur du quartier pour coller les deux mains sur le 20 000 volts, et c'était génial, et j'en voulais encore, encore plus de lui, toute une vie, et même plusieurs, pour l'entourer avec mes bras, et sentir les siens autour de moi. Et j'avais envie de pleurer, juste comme ça, et je dégueulais d'amour, et j'avais jamais le ventre vide.

Je l'aimais, Gareth, et là, tout de suite, il galérait à enlever cette chemise de merde, avec ses boutons de merde, et j’avais envie de les lui arracher avec les dents, mais mes dents, j’en avais besoin pour lui dévorer les lèvres. Et c’est là que, en étant rendu aux cimes de ma destinée, enfin sûrement, peut-être, j’ai fait ce qu’une existence entière à fréquenter les échoppes de tailleurs ne m’avait pas préparé à faire. Une félonie que la postérité, sûrement, peut-être, ne pardonnerait jamais. Un acte impulsif plutôt irrémissible, mais dont la commission avait ruisselé de l’essence même de la réalité en présence. Un acte regrettable, vraiment, que j’ai prémédité d’une question dont la réponse n’aurait dans tous les cas eu aucune prise sur ce qui allait advenir :


- Gareth, est-ce que tu tiens vraiment à cette chemise ?

J’ai attrapé les deux pans un peu en dessous du col, au niveau du torse, et j’ai tiré comme un con, et tous les boutons ont sauté.

Et c’était nul, mais je l’aimais, Dieu pardonnera.








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Dim 3 Nov 2024 - 22:42
Une brassée d’amour et une pincée d’humour
Quelle plus belle preuve d’amour pouvait-il me faire qu’aller à l’encontre de tous ses préceptes ? Détruire une pièce de la sorte lui vaudrait un ban de la très sélective communauté de la Chemise. Mon cœur en vibra un peu plus fort dans ma poitrine.

« Tu peux toutes les arracher. »

Si s’étaient ses mains qui me débarrassaient de chacun de leur poids sur mes épaules, alors j’étais prêt à toutes les abandonner, prêt à me ruiner auprès des plus émérites chemiseries pour que ses doigts me frôlent. Je laissais les siens s’aventurer sur ma peau pendant que je repartais à l’assaut de ses lèvres.

Le temps semblait s’être arrêté, il n’était plus question de déjeuner où nous étions de toute manière les plus à même d’être cuisinés, à la place des plats inachevés traînant sur le plan de travail. Y séjournaient-ils même encore ? Je préférais mettre toutes mes forces à défaire le centurion de cuir autour des hanches fines de Yukio plutôt que m’en soucier. Ce fut le dernier combat du fidèle officier de guerre. Mon côté anglais était fier d’asseoir sa victoire, telle la bataille d’Azincourt. Dézippée, l’armée ennemie.

Avide de conquête, mes lèvres partaient en éclaireur sur les collines mandibulaires. Fin stratège, mes doigts s’aventuraient sur une nouvelle ligne protectrice faite de coton. L’aine était assiégée sans retraite possible et tant pis pour l’esprit chevaleresque. Mes cinq drapeaux marquaient mon territoire sous les soupirs de l’ennemi, pressé de lever le drapeau blanc ? Les hanches abdiquaient déjà et dévoilaient leur peau en signe de bonne foi. Je leur montrai à quel point je les aimais, les marquais de mon passage pour mieux y revenir plus tard.

Driiiiing !!

Je m’écartai de Yukio, affolé et le souffle court, la main toujours emprisonnée dans les ourlets cotonneux. Le temps n’avait eu que faire de nos échanges énamourés, suivant son cours, nous narguant silencieusement. J’espérais de tout cœur qu’il s’agissait d’Irumi, je pourrai encaisser la honte face à son regard, elle avait déjà vu pire de moi. La sœur de Yukio en revanche, une femme dont je ne connaissais pas les armes, était nettement plus dangereuse. Avec regret, une retraite s’imposait et je retirai mes drapeaux de leur terrain conquis. Trottinant à pas de loup, mon œil scanna la porte d’entrée par le judas. Alerte, lien de sang. Demi-tour. Je ne pouvais pas ouvrir avec une chemise débraillée bon pour servir de chiffon.

« Bonne chance, mon soleil... »

Un baiser sur sa joue et j’abandonne le front sans aucune dignité, la chambre est mon refuge.

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