[Terminé] Vol de figurine, accusé levez-vous Ft. Paul

Après ses énièmes révisions à la bibliothèque, Eikichi avait jugé que son cerveau s’était assez donné de mal. S’il n’était pas très sociable, voire pas du tout, le lycéen refusait rarement une partie de shogi, ça lui rappelait sa chère grand-mère. Quelques amateurs s’y adonnaient régulièrement en salle commune et on l’alpagua lorsqu’il passa, son sac de cours pendant sur son épaule droite.

Eikichi le laissa glisser jusqu’au sol pour s’installer en face de son adversaire. Pendant plusieurs minutes, ses méninges se remirent à chauffer, tant pis pour la pause bien méritée. En milieu de partie, le lycéen en face de lui s’excusa pour aller aux sanitaires et Eikichi choisi ce moment pour se replonger dans un manga qu’il piocha dans son sac, le laissant ouvert.

Au loin, il entendit la voix d’un de ses camarades de classe qui l’insupportait. Entendez par là, plus que tous les autres. Il parlait trop, gesticulait pour rien, se vantait d’un rencard imaginaire avec une fille qui n’existait pas davantage ou alors au très mauvais goût. Inutile de préciser qu’il lui avait déjà dit ses quatre vérités pour qu’il lui lâche la grappe à vouloir l’intégrer à sa petite cour. Le pire était qu’il se rapprochait, sa voix envahissait son espace. Eikichi s’enferma dans sa fameuse bulle et ne réagit pas aux provocations puériles pour tenter de lui soutirer un juron.

L’imbécile abandonna, se pavana dans le couloir des dortoirs. Au même moment, une tête blonde sortit de sa chambre, le laissant entrevoir un beau chantier sur son bureau... Une figurine, non, un paquet même ! C’est là qu’il eu une idée. Surveillant les alentours, il subtilisa une figurine pratiquement sèche et revint en salle commune. Ce type avait clairement du temps à perdre. Eikichi, coupé du monde et absorbé par sa lecture, ne remarqua pas la figurine glissée dans son sac et se demandait surtout ce que faisait son comparse de shogi. La tête dépassait légèrement du sac, méfait accompli. Le fauteur de trouble alla s'installer tranquillement avec sa troupe dans un coin de la salle.

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Il en mettait du temps, il était tombé dans la cuvette ou quoi ?! Eikichi avait déjà réfléchi à ses prochains coups sur le plateau et l’envie de tester sa stratégie le démangeait. D’impatience, sa jambe gauche ne cessait de sursauter, faisant glisser son chaussons sur le linoleum.

Une seule chose pu stopper les muscles dans leur course. Un garçon qui demandait à tout le monde quelque chose avec panique. Le ténébreux se souciait rarement des autres, ce qui ne signifiait pas que ça ne lui arrivait jamais. Voir quelqu’un paniquer activait sans mal son côté serviable, réservé en premier lieu à ses proches et aux personnes qu’il jugeait assez mature selon ses critères. Son tour arriva et malheureusement, il ne lui serait pas d’une grande aide.

"Nan, ça me dit rien."

Au moins, personne n’était mort. C’était que du plastique après tout. Qui ne dépassait absolument pas de son sac à dos posé contre le pied de la table.

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De quoi il parle la binocle ? Il reconnaît pas un sac ? Eh ben les traumatismes de perte de figurine font de graves dégâts... C’est quoi ce bordel ? Eikichi met la main dans son sac et en sort la pièce à conviction.

"C’est tellement gros que c’est ridicule..."

Et ça l’énerve tout autant, Eikichi. Surtout quand il entend les ricanements d’une certaine bande de c*ns dans le fond de la salle. Le problème c’est qu’il n’avait de toute manière aucune preuve contre eux et qu’ils prétexteraient facilement de simplement se moquer de lui.

"Si j’avais volé ton.. Truc là, je l’aurais caché mieux qu’ça. J’ai pas bougé d’là."

Un peu de jugeote suffirait à valider son raisonnement.

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Son caractère, de manière générale, ne joue jamais en sa faveur pour ce qui est des relations sociales. Jusqu’ici, Eikichi s’en accommodait très bien. Sauf que s’il se fichait d’avoir une réputation de grincheux, qu’on le prenne pour un voleur ne passerait pas.

"Vrai. Justement, tu trouves pas ça facile de la trouver comme ça, par hasard ?"

Son ton se fait plus acide alors que le blond ne démord pas. Quel abruti qui volerait quelque chose, le laisserait ainsi à la vue de tous ? Déjà, il aurait pu ne serait-ce que fermer son sac. Heureusement, du moins, l’espère Eikichi, la binocle n’est pas aussi stupide qu’il le pensait. Le brun détourne les yeux et les plisse devant la bande qui se fend discrètement la poire. Il les quitte ensuite du regard et lève la tête vers le blond.  

"Y’a plein de gens qui m’aiment pas parce que je leur lèche pas les bottes, alors c’est pas déconnant que ce soit juste pour m’emmerder. Tu devrais faire gaffe à qui se faufile dans ta chambre. Bref, reprend-là et on en parle plus."

Lui, tout ce qu’il souhaitait, c’était retrouver sa tranquillité. Il ne ferait pas le plaisir à ses chers camarades de classe de les accuser tout en sachant que rien ne pourrait prouver ses dires.

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Là c’était sa tête qui allait finir par exploser s’il ne le lâchait pas dans les minutes qui suivraient. Eikichi ferma les yeux et pinça ses lèvres pour ne pas répliquer. Voilà qu’il constatait l’évidence même maintenant, évidemment qu’il n’y avait pas que lui ! Le brun releva la tête vers le blond pour répliquer.

"C’est justement le but, Einstein."

Eikichi afficha un sourire crispé, signe qu’il commençait à perdre patience.  Quoi de mieux pour l’emmerder que le faire se prendre la tête avec quelqu’un, quand on savait qu’il avait les autres en horreur ? Quant au manque de verrou des chambres, il avait oublié le moment où ça le concernait.

"Ca c’est pas mon problème."

Qu’il les range dans une boîte qui se ferme à clé avant de sortir, s’il y tient tant que ça. Et en plus il lui fait des menaces ! Censées lui faire peur peut-être ? Il comptait invoquer une de ses figurines pour lui faire la morale ? Ca allait être sa faute en plus ? Dans le genre foutage de gu**le, on est bien là ! Eikichi se redressa sur sa chaise pour se tourner complètement vers le blond.

"Tu commences à me les briser. Alors tu vas reprendre ta figurine et me foutre la paix. Il a pigé Binoclard de Vinci ?"

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J’suis pas obligé mais ça m’gonfle qu’il insiste comme ça. Pas comme si je devais déjà supporter les quelques messes basses qui se demandent ce qu’un bouseux comme moi fait ici. Ils sont partout, ces abrutis de gosses de riches. Si je pouvais désactiver mes oreilles à ces conneries. D’habitude j’y arrive, mais le nombre de bouches qui battent, comparées à mon ancienne école, a triplé, ce qui me facilitent pas la tâche.

"Ben lâche-moi et j’le serais pas."

J’y mets pas du tout mien et j’en ai pas plus envie qu’ça. De toute manière, il a beau dire, ça n’a pas l’air de l’offusquer plus que ça. J’vais lui accorder son self control. Sa remarque ne me concerne pas, j’ai l’un des coins chambres le plus vide du dortoir.

"J’ai rien qui mérite d’être volé, ça risque pas."

Si on pouvait abréger, maintenant que mon partenaire de shogi est enfin revenu. Quoi qu’il lâche pas l’morceau purée.

"Ouais, et il savait peindre aussi."

Bon ok, c’est gratuit. J’ai pas bien regardé sa figurine parce que j’m’en tape mais elle avait pas l’air dégueu. Je recommence à jouer, puisque c’est mon tour et ignore la binocle. J’espère qu’il va s’barrer.

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Pourquoi était-il encore là ? C’est bon, il avait récupéré sa figurine, Eikichi lui avait fait savoir qu’il n’en avait strictement rien à faire, alors que voulait-il de plus à la fin ? Ce qui était réellement fatiguant, c’était ce genre de personne qui ne savait pas lâcher le morceau. Eikichi ne faisait aucun effort, vrai, et après ? Qu’il aille dans sa chambre continuer à peindre et l’oublie. Simple comme bonjour.

Libre à lui de penser qu’il n’y avait rien de valeur chez lui, ce n’était pas comme s’il le connaissait ni que le lycéen faisait en sorte qu’on l’apprécie.

"Si tu l’dis."

Son ton plat témoignait d’à quel point il était touché par ses paroles. Sa pièce de shogi mis hors d’état celle de son adversaire et le brun pensa à son coup suivant si tout allait comme il le souhaitait. En même temps, il ne perdait pas le fil avec môsieur-le-peintre. Jaloux, lui ? La bonne blague. L’art ne l’avait jamais intéressé, avec tout le respect qu’il avait pour les artistes.

"T’as raison, j’suis super jaloux. J’crois qu’on s’est tout dit."

S’il attendait une gentillesse de sa part ou quelconque remise en question, Paul pouvait toujours courir.

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