[TERMINE]That’s how we roll

Mh. Une personne qu'elle n'aime pas, c'est logique. De mon côté, si je me fais pat-pat, je pense gronder comme un chien même si c'est une personne appréciée. Je trouve ça infantilisant et déplacée. Alors pourquoi Maya me provoque autant ?

Un seul moyen de le savoir.

La blonde pense sûrement être en compagnie de quelqu'un de trop timide pour le faire. Je vais lui faire voir ! Je pose délicatement mon burger sur l'assiette, m'essuie les doigts avec une serviette, et prend une grande inspiration pour me donner courage.

Feignant la confiance en soi, je dresse la main au-dessus de sa tête ! Et enclenche la descente sur la piste d'atterrissage. Du bout des doigts, j'effleure d'abord la cible, avant de plonger en piquet et toucher le haut de son crâne avec un peu de fermeté.

Un pat-pat gauche tout rigide et embarrassé, par quatre fois, tant je suis le point d'imploser, et de disparaître sous la table. Je croise ses yeux dorés – comme ses cheveux, me dérobe de son regard en détournant la tête, et en enlevant ma main.

Je l'ai fait, j'ai réussi, encore une victoire !

La réaction de Maya, ce petit « Nyah » me prend totalement par surprise. Au début, ça me fait sursauter, puis je réalise la bêtise de la situation, et ça m'arrache un rire spontané, la main devant la bouche. Puis je réalise où on est, et je m'arrête de rigoler, gênée.

Du coin de l’œil, je réalise ne pas être la seule à être embarrassée ; la blonde a l'air de l'être tout autant. Alors ça me rassure un peu, et j'attrape mon burger pour changer un peu d'air. Je croque dedans tandis qu'elle me provoque en disant de m'entraîner :

« Au moins, j'ai la moyenne... pour m'améliorer, faut pratiquer, non ? »

Pas forcément avec elle, peut-être les filles.

Un peu étonnée, je penche la tête sur le côté. Je ne vois pas trop pourquoi elle pose cette question. Après tout, elle sait ô combien je suis timide. Et qu'il y a peu de personnes avec qui je pourrais pratiquer ça, sans que ce soit gênant.

« Pas avec toi déjà ! »

Okay, ça sonnait mieux dans ma tête. Mais j'ai mes raisons, totalement valables et honnêtes. Je veux qu'elle soit surprise de mes efforts dans la pratique du tapotage de tête. Ce n'est pas en le faisant avec elle, à moitié voire totalement gênée qu'on y arrivera.

« Je ne sais pas trop mais je vais bien trouver... peut-être les filles... »

Partie comme je suis, je marmonne plus à moi-même qu'à Maya :

« Enfin, le pat-pat, c'est plus un truc de garçon, non ? Alors ce serait peut-être judicieux de demander conseil à un d'entre eux »

Même si à part mon frère, je ne vois pas qui.

Bête que je suis ! Maya se hérisse à la mention des garçons. Sans surprise, une moue boudeuse s'esquisse et s'efface tout aussi vite de son visage. Maintenant, faut que j'arrive à lui expliquer mon ressenti sur le tapotage de tête.  

« Enfin... je veux dire... dans les animes, c'est presque toujours les garçons qui pat-pat la tête d'une fille. »

Ce n'est pas tout, je dois également évoquer le contraire, et lui faire comprendre mon point de vue. Je suis beaucoup influencée par les animes regardés, alors dans la réalité peut être tout autre. Mais Oswald lui, m'avait pat-pat, et ça m'avait pas plu.

« Tandis que le pat-pat chez les filles, c'est plus pour les gamins ou gamines... »

Pour ça que je trouvais super infantilisant !

Obulah ! Fait-elle exprès de comprendre tout à l'envers ? Ce n'est guère la première fois que ça arrive, et franchement, ça commence un peu à me fatiguer d'être autant incomprise. Je ne dis rien, mais forcément, je n'en pense pas moins.

« Bah, non ? Dans cette situation, c'est moi le garçon... »

Allez, réfléchis un peu Maya au lieu de tout comprendre de travers ! Le blonde s'est fait pat-pat, donc elle est la receveuse et par extension la fille ! Quand elle laisse entendre le tapotage de tête, c'est un truc en amies... ça me laisse pensive. En ai-je déjà fait un à Tsu-, ou même à Hina ?

En tout cas, je ne m'en rappelle pas.

« Si c'est ce que tu penses... »

À son pas de soucis, je sens une petite rancœur dans son propos. Ne serait-elle pas jalouse à l'idée de ne pas être celle avec laquelle je m'entraîne ? Ça semble un fou comme raison, mais après tout, j'ai bien été envieuse quelques minutes plus tôt.

« De toute façon, c'est stupide de vouloir s'entraîner ça... ce n'est pas comme si c'était important. Mais si c'est ce que tu veux, on pourra recommencer ? »

Comme faire machine arrière à mes propos.

MAIS ! Préciser quoi ?! C'était pourtant clair, je parlais d'un garçon le faisant, et non le recevant. Je suis un peu gavée, alors je me défoule sur mon burger sans rien ajouter de plus. Parce que si je le fais, ce ne serait pas très urbain et on risquerait de se prendre la tête.

Ou alors, c'est déjà trop tard.

Sûrement.

Probablement.

Sa réflexion sur le vouloir me conforte dans cette sensation d'ambiance de merde. Une fois encore, je préfère me taire, et mange en silence. Parfois, j'ai l'impression de l'aimer autant que je la déteste. Et Kami-sama sait ô combien je la trouve insupportable.

Surtout que... Si elle est aussi ennuyante en temps que simple amie, comment serait-elle en couple ? Serait-elle plus arrangeante, ou au contraire, encore plus agaçante ? Vu comme c'est parti, je ne le saurais probablement jamais, et ce n'est peut-être pas une si mauvaise chose.

Sans un mot, sans un bruit, je soupire.

Tranquillement en train de me manger mon burger – l’appétit absent, je me referme un peu sur moi-même. C'est épuisant toutes ses disputes à longueur de temps. Ça l'est encore plus en sachant les sentiments éprouvés pour elle. À croire que nos caractères ne collent pas.

À sa question, je sors de mes pensées, un peu perdue. Ah ! Maya parle du burger, évidemment. Je croque le dernier bout, puis m'essuie les doigts sur les serviettes. J'ai mangé sans prendre de plaisir, agacée par l’ambiance qui s'était installé.

« J'ai mangé mieux, et toi ? »

Que dire de plus ? Je marmonne un peu, pas très sereine, et espérant un changement d'ambiance  :

« On oublie tout ça ? »

Je tourne des yeux fatigués vers elle, blasée.

Tant mieux si elle a apprécié le repas. C'était plutôt basique comme burger, et j'ai l'impression d'avoir manger au-delà de mon appétit. Pas au point d'en avoir la nausée, mais d'avoir un poids sur l'estomac. C'est ça de se forcer à engloutir quand la faim n'y est pas.

« C'est rien, c'est passé »

Je lui offre un sourire réconfortant. J'ai commencé les hostilités sans le vouloir en parlant de Yuna, et de mon envie de la rencontrer. Puis le pat-pat, c'est aussi moi qui est initié le dialogue, où on s'est perdu entre les garçons d'anime et les vrais.

« Même si on se chamaille, je passe toujours du bon temps avec toi... et toi ? »

Ça me rendrait bien triste si c'est un non.

La miss corrobore mes propos en ajoutant un « c'est rien du tout » au reste de ma phrase. Je hoche vaguement la tête à ce déni de situation. Mieux vaut fermer les yeux sur les disputes, et s'accrocher au bon moment, c'est tout ce qui compte.

Notre relation est loin d'être saine, non ? On se chamaille sur des sujets anodins. Je sens toujours la rancœur de Maya sur ce que je lui ait dit ce fameux jour... Même si j'aime malgré tout ça nos moments passés ensemble.

C'est compliqué. Parfois trop, souvent fatiguant, parfois revigorant.

Mais... je suppose une chose, si on continue de se fréquenter, mes sentiments vont forcément évoluer... pas forcément dans le bon sens, ou celui que je souhaite. Si on pouvait tout mettre de côté, on garderait notre amitié complice du début.

Une chose est sûre, j'ai un peu peur de ne plus réussir à supporter ces chicanes à longueur de temps. Ou j'ai peur de ne pas réussir à tourner tout simplement la page... après tout, on a arrêté de se parler pendant presque deux mois...

Je pense un peu trop à moi dans cette histoire. Qu'en-t-il de Maya ? Où en sont ses sentiments ? Probablement morts et enterrés dans les bras de Yuna. C'est sûrement mieux ainsi.

Puis, je réalise être restée longtemps silencieuse, perdue dans mes pensées.

« On rentre ou tu veux continuer à jouer ? »

Ça m'étonnerait que ce soit le second choix.