« Mais qu’est-ce que je suis en train de faire ? » Pensait-elle, aussi amusée que troublée.
Savourant l’absurdité du moment, Tsumugi se penche vers le miroir, le pinceau, chargé de pigments sombres, tremblant légèrement entre ses doigts. Elle s’applique à épaissir ses sourcils, traçant des traits durs qui rompent totalement avec son image habituelle. Fronçant les sourcils, elle accentue les rides sur son front pour se donner un air plus menaçant, presque effrayant. Prenant une pause, posant ses ustensiles de défiguration, elle esquisse un sourire nerveux, le cœur battant. Jamais elle n’aurait imaginé se maquiller ainsi, pas même pour Halloween. Plus habituée aux robes pastelles et aux accessoires délicats, elle se serait plutôt imaginée déguisée en vampirette, en sexy catwoman, en enchanteresse, peut-être même en enchantix. Cela lui aurait mieux convenu. Sa poudre aurait servi à autre chose qu’à tracer des ombres sous ses yeux.
Avec ce maquillage sombre et pour l’heure un peu ridicule, Tsumugi réalise qu’elle est en train de franchir une étape. Si le poids du maquillage qui s’accumule sur ses paupières ne varie pas, son apparence, elle, en est volontairement changée. Et pas pour le mieux. Face à elle-même, au-delà de son apparence, elle prend conscience que chaque trait tracé est une cassure faite à un rôle qu’elle s’impose depuis bien trop longtemps. Un sourire calculé, des vêtements impeccables, une image qu’elle veut sans faille, armure contre les regards, contre le rejet. Toujours chercher à plaire, à être accepté. Éviter les jugements. Sa vision se brouille devant ce visage étranger. Grotesque même. Elle ne s’est pourtant jamais sentie si libre de son apparence. Une permission d’être imparfaite. Une permission de se montrer telle qu’elle est dedans. Pas monstrueuse non ! Mais une fille drôle, décoincée, décalée. Elle pose sa poudre comme on pose un fardeau. Ce soir, elle jouera un nouveau rôle, sans être belle, ni douce, ni même elle-même, mais demain, face aux autres, elle s’en fait la promesse, sans masque, ni fard, sans être tirée à quatre épingles, elle se retrouvera.
Elle en est quasi certaine : ses amis les plus proches ne verront sûrement pas la différence. Son cercle l’accepte déjà telle qu’elle est, avec ses insécurités et même sans artifices. Parce que même hideuse, elle sait que Nolan ne lui refusera pas un baiser. Parce que Pablo et Seito seraient plus occupés à rire qu’à relever ses défauts. Parce qu’Emma est bien trop douce pour porter un jugement négatif sur elle. Parce qu’ils sont simplement habitués à elle, à ses rires bruyants, à ses faux pas, ses idées loufoques, parfait échos aux leurs. Parce qu’ils sont son quotidien. Son cœur se serre à cette dernière pensée. Ah… Voilà une ombre à son tableau et la mélancolie, la submergeant, menace de ruiner tout son travail. Elle s’en voudrait presque de ne pas avoir intégré Nissa et Hina à la photo mentale de ses proches. Une omission, loin d’être une négligence, lui rappelle simplement la douloureuse coupure qu’elle ressent.
Tsumugi s’est toujours imaginée qu’elles formaient une unité. NiNaGi. Elle croyait si fort que cette amitié serait toujours la pierre angulaire de sa vie. Combien de secrets et de rêves d'avenir ont-elles partagé lors de leurs conseils de guerre ? À croire que c’était leur distance qui leur permettait de rester proches. Comme si leur nouvelle proximité n’avait fait qu’espacer leurs échanges et amoindrir leurs profondeurs. À moins que ce ne soit cette distance qui masquait la faille. Des détails. Puis des silences. Comme les pages d’un livre que l’on tourne et qui mènent inexorablement vers la fin d’un chapitre. Il n’y a pas eu de disputes. Pas eu de longues conversations douloureuses. Juste un écart qui s’est creusé, creusé, creusé, à coup de banalité et de sentiment refoulés… Le tout caché par le tapis de leurs souvenirs enfantins, maigre et frêle pont qui les empêche de perdre ce qu’elles avaient été ensemble. Elles ont changé. Toutes.
Elle ne fermerait cependant pas la porte à ses amies d’enfance. Hina et Nissa garderaient toujours une place importante dans le cœur de Tsumugi. Mais elle doit aller de l’avant, profiter des liens qu’elle tisse et avancer. Ce n’est pas une trahison, c’est une évolution qu’elle se doit d’accepter. Elle continuera simplement de grandir, de se faire sa place dans le monde qu’elle se construit tout en portant en elle l’écho des rires passés, le souvenir de promesses chuchotées et l’espoir de prochaines retrouvailles.
Et maintenant ? Shan Yu doit finir de se faire une beauté.
#terminé
Recensement des membres jusqu'au 30 Novembre!
Les comptes non recensés seront supprimés lors de la maintenance alors n'oubliez pas de poster dans ce sujet !
Les comptes non recensés seront supprimés lors de la maintenance alors n'oubliez pas de poster dans ce sujet !
- Tsumugi SatoA l'université ; 1è année■ Age : 29■ Messages : 332■ Inscrit le : 17/10/2022■ Mes clubs :
Mon personnage
❖ Âge : 17 ans
❖ Chambre/Zone n° : U-3
❖ Arrivé(e) en : Début Novembre 2017
Poudre aux yeux
Solo
Le 31 Octobre 2018
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum