Equations faciles pour les nuls | Alex O'Hara

Le mardi 06 novembre 2018 – Bibliothèque – 17h50



Bon. J’y comprends rien.

Il me dit de résoudre dix équations de second degré. Mais je n’ai toujours pas saisi ce que c’était que ces x et ces ². Comment ça se prononce déjà, ce petit deux pas écrit sur la ligne ? Pourquoi il y a des lettres mélangées avec des nombres ? Et surtout…

Pourquoi on me demande de résoudre quelque chose alors qu’il y a déjà un « = 0 » ou « = - 6 » ? Ça veut pas dire que c’est déjà égal à zéro ou à six ?

Je fais la moue en regardant les places vides à mes côtés. Mes potes m’ont laissé tout seul. Ils ont fait leurs devoirs du jour en dix minutes. Sous mon regard aussi perdu qu’envieux, ils ont gentiment essayé de m’expliquer tout bas ce que je ne comprenais pas.

Puis chacun s’est trouvé une excuse pour partir en vitesse quand j’ai demandé pourquoi on appelait ça des équations de « second degré » alors qu’il n’y a manifestement pas de notion de température là-dedans.

Les symboles, ce sont °C ou °F, je suis pas con, j’ai vérifié dix fois, j’en vois pas dans ce devoir…

D’un côté, j’ai l’impression de n’avoir jamais vu ce cours. De l’autre, j’ai la sensation que j’ai essayé de l’assimiler des tonnes de fois au collège.

C’est comme d’habitude… Dans toutes les matières, pour tous les cours, je dois galérer plus que les autres, faire plus de recherches et d’exercices pour comprendre… Mais il se passe toujours la même chose après que j’aie réussi à capter et mémoriser : j’oublie tout au prochain cours que je suis.

Bon. Étape une.

Je me dirige vers les bouquins de maths comme un zombie. Dos courbé, yeux vides, bouche complètement détendue car incontrôlée. Mes pas sont lents et témoignent de ma fatigue et de mon ennui. Et pourtant, on n’est que mardi.

J’arrive dans la bonne zone, et cherche le sujet de mon devoir.

Ah. Forcément.

Il est là, le bouquin que je veux. Tout en haut. « Équations faciles pour les nuls ».

Je soupire tout doucement en continuant de le reluquer, et mon cou étiré en arrière manifeste sa douleur.

Je suis trop petit.

Pile à cette pensée, j’entends un bruit sur ma droite, comme un gros bam et patatra. Mais je m’en cogne.  

Il me faut un marchepied.

Je baisse la tête aussi lentement que je l’ai levée puis regarde à gauche, à droite.

Là.

Sans me presser, je m’avance dans le couloir, prends garde à ne pas écraser les bouquins qui jonchent le sol et récupère le marchepied.

Avec les deux mains parce que je n’ai aucune force.

Je me retourne pour revenir tout près du Livre Saint.

...Sans me douter une seconde qu’une étudiante à la coupe au carrée, plus grande et baraquée que moi, me regarde avec un mépris qui pourrait tuer.