[18+] Every good story has an end [Ft. Tessa]

C'est vraiment très étrange toutes ces émotions contradictoires qui se percutent en moi. Je suis totalement incapable de savoir exactement ce que je peux ressentir à cet instant. Bien sûr que ça me fait plaisir de voir que Tessa veut toujours de moi. Et bien sûr que la culpabilité n'est pas loin non plus. Vis à vis de Chandini, oui, mais aussi de Tessa. Si elle accepte, c'est très clairement que ses sentiments à mon égard sont bien réels. Encore. Autrement, je suis persuadé qu'elle m'aurait déjà repoussé depuis longtemps et m'aurait bien fait comprendre que j'avais intérêt à m'ôter toutes ces idées de la tête. Mais ce n'est pas le cas.

Elle est là, face à moi. Toujours aussi belle. Aussi attirante. A m'accepter malgré tout ce qui s'est passé entre nous. Malgré ma situation actuelle. Il me faut pourtant quelques secondes. Des secondes pendant lesquelles mes yeux parcourent son visage. Où mon cœur continue à cogner trop fort dans ma poitrine. Où mon cerveau est incapable de prendre une décision. Alors comme bien souvent, je finis par l'ignorer. C'est à ce moment que je franchis le dernier espace qui nous séparait encore pour revenir chercher ses lèvres. D'abord doucement, avec cette légère retenue liée à notre situation. Parce que non, clairement, on ne devrait pas.

Tout comme je ne devrais pas sentir ma poitrine se gonfler autant de bonheur à ce nouveau contact. Pourquoi est-ce qu'il faut que je sois tellement attiré par elle ? Totalement incapable de résister, ma respiration continue son accélération à mesure que j'approfondis ce baiser. L'humidité de nos lèvres qui continuent à se chercher achève de m'ôter toute pensée raisonnable. Si cela doit être la dernière fois... Je m'abandonne complètement à toutes ces sensations qui m'envahissent.

Et très vite mes mains se mêlent à la partie. D'abord posées sagement dans son dos pour assurer une proximité entre nous, elles remontent à sa nuque, venant chercher le contact de sa peau, glissant au gré des lignes dessinées par sa robe. Si cette petite voix qui continue à m'avertir que tout cela est une très mauvaise idée raisonne toujours en arrière fond de mes pensées, je n'arrive pas à l'écouter. Mais je sais que je ne dois pas être le seul à l'entendre. C'est bien la seule raison pour laquelle j'y prête encore attention. Le souffle court, je me recule légèrement. Juste quelques centimètres pour pouvoir observer Tessa. Je veux la voir. M'assurer qu'elle va bien. Qu'elle est toujours d'accord avec ce qui se passe en ce moment.

- "Tu... Es sûre que tu n'es pas pressée ?"

A défaut de trouver plus pertinent, la situation se passant probablement de mots, je pose la première question qui me traverse l'esprit. Mais si tout mon corps en meurt d'envie, le sourire presque gêné que j'affiche à cet instant ne laisse pas place au doute. Oui, je sais que c'est mal...

J'arrive à avoir un petit rire lorsque Tessa évoque notre karma. Il y a bien longtemps que j'ai fait une croix sur l'espoir qu'il soit un jour en ma faveur. J'ai une liste de rattrapage qui me prendrait toute une année. Impossible. Mais pour Tessa, je sais que c'est différent. Pourtant, si elle ne me rejette pas, alors actuellement, je suis incapable de changer de voie. Cette direction que l'on vient de prendre, elle mène sûrement droit dans un mur. Et je crois que je n'ai jamais été aussi heureux de foncer vers l'arrêt brutal.

Mon sourire se fait plus doux alors que pour une fois, je ne vois pas quoi ajouter à cette réponse. Non. On est tous les deux parfaitement conscients de ce qui se passe en ce moment. Ça se passe de commentaire. Alors, je l'embrasse à nouveau. Et cette fois, je sais qu'il n'y aura pas de marche arrière.

Nos lèvres se retrouvent, nos corps se rapprochent, l'ambiance se sature d'hormones relâchées. Pourtant, je suis incapable de ressentir cette légèreté dont je garde le souvenir lors de nos fois précédentes. Pour je ne sais quelle raison, je revois Tessa lorsque, il y a plus d'un an déjà, elle m'annonçait la raison pour laquelle elle n'était plus avec son ex. Il la trompait. Le parallèle avec ce qui se passe actuellement se fait sans difficultés. Et malgré cela, la passion qui se dégage de nos échanges actuellement est bien plus forte qu’auparavant, comme si tout cela ne me poussait qu'à accentuer encore ces baisers échangés. Jusqu'à ce que ce soit beaucoup trop pour que je supporte encore ces vêtements entre nous.

Encore plongé dans cette bulle de bonheur qui s'est formée autour de nous, je passe mon bras derrière Tessa pour pouvoir la serrer un peu plus contre moi alors qu'elle revient naturellement à mon contact. Ma poitrine se gonfle au rythme de ma respiration qui tente de retrouver une cadence plus viable et mon esprit se focalise assez facilement sur la sensation de ces lignes dessinées aléatoirement par les doigts de Tessa. Si je ne prends que cette image, tout pourrait être absolument parfait. Mais évidemment, il y a d'autres paramètres qui donnent une représentation beaucoup moins idyllique. Et parmi ceux-là, le fait que dans quelques minutes, heures tout au plus, elle ne sera plus à Kobe. Ce qui transparait dans les paroles de Tessa.

- "Il y a beaucoup de choses que j'ai faites dans ma vie et sur lesquelles j'aimerais pouvoir revenir, mais de m'être réconcilié avec toi, ça n'en fait sûrement pas parti. Quoi que ça ait pu impliquer."

Mes yeux d'abord rivés sur le plafond reviennent se poser sur la miss à mes côtés. C'est vrai qu'on n'en serait pas là. A avoir transgressé l'une de ces règles principales imposées par la morale. Mais je ne le regrette absolument pas. Je ne dis pas que je ne vais pas me sentir mal en y repensant. Mais je sais très bien pourquoi je l'ai fait. Je sais que ce n'est pas une simple envie passagère qui m'est venue du fait que je n'ai pas pu assouvir ce genre de besoin depuis deux semaines parce que ma copie est trop loin. Non. La raison est bien plus complexe.

- "Dans tous les cas j'aurais eu beaucoup trop de mal à te voir partir. Alors, je préfère me dire que, on a pu en profiter une dernière fois, plutôt que d'imaginer comment aurait pu être cet instant et regretter qu'il ne se soit jamais produit. Parce que... Je sais que tu ne dois pas m'imaginer comme le mec le plus sérieux mais... Je t'assure que tu es la seule avec qui j'aurais pu en être là."

Je la serre un peu plus contre moi à la suite de ces mots, ce poids qui avait quitté ma cage thoracique revenant à la charge. Je me suis toujours dit que le jour où je sortirai enfin avec Chandini, ce serait parce que j'étais sûr de pouvoir résister à toutes les tentations auxquelles je cédais si facilement auparavant. Je n'avais juste pas anticipé que mes sentiments pour Tessa refuseraient de disparaitre aussi facilement.

C'est sûrement bête, mais ça me fait du bien d'entendre Tessa me dire qu'elle me croit. Je sais qu'avec tout ça, mon image auprès d'elle ne sera sûrement pas au beau fixe, mais je ne veux pas qu'elle pense que j'ai pu me comporter de cette façon avec d'autres personnes. Alors oui, je suis content de voir que ce n'est pas ce qu'elle a l'air de croire. Évidemment, je ne rate pas cette référence à ce qui s'est passé avec Neil lorsqu'il est parti. Mais ça ne me semble pas être une très bonne idée que de réagir à cette remarque. Je me doute qu'elle aura du mal à l'accepter un jour. Et surtout, j'ai parfaitement conscience que si ce qu'elle a vécu avec Neil était franchement compliqué, je ne lui pas offert bien mieux. Ce qui me fait un léger pincement au cœur.

Alors quand elle me fait remarquer que l'heure a sûrement un peu trop avancé, j'essaie de me motiver à bouger. Mais c'est compliqué. D'autant plus que Tessa n'a pas l'air d'en avoir beaucoup plus envie. Je me tourne vers elle, puis après quelques secondes, c'est avec un rire franc que je réponds.

- "Tu n'as jamais été aussi peu crédible !"

Je me penche vers elle pour l'embrasser à nouveau. Doucement. Juste le temps de retrouver un peu ce contact. On n'est plus à ça prêt hein.

- "Mais, tu as raison ! Ça va déjà te faire arriver tard à Tokyo tout ça, je ne voudrais pas que tu t'y balades à des heures indues. Pas à cause de moi en tout cas !"

Je passe une dernière fois mes doigts dans ses cheveux, avant de me faire violence pour me relever. Bien sûr que je pourrais passer la nuit entière avec elle. Que je pourrais l'inciter à rester encore un peu. Encore une fois. Mais je sais qu'elle ne peut pas dormir simplement dans cette chambre ensuite. Elle a encore du trajet. Même si je me doute qu'elle est accompagnée, je ne veux pas qu'elle soit totalement crevée.

- "Promis, cette fois je te laisse te préparer sans t'interrompre ! Tu veux que je t'aide à faire quelque chose ?"

Même si a priori, tout a l'air déjà bien prêt, je lui propose naturellement de lui filer un coup de main.

J'ai un petit doute lorsqu'elle me parle de sa vie nocturne. Peut-être qu'elle ne compte pas en avoir, mais j'ai comme l'impression qu'en vivant avec Emily, elle va sortir plus d'une fois ! Oui, quelque part je suis assez content de savoir qu'elle va vivre avec Emily. Même si je sais que ça signifie aussi que les choses vont totalement changer entre nous sûrement. Oui, cette soirée a vraiment un goût particulier. Alors je me contente de tirer à peu près les couvertures du lit (lol le personnel virera tout ça demain matin mais c'est pas grave, c'est bien pour faire genre je suis occupé à autre chose que regarder Tessa se rhabiller). Et quand elle revient finalement, comme s'il ne s'était jamais rien passé les minutes précédentes, évidemment que je n'ai pas du tout envie de la laisser comme ça. Quand est-ce que je vais avoir envie de la laisser partir cela dit ?

- "Si j'ai le droit de venir, alors ce sera avec plaisir !!"

Je l'aide à porter les dernières affaires qu'il lui reste jusqu'en bas. De toute façon, ce n'est pas comme si j'avais prévu autre chose pour ma soirée alors je peux bien prendre le temps de l'accompagner jusqu'au bout. Parce que je sais qu'une fois à l’aéroport, je ne pourrais pas venir avec elle plus loin.

- "Et ne t'en fais pas, je vais m'arranger pour rentrer ensuite ! Tu ne vas quand même pas m'organiser en plus mon retour alors que tu dois avoir beaucoup d'autres choses à penser ?!"

Je reprends le ton de la plaisanterie pour poursuivre, parce que même si tout ce qui vient de se passer était bien trop agréable, je sais qu'il va falloir qu'on retrouve un terrain plus neutre. Ce qui ne me fait pas particulièrement plaisir, mais je crois que de savoir qu'il était possible qu'on vive ce genre de moment tous les deux, ça ma fait étrangement plaisir. Je sais, je ne devrais pas, mais c'est comme ça.

- "Tu m'enverras quand même un message quand tu seras arrivée dans ton nouvel appart ?"

Je pose la question pendant qu'on sort de l'hotel pour rejoindre le chauffeur appelé par Tessa. J'essaie de faire sonner cette question de la façon la plus naturelle possible, enlevant ce côté trop maternel typique (pourtant ce n'est pas comme si j'avais un jour connu cet exemple) mais je me rends bien compte que ça doit être un peu chelou quand même. Mais oui, je sais qu'elle a du trajet, même si elle n'a qu'à se laisser conduire, eh bien je me sens un peu coupable de l'avoir autant retardée. Oui, seulement parce que je l'ai mise en retard.

Je hoche la tête. C'est bien parce qu'il risque d'être tard que je lui demande de m'envoyer un message. De toute façon, ce n'est pas comme si je risquais de vraiment réussir à dormir cette nuit. Mais ça, ce n'est sûrement pas un problème. Pas pour le moment en tout cas. On monte dans la voiture, et c'est parti direction l'aéroport ! C'est bizarre d'y penser. J'ai le cœur un peu lourd en fermant la portière mais j'essaie de ne pas trop y penser. Parce que sinon, ça risque d'être intenable lorsqu'elle montera à bord de son avion. Alors oui, repartir sur une discussion plus légère est probablement la meilleure chose à faire.

- "Ahah c'est une grande question ça ! Je n'ai pas vraiment de programme de défini. Mais, souvent dans ces cas là, je finis sur un terrain avec un ballon en main !"

Je ne vais sûrement pas prétendre me reposer. C'est un concept que je maîtrise très mal. Et je sais que demain sera une journée compliquée et le basket est probablement la chose sur terre qui arrive le mieux à me faire oublier mes soucis. Ce n'est pas pour rien que j'en suis devenu totalement accro.

Il y a un peu de trajet mais au final, les minutes passent vite. Trop vite. Et voilà déjà les pistes d'aviation qui se dessinent par la fenêtre, illuminées au milieu de la nuit qui est désormais totale. Je sens ma gorge se serrer lorsque notre chauffeur se gare et je sais qu'il va falloir que je déploie toutes mes forces pour empêcher les larmes de couler. Alors je refoule toutes ces émotions au plus profond. Je sais qu'un homme ne doit pas pleurer. Sur ce point au moins, mon père a réussi à obtenir quelque chose de moi.

- "Bon, j'imagine que maintenant, on n'a plus trop le choix. Il va falloir se dire au revoir pour de vrai."

J'essaie de faire sonner cette phrase aussi légèrement que possible alors qu'on se rapproche de son prochain moyen de transport, mais c'est compliqué. Je sais que ce n'est pas la dernière fois qu'on se voit. Tokyo, ce n'est pas si loin. Malgré tout, ça reste difficile.

C'est vraiment bizarre comme ambiance. A la fois pesante mais en même temps, je ne sais pas, il y a quelque chose de... Mélancolique peut-être ? Je ne sais pas, c'est la première fois que je me retrouve dans ce mood. C'est comme s'il y avait quelque chose d'un peu irréel. Je ne sais pas si c'est juste que je ne réalise pas, ou que mon cerveau refuse de voir la réalité. Ce qui ne serait pas si étonnant me connaissant.

Quand Tessa m'attire un peu à l'écart de notre trajectoire pourtant rectiligne, je ne m'y attendait pas. Et là, je récupère bien vite toute mes capacités habituelles. Je refocalise mon attention sur elle et ses mots me touchent directement. Parce que je sens bien que pour elle non plus, ce n'est pas facile. Ce qui me fait à la fois très plaisir, mais en même temps, évidemment que je ne veux pas qu'elle soit mal à cause de moi. C'est donc avec un sourire que je veux le plus rassurant possible que je lui réponds.

- "Bien sûr que tu y a droit. J'aurais même été plutôt déçu que tu n'en veuilles pas."

Je m'approche pour la prendre dans mes bras, la serrer fermement dans mes bras. Profiter encore une fois de ce contact. Une dernière fois.

- "Profites en bien. Amuse toi. Mais fait aussi attention à toi."

Et après un long moment passés ainsi, je réussi à reculer légèrement le haut de mon corps, mais mes bras restent tout autour d'elle malgré tout. Tout est agité en moi. Il se passe actuellement un mélange totalement inconnu. Je ne saurais même pas dire si je me sens bien ou mal. Je sais juste que c'est hyper fort. Beaucoup trop fort pour que mon corps tienne longtemps. La voir, comme ça, juste avant qu'elle ne parte.

Ma main dessine doucement les lignes de sa mâchoire avant d'aller se perdre dans son cou, moment où je reviens l'embrasser. Le goût de ses lèvres, je ne devrais pas l'aimer autant. La douceur, la chaleur de sa peau. Son odeur. Tout va manquer. Affreusement me manquer. Mais en même temps, si elle n'était pas partie, est-ce que j'aurais eu l'occasion d'avoir un nouvel aperçu de tout ce à quoi je n'ai plus le droit ? Peut-être pas. Ou bien, peut-être que ma relation avec Chandini se serait terminée de façon catastrophique. Je n'en sais rien. Je sais seulement que je veux faire durer cet instant au plus possible.

- "Je vais essayer."

J'aurais pu lui répondre par un promis moi aussi. Mais je suis incapable de suivre mes promesses alors, j'évite de trop en prononcer. Du moins, quand je sais que je n'ai pas envie de seulement balancer des paroles dans le vent. Et avec Tessa, je ne veux pas que ça se passe comme ça. Non mais je ne sais même pas comment réellement prendre soin de moi alors... Sauf que ce n'est pas trop le moment d'y penser. Non, il y a bien plus important.

Il y a ce baiser qu'on échange. Un baiser qui n'a rien à voir avec la passion qu'on a pu échanger plus tôt, mais qui est pourtant d'une intensité que je n'aurais pas soupçonnée par tout ce qu'il fait raisonner en moi. Mon cœur cogne beaucoup trop fort dans ma poitrine. Je sens les émotions remonter en moi et je dois me faire violence pour ne pas les laisser déborder. J'arrive à les bloquer pour qu'elles restent là, juste quelque part non loin de la surface. C'est difficile. Difficile de me dire que je dois la laisser partir. D'autant plus que je vois bien qu'elle non plus, n'en a pas spécialement envie.

Je ferme les yeux quand son front se pose contre le mien, un sourire doux prenant place sur mon visage à ses mots. Il y a tellement de choses que je ressens actuellement. Tellement de choses que j'aimerais dire. Et pourtant, je n'arrive pas à choisir le moindre mot. Comment est-ce que de simples mots pourraient traduire correctement tout ce qui peut se passer en ce moi actuellement ? Cette culpabilité qui se mélange au reste. Parce qu'elle n'a aucune raison de me remercier. Je n'ai rien fait correctement depuis le début jusqu'à aujourd'hui. Elle aurait toutes les raisons du monde de m'en vouloir. Et pourtant elle est là, à avoir du mal à me quitter. Je sais que je ne mérite pas tout ça.

- "Moi non plus."

Non, bien sûr que je ne risque pas d'oublier tout ça un jour. Si les choses ont été compliquées avec Chandini, je ne sais même pas comment les qualifier avec Tessa. On a passé tellement de temps à se fréquenter de façon tout à fait banale avant que les choses entre nous ne prennent une tournure aussi inattendue qu'intense. Je prends une grande inspiration, la gorge encore totalement nouée par les émotions, et pose doucement mes mains de chaque côté de son visage tout en reprenant mes distances. J'ai bien compris que c'est aussi dur pour elle que pour moi alors, pour une fois, j'essaie de me montrer suffisamment fort pour ne pas qu'elle soit celle qui fasse l'effort.

La vue de ces larmes qui ont coulé le long de ses joues me serre davantage le cœur. Je n'ai jamais voulu la rendre triste. Je ne veux pas être celui qui la fasse pleurer. Je ne veux pas être responsable de cette souffrance. Pas encore. Si je pouvais parfois encore avoir un doute qui subsistait sur la nature de ses sentiments pour moi, je sais que je ne peux plus en avoir aucun. Elle n'est pas ce genre de fille qui montre ses larmes. Mon pouce passe sur l'un des sillons laissés sur sa joue, comme pour tenter d'effacer la douleur exprimée par ces larmes.

- "Je n'aurais jamais pensé que ce soit si dur. Je suis désolé pour tout ce que j'ai fait de travers. J'espère vraiment que tu seras heureuse à Tokyo."

Parce que manifestement, ce ne sera jamais avec moi qu'elle pourra l'être. Je n'ai jamais eu beaucoup d'amour propre et très régulièrement je me déteste pour de multiples raisons. Mais je m'en suis rarement voulu à ce point. Parce que je ne mérite vraiment pas tout ce qu'elle me donne.

Ses mots ne font que confirmer ce que je savais déjà. Tessa est bien trop adorable. Elle est là, à essayer de me remonter le moral alors que c'est elle qui a beaucoup de choses à penser pour la suite. C'est moi qui devrait l'aider à avancer, par l'inverse. Alors je me reprends comme je peux, me forçant à mettre tous mes petits états d'âme persos de côté pour avoir l'air davantage sûr de moi.

- "Oui, j'ai vraiment passé de bons moments avec toi. Je suis vraiment heureux d'avoir pu construire tout ça avec toi."

C'est difficile. Presque impossible. Pourtant, il va bien falloir qu'on y arrive. J'oublie quelques instants tous ces petits problèmes avec moi et moi-même, pour me reconcentrer uniquement sur Tessa.

- "Évidemment.Dès que tu as une place dans ton emploi du temps, je m'y grefferais avec plaisir !"

Je souris. Un sourire qui est un étrange mélange de mélancolie, mais aussi, de bonheur. Je veux croire que ce soit la meilleure chose pour elle que d'aller à Tokyo. Elle a tout pour réussir. Et elle n'y est pas seule. Je n'ai pas le droit de lui compliquer la tâche encore davantage.

- "Tu devrais y aller ou ton chauffeur risque de commencer à se demander si tu n'as pas finalement changé d'avis."

Je reviens l'embrasser, comme l'un de ces baisers d'au revoir que n'importe quel couple pourrait échanger sur le quai d'une gare avant que l'un des deux n'embarque. La seule différence étant que nous ne sommes pas en couple. Et qu'on ne sait pas quand est-ce qu'on se reverra la prochaine fois.

Je l'accompagne jusqu'à la barrière, lui faisant un dernière au revoir. A partir de là, je ne peux rien faire d'autre que de la regarder s'éloigner, le cœur lourd. Cette soirée aura été bien trop intense et riche en émotions. Tout ce qui vient de se passer... Il va me falloir du temps pour tout enregistrer.

Quand Tessa disparait de mon champ de vision, je reste là encore quelques minutes. Je perds un peu la notion du temps. Je repense à beaucoup trop de choses. De ce qui s'est passé ce soir jusqu'à notre première rencontre. Il s'en est passé des choses oui. J'entends un moteur s'allumer. Beaucoup trop fort. Probablement elle qui décolle finalement. Le signal que je n'ai plus rien à faire ici j'imagine.

Ce soir, je ne compte pas dormir chez Akira. Il est hors de question que je passe les heures suivantes seul. Je serai incapable de le supporter. Tout commence déjà à s'agiter violemment en moi. Dans ma tête. C'en est presque douloureux. Je ressors de la zone de l'aéroport et prend les transports pour revenir vers le centre ville, les écouteurs branchés dans les oreilles. De la musique à fond pour parasiter mes pensées avant d'aider mon cerveau à lâcher prise à grand renfort d'alcool. Pas trop tout de même au début. Je veux être en mesure d'attendre ce message de Tessa qui m'assurera qu'elle est bien arrivée. Pour la suite en revanche... La nuit risque de me coûter un peu cher.