[Terminé][+16] Hostile retrouvaille - Pablo

Si y’a bien un truc donc j’ai envie là tout de suite, c’est d’une bonne douche. Etre bien tout propre parce que j’ai pris qu’une douche rapide dans les vestiaires, et puis aussi pour me détendre sous l’eau chaude. J’ai toujours kiffé ça, m’détendre sous l’eau. J’attrape ma serviette et la balance sur mon épaule, direction les sanitaires.

En chemin, même s’il est pas long, je m’arrête vite fait pour discuter avec l’un des gars de l’équipe de foot, puis m’fait chopper par le surveillant de ce soir qui me fait deux-trois rappels sur ma bonne conduite, histoire de ne pas faire d’histoires à la cérémonie demain. Je lui affiche mon plus beau sourire forcé et le rassure vite :

- Croyez-moi, vous m’aurez jamais vu aussi sage.

Avec le vieux qui va me coller au basque toute la journée, on m’aura jamais vu aussi silencieux et irréprochable que demain. Je grommelle à ce souvenir en filant vers les sanitaires et une fois devant, je tente d’ouvrir la porte, sans succès.

- Hey, c’est quoi ce…

J’force un peu mais ça résiste, alors les bruits et au rire gras en plus derrière la porte m’énervent rapidos.

- P*tain vous allez ouvrir la porte ou j’vous attend devant pour vous encastrer moi-même dedans quand vous sortez ?

Je grommelle assez bas pour éviter d’attirer l’attention du surveillant au bout du couloir, et la porte finit par s’ouvrir, sur un gars du club de baseball à qui j’parle pas souvent, qui a l’air bien emmerdé de me voir énervé et tente de me faire rebrousser chemin.

- Tu... Tu d’vrais revenir plus tard, Pablo…
- Et puis quoi encore, j’me douche quand j’veux. Bouge de là !

J’passe en force, le bousculant d’un bon coup d’épaule avec un regard dédaigneux et m’approche des douches, où je tombe sur un c*nnard  qui se recule après avoir frappé Yulian, qui a les fringues détrempées. J’lâche ma trousse de toilette et court vers Yulian pour passer ma serviette autour de ses épaules.  

- C’est quoi ce bordel ?!

Tenue de Pablo:

Si ça m’regardait pas, fallait faire ça ailleurs. N’importe qui peut entrer ici alors il est bien mal placé pour m’renvoyer d’où j’viens. Croire que j’vais repartir sans m’interposer, et d’autant plus s’il s’en prend à un d’mes potes, il s’fourre le doigt dans l’œil. Et les paroles de Yulian souligne d’autant plus le problème. Un différent, ça s’règle en tête à tête avec le concerné, pas à trois contre un.

- On remet simplement ton pote à sa place, c'est une erreur de la nature ! Il est dégoutant ! Ses parents doivent avoir honte de l'avoir !

J’reporte mon attention sur Yulian san trop comprendre à quoi l’autre gars fait allusion, et le visage du Russe m’inquiète. Je l’ai jamais vu comme ça. Aussi émotif, aussi énervé surtout. J’sais ce que ce genre de visage annonce, alors j’baisse aussitôt la tête pour observer la main de Yulian, se resserrer à en blanchir les jointures. Quand il menace l’autre, j’place machinalement la main sur son bras et m’avance devant lui d’un pas pour m’interposer. J'doute pas de ses talents pour donner des coups, suffit d'voir son jeu de jambe au foot, mais j'veux pas non plus qu'il noircisse son dossier pour ces idiots. Les mains dans les poches, j'prend l’autre gars de haut :

- Et alors quoi ?

J’hausse un sourcil, le regard dédaigneux et ajoute :

- Voir Yulian en un contre un ça te si met mal à l’aise que t’as senti l’besoin d’faire appel à tes deux chiens d’garde pour t’en donner le courage ?

J’vois bien que ce que j’lui dit lui plais pas. Les traits de son visage se crispent, et le voir rompre la distance pour se planter nez à nez contre moi montre bien que ça le touche dans son égo.

- Tu vas faire quoi, m’en foutre une ? Tsch. Si ma présence te gêne, c’est que tu sais très bien que j’suis pas du genre à prendre les coups sans les rendre mon gars. Alors si tu veux montrer à papa-maman que t’es le bon fiston qu’ils s’attendent à voir défiler, t’as intérêt à te barrer d’ici.

J’garde la tête bien droite et fixe son regard sans sourciller, presque même « amusé ». Le campus est grand, mais y'a certaines réput' qui font vite du bruit. Et ce gars-là, avec ses grands airs, il s'cache pas de vanter d'où il vient et compagnie.

- Moi demain, j’suis pas à un cocard près, alors tu ferais mieux d'te barrer si tu veux pas d'ennuis.

Tenue de Pablo:

- C’est ça ouais. Je les suis du regard alors qu’ils se font la malle en quelques secondes, poussant un soupir dédaigneux. Tsch, cobarde.

Mes yeux se posent sur la porte alors qu’elle se referme, restant quelques secondes fixés dessus, dans mes pensées. Qu’est-ce que ces trois idiots voulaient à Yulian ? Ce genre d’altercation se faisaient plutôt rare ou discrète, sur le campus. En tout cas on n’en entend pas beaucoup parler, ça fait jaser ce genre de trucs dans les couloirs en général, pourtant.

- De rien, j’allais pas te laisser t’faire tabasser.

Ça me semble logique comme réaction, de ma part en tout cas. Laisser les choses se passer et appeler un surveillant, très peu pour moi. J’observe Yulian dans le reflet du miroir, alors que les traces de l’altercation commencent à se pointer, le détaillant plus que de raison. C’est clairement pas la première fois que Yulian croise ces gars, vu comment ils se parlaient...

Je finis par détacher mon regard et tourne le dos à Yulian, retournant à l’entrée des sanitaires pour récupérer ma trousse de toilettes. Ca me regarde pas, mais j’peux pas m’empêcher de chercher. Alors en me redressant face à la porte, j’finis par demander, perplexe :

- C’était quoi au fait, le problème ?

Tenue de Pablo:

J’ai bien capté plusieurs fois au foot que son énergie était parfois manquante, qu’il avait des cernes ou des coups de fatigue, mais pourquoi, ça, j’en ai aucune idée. Faut dire aussi, les confidences sont pas maitre-mot chez moi, alors en demander encore moins. J’pense qu’il sait que j’suis là si il a besoin de parler un jour de quelque chose, et que j’serai capable de l’écouter. A un ou deux sujets près.

Quand il me tends son téléphone, je me retourne pour faire dos à la porte, m’avance vers lui et attrape le portable pour en inspecter le contenu. Mes sourcils se froncent, énervé qu’on puisse lui porter ce genre d’insultes. Je soupire, exaspéré :

- Déjà qu’ils sont super cons de base, mais v’là qu’en plus ils t’incriminent de ce genre de trucs… Quels enfoirés. Bloque- le, ça sert à rien de lui laisser l’occasion de continuer. Il crèvera avant toi toute façon.

Ses menaces de morts, il se les mets ou j’pense. Faudra me passer dessus avant de s’en prendre à un de mes potes. Je secoue la tête en soupirant, jette un œil dans le miroir pour me recoiffer, et lançant sur le ton de l’humour :

- Surtout t’accuser de ça quoi. J’avoue que niveau connerie, ils ont mis le niveau bien haut. Les gens font ce qu’ils veulent, mais franchement là c’est n’importe quoi. Toi, Yulian Kristianov, homosexuel ? Et moi j’suis le roi d’Espagne alors, hahaha ! Comme si toi t’étais gay, sérieux …

J’éclate de rire, tellement cette idée me parait impossible et farfelue. Mais je m’arrête rapidement, me rendant compte que je suis le seul à rigoler et que Yulian ne réagit pas.

- Allo Yulian ici Pablo ?! T’es parmi nous ou j’t’ai perdu en route ?

Intrigué, je tourne la tête vers lui et plisse les yeux. L’expression sur son visage, cette lueur dans son regard… C’est moi ou… Non, c’est pas possible. Impossible qu’il le soit. Et à la fois, j’arrive pas à me souvenir d’une seule fois ou il aurait montré un quelconque interet pour une meuf. Mes yeux s’écarquillent sous le choc, mes pieds faisant un mouvement de recul.

- Attend, me dit pas que c’est vrai ? Tu te paies ma tête là ?

Comme ce moment dans les films où des tranches de vies défilent à toute vitesse dans la tête du personnage, mon cerveau me remet en tête les images de toutes ces minutes passées dans les vestiaires au foot, à se dévétir les uns à côtés des autres et à aller se doucher dans les sanitaires communs… Et c’est un mélange de panique et de stupeur qui me font froncer les sourcils, avec une grimace d’inconfort sur le visage.

- J’me casse, c’est mort. J’peux pas encaisser ça là.

J’lève les mains en signe d’abandon et bat en retraite aussitôt pour le planter là, tournant les talons pour filer hors des sanitaires. J’ai déjà du mal à digérer ce qui se passe depuis la rencontre avec le mec du café et tout ce qui a suivi, là c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase.

J’rumine en chemin pour balancer ma trousse de toilette dans la chambre et file à l’extérieur du bâtiment. Que les autres soient gays, j’faisais avec, mais que ce soit un de mes potes, quelqu’un de proche du coup, c’est beaucoup plus difficile à encaisser. J’peux pas me résoudre là maintenant à lui dire que y’a pas de souci, parce que y’en a un justement. J’peux pas concevoir que Yulian ait pu dévier autant et qu’il va finir en Enfer. Vaut mieux que j’me casse pour évacuer ce trop-plein de frustration et de colère plutôt que de péter un plomb en essayant de le remettre dans le droit chemin, tant que j’arrive encore à me raisonner.

Tenue de Pablo: