[Hôtel] When everything went wrong ;; Nolan

Il y avait des jours avec et des jours sans. Aujourd’hui faisait partie de la seconde catégorie. Stefan s’était réveillé du pied gauche et se sentait contrarié pour rien. Peut-être avait-il passé une mauvaise nuit ou fait un rêve étrange qui l’avait perturbé, mais il ne s’en souvenait pas suffisamment pour pouvoir mettre des mots sur ce qu’il ressentait. Le reste de la journée n’avait pas aidé à le faire aller mieux. Il s’était renfermé, parlant peu à ses quelques potes présents. Même envers Nolan, avec qui il partageait sa chambre à l’hôtel, n’avait pas entendu plus de quelques mots de sa part depuis le matin. Les activités prévues par l’organisation du voyage n’avaient pas été des plus intéressantes entre le sanctuaire Meiji et le théâtre Kabuki. Si le premier avait au moins eu le mérite d’être particulièrement beau et de se trouver en plein air où chacun pouvait se promener à sa guise, le second avait été d’un ennui mortel et Stefan avait manqué de s’endormir à plusieurs moments.

Après leur retour à l’hôtel, le jeune homme s’était affalé sur son lit en espérant pouvoir être tranquille jusqu’au dîner mais des impatiences s’étaient installées dans ses jambes et il avait fini par quitter la chambre pour se les dégourdir dans l’hôtel, essayant d’éviter au maximum les gens de sa connaissance pour rester seul. Il ne souhaitait pas discuter avec qui que ce soit, sa contrariété continuant à se propager dans sa tête. Lorsque son portable vibra dans sa poche et qu’il le sortit pour voir le message de sa mère lui envoyant pour la énième fois un article lié au monde de l’art, ses doigts se serrèrent autour de son téléphone et s’il n’avait pas été en plein milieu du hall de l’hôtel, nul doute qu’il l’aurait balancé sur le sol en hurlant. Enfonçant ses mains dans les poches de son hoodie, le jeune homme décida de prendre la direction de la salle de jeu qu’il avait repéré au premier étage quand il se cogna dans un inconnu.

« Putain tu peux pas faire attention ? Sale gaijin ! »

L’insulta l’autre avant même qu’il n’ait eu le temps de faire mine de s’excuser. Stefan se retourna et lui fit face, sa contrariété se muant en une colère sourde.

« T’as dit quoi là ? »  
« Sale gaijin. Pourquoi t’as un problème avec ça peut-être ? »

Le type était plus petit que lui mais il lui mettait facilement quinze kilos de muscles dans la vue. Mais le jeune homme ne s’en soucia pas et franchit la distance qui les sépara, bouillonnant de rage. Il savait que le racisme était encore bien présent dans ce pays mais y faire face était une toute autre histoire.

« Ouais c’est toi mon problème. Toi et tes principes de merde sur les étrangers. Quoi t’es jaloux parce que t’es pas plus grand qu’un minimoy et que tu dois compenser en poussant à la salle ? Et ça te suffit pas alors tu viens insulter un mec qu’a la moitié de ton âge ? »

En réalité le type devait à peine avoir plus de trente ans, mais ce n’était pas la question. Sa répartie suffit à énerver le japonais qui vit rouge à son tour et serra les poings. Stefan le toisa, tout aussi furieux, prêt à en découdre si l’autre faisait mine de le frapper.

La rage bouillonnait dans ses veines tandis que Stefan faisait face au sale type qui venait de l’insulter. Derrière lui, une femme attendait, les sourcils froncés et ne sachant plus où se mettre. Le jeune homme ignora cette dernière et continua de toiser son adversaire du moment. Ce dernier avait les poings serrés et la colère était tout aussi visible dans son regard que dans celui de l’étudiant.

« Qu’est-ce que t’a dit p’tit con ? »
« T’as très bien entendu. Bah alors quoi, t’assumes pas tes complexes ? »

Nargua Stefan, prêt à en découdre. Il était tellement furieux après cette journée de merde que l’idée de taper sur quelqu’un devenait réellement tentante. Une part de lui savait que ce n’était clairement pas une bonne idée, que les professeurs étaient sûrement dans les parages ou même que le type irait se plaindre à la réception s’il se retrouvait dans un sale état et que cela lui retomberait forcément dessus, mais Stefan s’en fichait pour le moment. Ce type l’avait insulté gratuitement et il ne se laisserait pas faire.

Le type sembla en avoir assez et attrapa l’étudiant par le col de son sweat. Stefan baissa les yeux pour les plonger dans les siens et s’ils pouvaient chacun lancer des éclairs, nul doute qu’un orage aurait éclaté dans le hall de l’hôtel.

« J’vais pas laisser un petit gaijin de merde dans ton genre m’insulter sans rien faire. »

Inutile de préciser qu’il était l’instigateur de ce conflit ridicule.

« Tu crois que tu peux te pointer ici et faire ta loi c’est ça ? Tu ferais mieux de retourner dans ton pays de demeurés. »

Stefan sentit la colère grandir encore. C’était la première fois qu’il était victime de racisme et ça lui fit mal en plus de le mettre en colère. Il avait déjà dû faire face à la xénophobie avec des japonais qui s’éloignaient de lui dans les transports ou dans la rue, mais il pouvait plus facilement l’accepter puisqu’il mettait cela sur le compte de mauvaises images. Là, ce type l’insultait sans raison, directement.

« Va te faire foutre, connard ! J’suis très bien ici ! Maintenant lâche-moi ! »

Mais l’autre préféra resserrer sa prise et Stefan posa sa main sur son bras. Décidément, entre cette altercation et celle du soir où il avait rencontré Shin, il avait vraiment tendance à attirer les ennuis. Serrant sa main libre, il se prépara à se défendre – ou à attaquer ?