Une tête dans la piscine.
Splash !
Et que c’est rafraîchissant. Non, ça ne vaut pas l’odeur de la mer, mais à défaut de, Nobu supporte très bien le chlore. Nager lui est vital. Presque autant que respirer. Sûrement plus que de respirer, en fait.
Le jeune homme stocke, stocke, stocke toutes les frustrations. Il ne hurle jamais, il ne pleure pas non plus. Alors, il supporte tout ce qui lui passe dessus. Les épreuves ne semblent pas l’affecter et pourtant, il est souvent au bord du gouffre.
Alors, c’est pour ça qu’il nage, encore et toujours, des mètres, peut-être même des kilomètres, sans sentir le poids de ses muscles.
La présidente frappe des mains. On a beau avoir repris, ce n’est pas pour faire trempette. Y’a des nouvelles recrues, et il faut les accueillir. Alors Nobu sort de l’eau. Il aimerait râler, mais il ne le fait pas. Il n’a pas envie de subir le regard noir de ses camarades. Ce n’est pas le genre à adorer ce système de kohai et de sempai, mais peu importe. Il supporte.
Et s’il se rapproche, il ne fait pas non plus connaissance avec les nouvelles recrues. Il reste dans le paysage, à faire de timides courbettes à ceux qui se rapprochent de lui. Il n’est pas particulièrement un animal social, alors pas besoin de donner son nom, sa classe, son rang. Il préfère observer.
Y’a de la belle chaire, encore. A croire que le club de natation ne recrute que des tops modèles. Peut-être qu’il faut se supporter pour se montrer en maillot ? Déjà l’année dernière, Nobu avait été surpris par la quantité d’hommes qu’il aurait aimé ramener jusqu’à sa chambre. Bien sûr, il ne l’a jamais fait. Il n’a pas vraiment envie de se faire prendre par ses camarades, et de devoir éviter les vestiaires. Vivons heureux, vivons cachés, n’est-ce pas ?
Enfin, il s’est promis d’un peu moins le cacher cette année. Peut-être pas le gueuler partout et se teindre les cheveux façon arc-en-ciel (y’a que l'excentrique Maya qui peut se le permettre), mais simplement un peu moins mentir. Plus question de s’inventer des amoureuses imaginaires et de mentir sur un crush à grosse poitrine. Simplement, la vérité.
Et dans le lot, y’en a un qui lui tape un peu dans l'œil. C’est tout à fait son style, mais il n’ira pas lui sauter dessus. C’est un blond à la couleur chaude, les yeux japonais. Il ressemble un peu à Hikaru. Quand il était ado, Nobu avait un truc pour les occidentaux. Comme toute lubie, ça a disparu avec l’âge.
Par contre, les cheveux blonds, ça, ça ne l’a pas quitté.
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- InvitéInvité
Nouveaux poissons dans le banc de requins
Avec OliverMardi 18 Avril 2018
- InvitéInvité
Oliver aimait se mêler aux autres, mais cela ne voulait pas dire qu’il n'éprouvait pas une légère appréhension, mélange de nervosité et d’anticipation, à l’idée de rencontrer de façon plus formelle les gens du club. Pas parce qu’il avait peur de faire mauvaise impression, ou parce qu’il craignait de ne pas être à sa place parmi ces graines d’athlètes (quoique, certains prenaient vraiment les compétitions trop à cœur de ce qu’il avait cru comprendre); il se faisait suffisamment confiance pour que tout ça se passe bien. Non, ce qui le rendait nerveux, c’était de se trouver subitement en grand groupe.
L’Australien était un caméléon social, habitué à calquer son niveau d’énergie sur ceux qui l’entouraient, afin de leur paraître le plus agréable possible. Il pouvait facilement se faire remarquer s’il savait que ça amuserait du monde, comme il savait se faire plus discret s’il comprenait qu’on avait besoin de calme. Il avait des passions qui lui étaient propres, mais il était du genre à faire mine de s’intéresser à beaucoup de choses, pour peu que cela donne l’impression à son interlocuteur d’avoir trouvé un point commun entre eux. Oliver ne mentait pas. Pas vraiment, en tout cas. Il avait juste à cœur de se trouver des atomes crochus avec les personnes qu’il rencontrait. Encore plus ici, au club de natation. Il allait passer plusieurs heures par semaine avec ces personnes; il voulait s’assurer de pouvoir s’entendre avec elles.
Le problème était que l’exercice était un peu plus compliqué quand tant de monde y prenait part. La façade était plus difficile à maintenir quand il se retrouvait obligé de jongler entre plusieurs conversations en même temps. Surtout, rester vigilant. Ne pas hocher la tête aux dires qu’une jeune camarade disant que le basket était ennuyeux, pour répondre trois minutes après à quelqu’un d’autre qu’en effet, c’était un sport plutôt cool. En réalité, Oliver se fichait pas mal du basket, il n’avait jamais vu l’intérêt des sports collectifs, et encore moins des sports se pratiquant ailleurs qu’en mer. (Ou, à défaut de mieux, en piscine.) Mais il ne pouvait pas vraiment leur dire ça, ni à l’une ni à l’autre, au risque de les vexer.
Était-il malhonnête, en faisant cela ? Peut-être. Sans doute. Mais Oliver avait besoin de se sentir entouré, et son arrivée à Kobe l’avait brusquement coupé de la proximité qu’il avait développée avec ses amis, en Australie. Bien sûr, ils restaient en contact à travers les réseaux, mais c’était loin d’être pareil. S’installer ici, au Japon, c’était un rêve qui se réalisait. Il aurait juste aimé qu’il ne soit pas terni par la peur dévorante de se sentir isolé. Les étudiants qu’il avait croisés jusqu’à présent étaient tous relativement sympathiques. Il ne devrait pas s’inquiéter, et pourtant il ne pouvait s’en empêcher. Ça aurait été comme lui demander de ne plus nager. Une pure torture.
La mer, Oliver avait ça dans le sang. Il avait grandi les pieds à moitié dans l’eau et ne pouvait pas s’imaginer déménager un jour dans un endroit où il ne pouvait pas quotidiennement flâner sur le bord de mer, pieds-nus, et les mains dans les poches de son short trop large. C’était son élément. Ses caprices le fascinaient : changeante, alors qu’elle était toujours la même, dans le fond. C’était peut-être un peu maladroit, mais elle lui rappelait qui il était, lui.
Après quelques plaisanteries supplémentaires échangées avec deux élèves en section littéraire (et réellement, est-ce qu’il était le seul de section artistique à avoir choisi d’intégrer le club de natation ?!), il se désengage de la conversation pour souffler un petit coup. Préoccupé par toute cette mascarade, il se gratte distraitement le poignet, comme il en a pris l’habitude lorsqu’il était troublé. Ses bracelets s’écartent sous ses doigts, et il repère parmi le joyeux attroupement d’étudiants, un jeune homme se tenant à l’écart.
Instinctivement il s’avance vers lui. Oliver est plus à l’aise en petit comité lorsqu’il ne connaît pas les autres ; peut-être que lui aussi. S’approchant d’un pas léger, il s’arrête devant l’autre étudiant et lui sourit.
- Salut ! T’es nouveau aussi ?
Sous les doigts qui le malmènent malencontreusement, l’un des bracelets rompt. Oliver le rattrape avant qu’il ne tombe, et il le garde serré au creux de sa paume. C’est une vieillerie, rien de plus, mais il est sentimental et il s’agit d’un vieux bracelet Brésilien que lui avait offert sa petite voisine, à Melbourne – il le glissera dans une petite boîte, en rentrant dans sa chambre. Il se souvenait très bien de son sourire fier lorsqu’elle lui avait présenté en insistant pour qu’il formule un vœu en secret, afin qu’il puisse se réaliser une fois la corde usée. En revanche, impossible de se rappeler de ce qu’il avait souhaité à l’époque.
L’Australien était un caméléon social, habitué à calquer son niveau d’énergie sur ceux qui l’entouraient, afin de leur paraître le plus agréable possible. Il pouvait facilement se faire remarquer s’il savait que ça amuserait du monde, comme il savait se faire plus discret s’il comprenait qu’on avait besoin de calme. Il avait des passions qui lui étaient propres, mais il était du genre à faire mine de s’intéresser à beaucoup de choses, pour peu que cela donne l’impression à son interlocuteur d’avoir trouvé un point commun entre eux. Oliver ne mentait pas. Pas vraiment, en tout cas. Il avait juste à cœur de se trouver des atomes crochus avec les personnes qu’il rencontrait. Encore plus ici, au club de natation. Il allait passer plusieurs heures par semaine avec ces personnes; il voulait s’assurer de pouvoir s’entendre avec elles.
Le problème était que l’exercice était un peu plus compliqué quand tant de monde y prenait part. La façade était plus difficile à maintenir quand il se retrouvait obligé de jongler entre plusieurs conversations en même temps. Surtout, rester vigilant. Ne pas hocher la tête aux dires qu’une jeune camarade disant que le basket était ennuyeux, pour répondre trois minutes après à quelqu’un d’autre qu’en effet, c’était un sport plutôt cool. En réalité, Oliver se fichait pas mal du basket, il n’avait jamais vu l’intérêt des sports collectifs, et encore moins des sports se pratiquant ailleurs qu’en mer. (Ou, à défaut de mieux, en piscine.) Mais il ne pouvait pas vraiment leur dire ça, ni à l’une ni à l’autre, au risque de les vexer.
Était-il malhonnête, en faisant cela ? Peut-être. Sans doute. Mais Oliver avait besoin de se sentir entouré, et son arrivée à Kobe l’avait brusquement coupé de la proximité qu’il avait développée avec ses amis, en Australie. Bien sûr, ils restaient en contact à travers les réseaux, mais c’était loin d’être pareil. S’installer ici, au Japon, c’était un rêve qui se réalisait. Il aurait juste aimé qu’il ne soit pas terni par la peur dévorante de se sentir isolé. Les étudiants qu’il avait croisés jusqu’à présent étaient tous relativement sympathiques. Il ne devrait pas s’inquiéter, et pourtant il ne pouvait s’en empêcher. Ça aurait été comme lui demander de ne plus nager. Une pure torture.
La mer, Oliver avait ça dans le sang. Il avait grandi les pieds à moitié dans l’eau et ne pouvait pas s’imaginer déménager un jour dans un endroit où il ne pouvait pas quotidiennement flâner sur le bord de mer, pieds-nus, et les mains dans les poches de son short trop large. C’était son élément. Ses caprices le fascinaient : changeante, alors qu’elle était toujours la même, dans le fond. C’était peut-être un peu maladroit, mais elle lui rappelait qui il était, lui.
Après quelques plaisanteries supplémentaires échangées avec deux élèves en section littéraire (et réellement, est-ce qu’il était le seul de section artistique à avoir choisi d’intégrer le club de natation ?!), il se désengage de la conversation pour souffler un petit coup. Préoccupé par toute cette mascarade, il se gratte distraitement le poignet, comme il en a pris l’habitude lorsqu’il était troublé. Ses bracelets s’écartent sous ses doigts, et il repère parmi le joyeux attroupement d’étudiants, un jeune homme se tenant à l’écart.
Instinctivement il s’avance vers lui. Oliver est plus à l’aise en petit comité lorsqu’il ne connaît pas les autres ; peut-être que lui aussi. S’approchant d’un pas léger, il s’arrête devant l’autre étudiant et lui sourit.
- Salut ! T’es nouveau aussi ?
Sous les doigts qui le malmènent malencontreusement, l’un des bracelets rompt. Oliver le rattrape avant qu’il ne tombe, et il le garde serré au creux de sa paume. C’est une vieillerie, rien de plus, mais il est sentimental et il s’agit d’un vieux bracelet Brésilien que lui avait offert sa petite voisine, à Melbourne – il le glissera dans une petite boîte, en rentrant dans sa chambre. Il se souvenait très bien de son sourire fier lorsqu’elle lui avait présenté en insistant pour qu’il formule un vœu en secret, afin qu’il puisse se réaliser une fois la corde usée. En revanche, impossible de se rappeler de ce qu’il avait souhaité à l’époque.
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