Epreuve 1 - Elysion & Shingeki no Kyojin Rebirth

Spoiler:

Un grand signe lumineux, un peu tremblant (mais était-ce le signe qui était tremblant, ou sa vision ?). La jeune femme stoppa net, toute son attention retenue.

“Réveil…le le titan qui est *burp* en toi ? Si tu manges t…out tu pars sans p..payer ?” décrypta-t-elle avec difficulté.

Lorsqu’enfin le message eut atteint son cerveau embrumé elle eut un grand sourire (et un rot sonore):

“Ouaiiiiiis ! C’est parti poupette, on va tous les défoncer ! Miam miam gratuit pour Lëliiiie ouiiiiii !”

Qui était poupette ? C’était un mystère, mais c’est d’un pas très décidé (et peut-être un peu tanguant) qu’Aëlia Merirosvo entra dans le restaurant du centre-ville de Kobe.

“Le titan est arrivé !” s’annonça-t-elle, ne sachant décidément pas faire d’entrée en matière discrète.

Il fallait admettre que tout le whisky ingéré depuis son arrivée ne l'aidait pas à se faire mesurée. Elle se posa sans délicatesse aucune à une table de bois, et faisant claquer sa langue, elle commanda le plat qui s’annonçait … gargantuesque. Elle en salivait déjà ! Et puis peut-être qu’ainsi elle pourrait éponger tout cet alcool ? L’odeur qui régnait dans ce lieux lui mettait déjà l’eau à la bouche. Les saveurs ici étaient si différentes de celles d’Elysion ! Pourtant, il y avait des chances que Luther râle un peu: jusque-là, elle n’avait pas pris beaucoup de notes (sauf sur la … gastronomie, d’une certaine manière).
Repérant du coin de l’oeil un homme à l’air un peu sombre dans un coin de salle, elle ne put résister à l’envie de créer un peu de spectacle:

“Eh toi, là, le grand échalas ! Viens ! Viens te mesurer à moi mon canard ! Hehehehe !” l’interpella-t-elle avec un sourire goguenard en faisant des grands signes de bras entre deux tapes sur son propre ventre.

Au moins, s’il venait, elle pourrait faire passer son envie de se baffrer pour une très sérieuse étude civilisationnelle en prenant quelques notes sur lui via des questions discrètes !

*Quel plan de génie ! Bravo Lëlie !*

Voyant qu’il relevait son défi, elle ne put cacher sa jubilation. Cependant, lorsqu’il déplia sa longue silhouette pour la rejoindre, elle se demanda si elle avait vraiment misé sur le bon cheval. Vu sa carrure il devait sans faiblir pourquoi engloutir au moins deux fois plus de viande qu’elle … Qu’à cela ne tienne ! Son goût de la compétition réveillé, elle se passa une serviette autour du cou alors qu’arrivait le plat surchargé et fumant. Et puis, si elle arrivait à discuter, il pourrait entrer dans ses notes, que diable !

“Pas de soucis mon chaton, j’ai ce qu’il faut !” lança-t-elle à propos du paiement en faisant bouger une bourse à sa ceinture.

Il s’avérait que face à eux étaient à présent posés deux plats qui n’étaient autres qu’une énorme amoncellement de brochettes à l’odeur alléchante. Aëlia en empoigna une, la huma, sentit la salive remplir sa bouche et sourit avant d’en détacher un morceau de ses dents, et de l’enfourner.

“Mmmh ! Ch’est chuper bon ! Mais qu’est-che que ch’est ?” demanda-t-elle à son concurrent improvisé.

Sa bouche était emplie du goût délicieux de la sauce salée qui nappait la viande, laquelle était d’une tendresse incroyable. Viande de caractère, parfaitement persillée, celle-ci avait un goût des plus savoureux, en plus de sembler fondre dans sa bouche sans pour autant se déliter. La cuisson au grill en faisait ressortir les arômes, la texture … en bref, l’ancienne pirate se régalait !

*Rien à voir avec la viande de siffleur séchée, là, berk !*

Elle avait pensé très fort, sans tenir compte de son pouvoir, le goût des rations de voyage lui revenant en mémoire et la faisant grimacer.

“Au fait, moi ch’est Aëlia !” se présenta-t-elle entre deux bouchées, alors que deux pics à brochettes s’alignaient déjà à côté d’elle. Elle avait souri, et des rides s’étaient formées autour de ses yeux alors que ses fossettes se creusaient. “Et je vais être le pire cauchemar de ces brochettes ! Et toi?”

Connaître son adversaire (avant de le dégommer) lui paraissait être une bonne idée.

“Eh j’ai pas vomi depuis …” se récria Aëlia, indignée qu’on puisse douter de sa capacité à tenir l’alcool et la nourriture.

Puis, doutant des dates qu’elle allait avancer, elle se mit à compter sur ses doigts un peu graisseux. Perdant manifestement son compte, elle fronça les sourcils et reprit:

“… Peu importe. Cette viande est trop bonne pour ne pas la digérer correctement ! conclut-elle dans un rire avant de prendre une nouvelle brochette.”

Sans cesser de dévorer, elle écouta les explications du garçon face à elle. Il avait l’air d’en connaître un rayon, le bougre ! De son côté, si elle n’était pas si ivre, Aëlia à chaque bouchée aurait pu sentir la bête se mouvoir directement, sentir la prairie, le pas de l'animal … Mais non. Elle engloutissait brochette après brochette, et écoutait religieusement le jeune homme brun assis à sa table.

*Arndt ? C’est quoi ce nom ? Ses parents étaient fâchés avec les voyelles ? Joli petit minois en tous cas, mais pas bien souriant …*

De nouveau, elle avait pensé fort, sans imaginer du fait de son ivresse que ceci puisse atteindre Arndt. Elle le gratifia d’un clin d'œil amusé lorsqu’il mentionna son envie de manger à l'œil, se demandant s’il venait de faire de l’humour malgré ce visage fermé. Sans oublier d’attraper un autre yakitori, elle lança:

“T’en sais des choses ! En tous cas, il est rudement bon ce steak. On ne prépare pas la viande comme ça … chez moi.”

Elle enfourna une autre brochette:

“Et ch’est bien pour cha que je compte m'en mettre plein la panche !”

Puis elle regarda son tas de piques en bois, son plat, celui de son concurrent, son nombre de brochettes. Plusieurs fois. Elle prit une brochette de plus, regarda encore, fronça les sourcils.

“Eh, dis-moi, mon bichon … Tu vois le plat réduire, toi, ou c’est moi qui hallucine à cause de l'alcool ?”

Soupçonnant une arnaque, elle se sentait soudain un peu dégrisée, et était déjà à la recherche d’un mécanisme ou d’un trucage sous la table expliquant ce tour de passe-passe (avec la main qui n’était pas occupée par une brochette dégoulinante, évidemment).

Réalisant ce qu’elle venait d’attraper, Aëlia piqua un fard en sortant sa main:

“Woops, pas le bon type de mécanisme ! Désolée, fit-elle avec un geste d’excuses amusées faisant tournoyer son yakitori. Mais bien le seul que j’aie trouvé … ajouta-t-elle avec une moue mécontente.”

Arndt se rangeant à son avis, elle n'en devint que plus soupçonneuse. Sans oublier de reprendre une succulente brochette (elle n’allait pas se laisser abattre si facilement !), elle regarda autour d’elle, plusieurs fois, relativement discrètement. Sentant qu’on tentait de l’arnaquer, son instinct pirate revenait au galop.
Soudain, une pensée attint son cerveau, comme une bulle de champagne qui remonte pour exploser à la surface. Elle avait été longue à la détente, sur ce coup-là.

“Eh mais … ”commença-t-elle, avant de sourire et de se taire.

*Une, deux, une, deux … Tu m’entends, Arndt ? continua-t-elle en pensée, faisant usage de son pouvoir. N’aie pas l’air si surpris, mon biquet, c’est déjà comme ça que tu as entendu ma remarque sur ton petit minois ! Je vais pas me lancer dans une grande explication, mais disons que j’ai quelques surprises dans ma manche, et c’est pas que des bouteilles de rhum !*

Elle pouffa à sa propre blague, reprit une brochette à manger pour faire illusion.

*Je suis persuadée que c’est truqué leur histoire, sinon ça leur coûterait trop cher. Mais je trouve pas de mécanisme, excepté le tien hehe, et que je comprends pas comment ils rempliraient les plats dans être vus. Je soupçonne qu’il y ait dans la salle quelqu’un qui crée cette nourriture, à nos dépens. Sauf que ça lui consomme de l’énergie ! Il nous suffit d’être plus voraces qu’il n’est endurant, et le tour est joué. Le type qui tombera évanoui de fatigue, c’est celui qui nous roulait dans la farine !*

Un air roublard sur le visage, elle enfourna une nouvelle brochette.

“Et t’inquiète pour ma digestion ! J’ai une capacité d'absorption dépassant tout ce que tu pourrais imaginer !”

Avec un clin d’oeil, elle assortit le geste à la parole, et mangea une autre yakitori. Il était temps de se baffrer, et d’arnaquer l'arnaqueur !

Lorsqu’il accepta de collaborer à son plan (léger certes, mais rappelons qu’Aëlia avait déjà ingéré suffisamment d’alcool pour avoir les jambes en gelée !), elle lui envoya un baiser avec un gros clin d’oeil et un éclat de rire (un peu étouffé par la sauce et la viande, certes). La jeune femme ignora courageusement la sensation de trop-plein qui commençait à poindre, et continua donc à enfourner yakitori sur yakitori, sans faiblir. Elle savourait un peu moins la viande, sa saveur, son fondant, son gras, au fur et à mesure que son estomac arrivait à saturation. Mais pourtant, elle ne pouvait que s’ébaubir devant l’excellence du produit: elle n’aurait pas mangé du siffleur avec tant d'enthousiasme bon sang de bois !

Il fallait admettre cependant que le corps avait ses raisons que la raison ignorait. C’est donc vaseuse, la bouche encore grasse, qu’elle s’éveilla sur son bâtiment le lendemain matin. Il lui fallut un petit moment pour comprendre où diable elle se trouvait, et surtout ce que faisait ce type saucissonné au sol.

*Lapin ?*

Non, non ce n’était par Arndt, mais bien quelqu’un de chez elle ! Haha ! Sans doute un envoyé d’un concurrent véreux qui l’avait suivie pour la piéger ! Ils avaient des techniques de plus en plus perverses ces bougres d’ânes. En tous cas, ils l’avaient bien piégé cet arnaqueur se rengorgea-t-elle dans une bouffée de fierté vite coupée par un rot sonore et odorant.
Elle s’envoya un demi-gallon d’eau dans le gosier, avant de chercher ses notes, pour les mettre à jour avant de partir. C’est en s'efforçant de remettre en place les pièces du puzzle qui lui manquaient de cette soirée agitée que les souvenirs lui revinrent.

Il y avait eu des rires, de la course, du gras, et la découverte du bateau volant soudain plus invisible, de la boisson. Et plus de viande.
Toujours plus de viande.

Aëlia sourit. Ce petit détour par Kobe resterait dans les annales. Il restait des pics à yakitoris dans ses poches. Peut-être saurait-elle en refaire, une fois de retour chez elle ? Oui, sans doute. Mais sans Arndt, ce serait moins drôle, pour sûr.