Cours d'athlétisme

Le buste droit au milieu des autres élèves qui semblaient participer au discours animé de Fujiwara-san, c'est le silence qui demeura chez Alya.
Son visage, plissé de concentration, ne laissait pas de place à l'humour ou à la détente.
Elle était prête à relever le défi du programme échafaudé, bien que les différents interludes à la fois par le professeur, à la fois par Nolan, interrompaient l'efficacité du cours.

Les indications qui s'étalaient en longueur et dans des métaphores inutiles lui firent lever les yeux au ciel. La sportive sentait des fourmillements dans ses jambes qui ne demandaient qu'à se dépenser.
Son cœur battait à tout rompre dans l'empressement manifeste d'enfin pouvoir s'élancer sur la piste de course. Malgré son sang-froid apparent repérable par l'éclat de ses yeux, Alya se planta les ongles dans la paume.

Ses pas élancés traduisaient son impatience à démarrer. Ses poignets et ses chevilles équipées, la brune réajusta sa queue-de-cheval.   

- S'échauffer avec ça ? Vous êtes sûr ? Ce serait plus logique de s'échauffer avant et de s'équiper ensuite.

Sa contestation échappée, elle ignora la plupart des regards interrogatifs posés sur elle.  

- Quels poids lance-t-on ? Ceux qu'on a aux poignets ? Il va falloir penser à lâcher la fantaisie au profit de la précision, sensei.

Frustrée par le manque de clarté et d'explications, Alya favorisa une confrontation directe.
Son incapacité à s'aligner aux émotions des autres lui donnait un air robuste, validant sa réputation de femme froide et aigrie. Si elle n'avait aucun problème avec son identité reliée à la façon dont les autres l'analysaient, il subsistait, derrière cette couche d'assurance, un réel besoin d'être validée dans ses objections.

- Courir avec des poids augmente le risque de tendinites, en plus de nous priver d'une plus grande liberté de mouvement. La forte tension de ces mêmes poids pourrait même entraîner des problèmes musculaires. Sa voix parlait pour tous, elle se devait d'être le porte-parole. Peut-être ai-je mal compris vos intentions, c'est pourquoi, je vous demande de reformuler l'exercice, s'il vous plaît.

L'envie d'être irréprochable juxtaposée à ses corrections n'excluait pas la politesse.

- Du reste, vous n'avez pas non plus précisé le but de cet entraînement. Qu'est-ce que nous travaillons au juste ?

Douze travaux de Fujiwara, mon cul, ouais. C'était plutôt les douze travaux du professeur de shonen classique.

- Mais ce n'est pas question d'être en sucre, c'est question de logique ! s'étrangla-t-elle.

Alya jeta une brève œillade autour d'elle. Ses protestations avaient convaincu le public, mais ce n'est pas une ovation qu'elle récolta. Frustrée, la sportive rentra la tête dans ses épaules, le corps raide.

L'approche menaçante de Fujiwara la fit déglutir, mais elle ne cilla pas. Perchée sur toute sa hauteur, son ombre couvrit la sienne.
Alya pouvait sentir le poids de yeux ronds rivés sur elle. Ils lui imposaient une pression supplémentaire tout en l'encourageant à trouver davantage de détermination au plus profond d'elle-même.

- Certes,... Mais je continue tout de même à croire qu'il est imprudent de s'échauffer avec. Ne voulez-vous pas au moins reconsidérer la question ?

Si Alya était convaincue par ses intimes convictions personnelles, elle rencontrait toujours des difficultés à les revendiquer. D'une manière générale, elle considérait les enseignants et le système éducatif comme une autorité inébranlable.
La brune voulait rester dans les clous et respecter les codes, ainsi, elle ne contredisait que les élèves. C'était bien la première fois qu'elle tenait tête à un professeur.

La diversion de Nolan était tout ce qu'il lui fallait pour que Fujiwara détourne son attention de ses frasques. Elle soupira de soulagement.

Tournant les talons, Alya maugréa des protestations entre ses dents serrées. Elle secoua la tête avec jugement, tandis que la démonstration s'effectua face à ses yeux foudroyants.
Bien, et ensuite ?

Peut-être que le pratiquant s'en tirait sans claquage, pour cette fois. Cela dit, si un accident survenait à un autre groupe d'élèves - et il y avait fort à parier qu'il referait cet exercice, vu la fierté qu'il en avait - Alya se ferait un plaisir d'en avertir l'administration.

En attendant, la sportive ravala sa fierté et s'équipa des poids lestés.
N'importe quoi, c'est vraiment n'importe quoi.

Ne pouvant se résoudre à ne pas accomplir un exercice en lien avec le sport, la Britannique tenta de se rassurer, de trouver quelque chose à en tirer.

Le professeur termina sa prestation. C'était ridicule au-delà des mots.
C'est nul.

Et le pompon sur la Garonne, c'est Nolan. Son intervention se veut complice avec Fujiwara. Il reprend ses termes, et ainsi, leur donne une légitimité à travers l'intention taquine.

- Lécheur.

Chuchota-t-elle en se glissant près de lui, alors qu'elle se préparait mentalement pour ce programme à la con.