[Terminé] Les pensées crient le silence

C’est vendredi soir et… J’sais pas quoi faire. J’vais pas étudier, c’est quand même vendredi… Surtout que je l’ai déjà fait plutôt. J’ai été au club de danse tout à l’heure et voilà, une fois que j’ai soupé… Je ne sais pas quoi faire de ma peau. Normalement je regarderais des films ou des séries, je sortirais… Mais je ne me sens pas d’humeur à faire quoi que ce soit. Je me sens un peu déprimée aussi. J’vais bien… C’est juste que j’ai un moment de blues qui me passe en ce moment. J’ai erré pendant un petit moment après le repas du soir. Je me suis promenée dans les couloirs, j’ai vaguement été tenté par la bibliothèque, mais j’ai abandonné parce que c’était un endroit trop calme pour moi ce soir. Mes pensées crient trop fort. J’ai été me balader dans le parc aussi, mais la fraîcheur du mois de janvier glaçait mes doigts, mais pas mes pensées qui partaient dans tous les sens.

Finalement, je me suis posée dans la salle commune. Parce que… why not. Je n’ai pas spécialement envie de sociabiliser, mais d’un autre côté… Je n’ai pas envie d’être seule. Je n’ai pas envie d’être que dans ma chambre non plus. J’ai envie de parler peut-être. De quoi… J’sais pas. J’veux pas déranger ce soir, je pense.  Je veux exister, crier mon existence, tout en prenant bien le temps de disparaître aux yeux de tous pour un instant.

Je pousse un soupir. Je récupère un cahier qui est dans mon sac. Il est plus vieux que tous ceux que j’ai. Ce n’est pas un journal intime… un peu, mais sans l’être. Mes doigts frôlent au passage mon ordinateur portable et je le considère pendant un moment. J’ai pas envie d’être sur mon ordi, mais je suis en train de me dire que je devrais peut-être rp, mais il y a la flemme qui me prend depuis quelques jours. Bref. ‘Vaut mieux que je laisse mon ordi de côté pour le moment. J’attrape un crayon et mon carnet que je pose sur la petite table devant moi. Je me mets à la première page blanche que je trouve et puis…

Puis rien.

Juste rien.

Une page blanche.  Peut-être que c’est l’écho de mes pensées. Ça ne résonne pas trop à vrai dire. C’est le plat. Le calme. Ça annonce peut-être une tempête… Qui sait ? Ouais, clairement, aujourd’hui, je déprime. Ce soir, c’était comme si je n’avais plus rien à faire et que là, je pouvais prendre le temps de penser, de réfléchir et que je n’étais, qu’au final, qu’une coquille vide.

Mon regard se met à regarder la salle commune, les gens qui s’y trouvent. Mes oreilles captent des brides de conversation, mais on dirait que mon cerveau est à « off » pour le japonais en ce moment.  S’il n’était pas que bientôt 20h, je pense que j’irais me coucher.

J’ai l’impression qu’il se fiche complètement de ce que je lui dis. Clairement que c’est passé dans l’une de ses oreilles et s’en est sorti par l’autre. Désespérant ce mec en vrai. Le pire de tous je pense. Je sais que Meyuki ne serait pas du tout d’accord avec cette phrase, il y a des mecs qu’elle aimerait bien moins que celui-là, mais on ne peut pas y faire grand-chose. Je suis certaine déjà que celui est un cas perdu déjà et depuis très, très longtemps. Dommage. Il est presque mignon. PRESQUE. Genre. Il a une bonne tête. C’est déjà un compliment.

Le seul que j’ai à lui donner aussi.

Pis ses phrases. A-t-il moindrement conscience de ce qu’il dit. Clairement pas. Pendant un moment je me dis qu’il faudrait que je le dénonce à un surveillant ou quelque chose comme ça. C’est certainement pas son état normal tout ça. Je n’ai pas perdu mon sens de la réparti… Quoi qu’il soit un peu rouillé depuis le temps. Mais je ne me gêne pas pour lui répondre, levant les yeux au plafond.

- J’te voyais plus du genre Nick-quasi-sans-tête. Genre que tu dis tellement de bêtises par seconde qu’on t’a tranché la tête.

Je le regarde. Pour vrai… Genre. Il veut quoi dans la vie cet enfant, sauf ne pas survivre parce qu’il dit trop de bêtises !? J’comprends pas ce qu’il trouve chez moi. J’suis genre une fille blonde, vraiment banale… Y’en a d’autres blondes ici, je le sais. Genre pourquoi moi ? OK. Une blonde, au Japon, c’est un peu plus atypique… Enfin, blonde naturelle quoi. Mais genre, s’pas une raison pour que je capte tout son attention.

J’ai moyen envie de l’écouter, mais son nom de famille me sonne une cloche, ça me fait penser à quelqu’un que je connais. Par contre, mon cerveau ne semble pas vouloir absorber l’information. Je secoue la tête, parce que rien ne me vient à l’esprit immédiatement. Je chercherais plus tard. Je pousse plutôt un soupir agacé, me demandant bien qu’est-ce que ça pourrait bien lui faire de savoir mon nom.

- Pourquoi tu tiens à le savoir ?

OK. Je sais, la politesse voudrait bien que je lui donne mon nom parce qu’il m’a donné le sien. Mais genre. Il se présente de même, random, sans aucune esti de raison après avoir parler d’ange et avoir crier super fort. Il s’attend à quoi ? Il veut quoi. Je me méfie de lui et pendant un moment, je me demande presque si je ne lui donne pas un autre nom, juste pour avoir la paix les prochaines fois. Mais je vois bien que c’est un plan foireux et que ça ne fonctionnera pas. C’est le genre de truc qui se passe mal dans les films généralement.

Parce que je suis jolie et qu’il a envie de me connaître ? En vrai. J’sais pas trop quoi dire sur le coup. Merci, aurait bien été la réponse en temps normal… Sauf qu’il est vraiment trop étrange et je… Meh. Ouais, y’a pas autre chose à dire sur ça. Je prends une inspiration. Je me dis qu’il faut quand même que je me calme. Il est un étudiant parmi tant d’autres, il y a peu de chance qu’on se revoit. Sauf si nous avons un cours en commun ou un club en commun, mais je ne pense pas l’avoir déjà vu à l’école pour le moment… À part aujourd’hui.

Tant mieux. Ça veut dire qu’on ne se reverra pas de ci-tôt. Je fais un effort surhumain pour finalement répondre à sa question qui était de savoir comment je m’appelle.  

- ….. Emma Walker, dis-je après un silence.  

Je regarde à ses pieds et je vois mon stylo qui y traîne. Il me demande d’aller le chercher, sauf que je trouve ça un peu trop malaisant de me pencher devant lui pour le prendre. Pis le lui demander… Arg ! Il ne pourrait pas tout simplement partir pour que je puisse le ramasser en toute tranquilité. Il semblerait que ce ne soit pas dans ses plans pour le moment. Je le déteste. Juste parce qu’il respire en réalité.  

Je finis par rougit, bien malgré moi alors que je lui demande :

- Peux-tu me donner mon stylo, s’il te plaît ?

Poliment je lui pointe l’objet du doigt. J’ai peur de la suite, j’sais pas pourquoi. En fait, si je sais exactement pourquoi, mais il vaut mieux ne pas y penser.

- Enchantée aussi…

Enfin, pas tellement, mais c’est dit surtout avec la politesse. Il y a ensuite un petit moment gênant, comme s’il ne sait pas quoi dire. Perso, j’apprécie ce court moment de silence… Bien qu’il est de bien courte durée…

Je vais pour reprendre mon stylo, évitant bien soigneusement de le toucher, on sait jamais en vrai, il n’est pas net ce Naoki. Et j’avais raison. Je touche à peine à l’objet qui m’appartient, je recule finalement prestement, du moment que j’ai entendu sa demande.

- QUOI !?

Calme-toi Emma, t’es quand même dans un lieu somme tout public et tu n’as clairement pas envie d’attirer l’attentions sur toi. Mais je le regarde avec des grands yeux. Je suis confuse. Genre je ne comprends pas. Je ne comprends pas pourquoi il veut une telle chose.

- Mais non ! Je veux dire… Y’a genre… Des tonnes d’autres filles à draguer et à inviter à dîner !

Pis bon, je veux dire… J’ai rien de particulier. Je suis juste une fille reloue parmi tant d’autres. Je ne comprends pas comment il peut bien vouloir m’inviter à manger au resto. C’est bien cool du free food, ça, je n’en doute pas – c’est toujours meilleur quand c’est quelqu’un d’autre qui paie –. Mais euh. MOI ? Quoi ! Pis lui, en plus c’est un relou. Mais je sais, au fond de moi, que si je refuse, il va être en plus désagréable qu’il ne l’est déjà.

Et je pense qu’au fond de moi, j’ai un peu peur. J’ai peur de ce mec qui pourrait avoir de mauvaises intentions. Je veux bien respirer, mais j’ai du mal. Je me sens coincée, étouffée. Je me revois, il y a quelques mois déjà, qui n’en menait pas large à cause d’un dude.

- Il… Il faut que je parte.

J’ai besoin de sortir. Prendre l’air. Mettre de la musique. Arrêter de me faire peur comme ça. Mais dans l’immédiat, c’est difficile. J’ai envie de LUI prouver que je vaux plus que ça, mais d’un autre côté, en ce moment, je n’y arrive pas.