[Terminé] Ils sont tous les mêmes !

Jeudi 7 décembre 2017

J’opine doucement de la tête aux paroles de la blonde. Je pense comme elle, c’est totalement inacceptable. Sauf que j’ai quand même accepter l’inacceptable. Et des fois, je m’en veux encore pour ça. Mon sentiment de honte, mon malaise va peut-être finir par se dissiper avec le temps… Mais pas aujourd’hui. Pour l’heure, je me demande ce que je vais pouvoir dire à mon amie qui m’a envoyé ce message. Probablement de ne plus recommencer et que je ne veux plus jamais qu’il me contacte. Je n’ai pas envie d’en rajouter une couche supplémentaire sur cet événement.  

La demoiselle ne me donne pas trop d’espoir en ce moment. À son avis, il y a pleins de mecs relous dans le coin. Rien d’étonnant. Absolument pas. Et je le partage à mon interlocutrice.  

- En vrai, je ne suis pas trop étonnée. Comme on dit, plus ça change, plus c’est pareil.  

Au moins, elle a quelque chose pour me remonter un peu le moral dans tout ça. Les filles sont sympas. J’ai tout de même gardé de bons souvenir avec les filles qui étaient présentes il y a deux millions d’année à Kobe. Ça me rappelle des souvenirs, comme ma première rencontre avec Meyu et Sumi. Et c’est grâce à ces rencontres que je suis de retour ici, maintenant.  

- Au moins, ça me rassure que les filles soient cool.

En tout cas, je venais de tomber sur une qui était assez sympathique pour ne pas me trouver folle. C’était déjà un bon début. Enfin, je veux dire… Quelqu’un d’autre qui ne me trouve pas folle en dehors de Meyuki ou de Sumire. Définitivement, il faut que je fasse quand même des efforts pour rencontrer d’autres personnes et me faire davantage d’ami.e.s. Disons que ce n’est pas la chose la plus fun à faire. J’ai l’impression de rencontrer les nouvelles personnes c’est toujours un éternel recommencement.

D’ailleurs, mon interlocutrice me donne son nom. Maya Wayne. Je lui souris doucement, je suis beaucoup plus calme. Peut-être parce que Maya a su dire ce qu’il fallait : que les mecs sont tous nuls et qui ne méritent pas notre attention. Ce qui est absolument vrai. Ils sont juste beaux à regarder.

J’ose par contre espérer, dans le fond de mon cœur qu’ils ne sont pas TOUS si relous que ça et qu’il doit en avoir des rescapés en quelque part, des gars sympas. Mais les chances d’en rencontrer doivent être extrêmement minces.  

- Enchantée, moi c’est Walker, Emma Walker.  

Donner son nom de famille en premier, je ne m’y fais pas encore. Et je ne crois pas que je vais m’y faire un jour. Elle est aussi japonaise que moi. En tout cas, on a les noms les moins japonais quoi.  En même temps, ici, il y a beaucoup d’étrangers, il ne faut pas trop s’en étonner.  

- Merci de m’avoir écouté me plaindre. Mine de rien, ça m’a fait du bien.    

Je suis sincère. J’ai moins envie d’aller pleurer en petite boule dans mon lit. Je pense que je pourrais aller prendre l’air dans le parc après mon repas, ça pourrait toujours me faire grand bien. Je regarde un moment Maya et je me demande si je dois lui poser les questions habituelles lorsqu’on rencontre quelqu’un dans ce coin-ci : qu’est-ce qu’elle étudie ? On a l’air d’avoir environ le même âge, mais c’est quand même assez difficile à dire maintenant.  

Je continue d’avancer mon repas, avec un peu plus d’entrain cette fois-ci.  

- Ça fait longtemps que tu étudies ici ?

Autre question clichée, mais au moins, ça peut me donner une petite idée de qui elle est.  

Maya comprend et ça a quelque chose de rassurant. J’ai presque un petit soulagement dans mon kokoro. Enfin, je ne laisse pas trop paraître, mais je suis bien contente que ça ne lui dérange pas que je chiale sur ma vie et tout ça. Je sais au moins que j’ai une alliée si j’ai envie d’être reloue.  

Mon interlocutrice me dit que ça ne fait pas encore un an qu’elle est ici et j’opine doucement de la tête. Je comprends quand même ce qu’elle pense et je suis assez d’accord. C’est vrai que c’est sympa et on s’habitue assez rapidement.  C’est sûr que des fois l’adaptation avec des colocataires ne peut être plutôt difficile, tout dépendant la comptabilité des caractères des colocs. Je prie pour que ça se passe bien avec ma coloc’.  

- Noui…

Ouais bon, je suis bien d’accord pour dire que ce n’est pas la réponse la plus claire du monde… Mais ça reste tout de même une réponse. Après une petite pause, le temps de manger encore un petit morceau – parce que je n’aime pas manger froid de toute façon –, je lui donne un peu plus d’explication. Après m’être plaint, lui donner des infos, c’est quand même la moindre des choses.  

- Je veux dire que je suis déjà venue ici, j’ai dû repartir et me revoilà. Parce que finalement j’aime bien être ici.

Je ne sais pas si c’est à cause de la culture japonaise, si c’est l’ambiance générale du pays ou encore tout simplement de l’école, mais j’ai l’impression d’être mieux. Bon OK c’est PEUT-ÊTRE aussi le fait que je suis particulièrement loin du dude qui me tape le plus sur les nerfs depuis un moment. Y’a de quoi être tranquille à Kobe pour un moment. Surtout que je n’ai pas vraiment donné d’indice – même s’il est bloqué et tout, je préfère ne pas trop en dire – sur les réseaux sociaux. La preuve, c’est que je ne l’avais même pas dit à mes amies japonaises que je me pointais le bout du nez.

Je suis presque un génie par moment.  

Oui je suis partie pour un truc assez grave, mais je préfère ne pas trop y penser. Je me rappelle qu’à l’époque, je me sentais bien ici, enfin assez bien. J’avais des ami.e.s, un dude me plaisait bien… Genre pas au point de sortir avec. Mais on s’entendait bien. J’avais des coloc’s cools aussi… Non pas qu’aujourd’hui je n’aime pas ma coloc’ c’est juste… Différent. Et là, c’est à recommencer. C’est assez difficile de devoir recommencer comme ça. J’ai peur de devoir quitter une nouvelle fois KHS et je prie intérieurement que ça n’arrive pas.

Enfin oui, je veux bien quitter KHS, mais genre… Une fois que j’aurais terminé mes études. Oui, voilà, ça fait du sens. Beaucoup plus de sens.

- Tu étais où avant d’arriver ici ? Si ce n’est pas trop indiscret.

Je suis quand même curieuse. PEUT-ÊTRE UN PEU TROP.  Je ne sais pas. Je veux juste savoir d’où elle vient. Enfin, si elle veut bien en parler aussi. Je me suis assez plaint, c’est un peu à moi de l’écouter… Je trouve. Cependant, elle me demande plutôt dans quel club que je suis.

Je ne fais qu’opiner de la tête lorsqu’elle me parle encore de « lui ». Lui qui n’a pas vraiment de nom. Lui que je veux vraiment juste oublier le nom. Je veux seulement pas me rappeler de bons moments qu’on a passé ensemble. Diaboliser. Bref. Oublie tout, passe à autre chose.  Voilà. Parler des clubs. Quelle. Merveilleuse. Idée.  Penser à autre chose. Je suis quand même enthousiasme de parler de clubs. C’est quand même vraiment chill.

- Je suis dans le club de danse et de cuisine. Et toi ?

Quand on me connaît, ce n’est pas hyper original. J’aurais pu prendre des clubs plus originaux, mais cela me va bien. Je suis contente au club de danse parce que je peux pratiquer ce que je fais durant les cours mais aussi poursuivre une certaine exploration artistique… C’est quand même cool. Pour la cuisine, c’est que je veux vraiment apprendre à faire à manger convenablement pour être une « femme à marier » comme aime me taquiner certaines personnes que j’ai déjà connu.  

Je ne me suis pas gênée pour retourner la question. Je trouve que les clubs est aussi une bonne façon de savoir ce que les gens apprécient. Apprendre à mieux les connaître aussi.

AH ouais, les USA !? C’est pas un endroit que je suis allée bien souvent, même si c’est pas vraiment d’où je restais avant de venir ici. Montréal c’est pas SI loin des USA. Je pense qu’il y en a pour une cinq-six heures et même moins, ça dépend juste où tu veux aller. Mais me semble c’est facilement une couple d’heure pour y aller, c’est quand même chill. Peut-être que je demanderais à mes parents quand je retournerais les voir si on ne pourrait pas se faire un petit voyage là-bas un moment donné. Bref. Les USA c’est grand pas mal aussi.

- Ah ouais je comprends.

Je comprends qu’elle est partie de chez elle, pour aller dans un autre coin qui est aussi chez elle. C’est quand même méga intéressant. Je me sens un peu envahissante à poser des questions un peu trop personnelles alors je préfère me concentrer un peu plus sur ce qu’elle a à dire concernant les clubs. Mine de rien ça fait beaucoup trois clubs en même temps. Je suis certaine que je connais pleins de personnes qui en ont trois. Je suis quand même un peu impressionnée.

- Ouah ! Ça fait quand même beaucoup de clubs ! Tu arrives à passer du temps dans chacun d’entre eux ? Je sais que bon, c’est pas la grosse affaire, c’est juste que deux déjà je trouve ça assez, alors trois… Je me demande…

Je ne sais pas s’il y a vraiment une réponse à ça. Je trouve que deux c’est assez avec mes cours et tout ça. Et Je ne sais pas, je me dis que des fois, ça me tente moyen à aller à l’un d’eux à cause que j’ai eu une grosse journée. Pis d’un autre côté, je me dis que ça serait bien que je trouve un petit boulot, juste parce que j’ai aussi du temps de libre. Finalement, je me dis que ce n’est pas si mal. C’est viable. En tout cas, je veux en faire trop je pense. En ce moment, j’ai l’impression de me faire chouchouter. On va voir. Bref. Je retourne à Maya, il vaut mieux.

Je l’écoute en terminant mon repas, tout simplement. Elle me dit qu’elle ne pourrait pas faire parti du club de cuisine. Moi je trouve que c’est une excellente façon d’apprendre la base de la cuisine avant de devenir un vrai adulte avec nos tonnes de responsabilités.

- Si jamais tu as besoin de cours pour de la bouffe, j’suis pas cheffe, mais je me débrouille pas trop mal. ‘Fin, j’ai vécu en appart’ pendant un moment, j’avais pas trop le choix de me faire à manger… Et je ne parle pas seulement de ramens instantanés. En même temps, j’dis ça mais tu dois connaître d’autres personnes qui sont dans le club aussi. C’est pas nécessaire.

Bref, je me sens gênée de m’emmêler dans mes mots de cette façon, je préfère détourner le regard pour ne pas trop qu’on voit que je rougis en parlant de tout ça.

Ce qu’elle a de la chance Maya. Elle a bossé dans le resto de la mom de Meyuki. C’est vraiment chouette. Intérieurement, je me dis qu’il serait peut-être une bonne chose que je me trouve un petit boulot en quelque part… Question de m’occuper un peu et aussi, surtout même, me faire de l’argent de poche. Je me mets même à me demander ce que je ferais comme métier plus tard… Prof de danse, ça pourrait être vraiment sympa. Je ne crois pas que je pourrais devenir danseuse professionnelle, je ne suis clairement pas assez douée.

J’essaie de chasser tout ça de mon esprit. En vrai, mon futur métier me crée tellement d’anxiété qu’il vaut mieux ne pas y penser. C’est vraiment une meilleure idée.

Pendant un moment, j’ai un flash. NON MAIS THOMAS AUSSI Y A BOSSÉ. Il s’est tellement pété les bretelles. Il se faisait dont ben plaisir de me le rappeler quand on se parler… Ce qui n’arrivait pas très souvent.

- Aaah ! Ça doit être chouette de bosser dans le restaurant comme ça ! J’ai mon cousin qui a fait la même chose.

Pis dans le même resto. Mais clairement qu’ils ne se sont pas croisés. Je prie pour qu’ils ne se soient jamais croisés. Respire. Non mais Thomas connaît clairement tout le monde.

- Oui, on s’entend plutôt bien ! On est de bonnes amies. Enfin, je crois bien. Je la considère comme tel. C’est vraiment une fille sympa, on peut vraiment papoter de tout et de rien. Toujours là pour donner un coup de main.

Maya ajoute qu’une chance qu’on n’est pas comme les mecs. Ouais c’est vrai qu’on a plus de neurones qu’eux, mais d’un autre côté, il y a quelques douleurs mensuelles que je me passerais vraiment beaucoup et énormément.

Pis les mecs ils ont tellement un égo démesuré, ça n’a pas d’allure.

Par contre, qu’elle me dise qu’ils ne sont pas fidèles comme ami… J’sais pas.

- Ah ouais ? Vraiment ?, dis-je spontanément.

J’ai clairement pas assez d’ami gars pour pouvoir dire quoi que ce soit. Ce que Maya dit concernant les garçons m’intriguent. Je me disais que les dudes, quand ils sont entre dudes ils doivent être en mode « tough » ou les « thug ». Clairement qu’ils ne montrent pas leurs émotions, sauf peut-être leur joie et leur colère. Se frapper doit être assez courant. J’sais pas. Il faudrait peut-être mener l’enquête.

- J’avoue que les gars ont l’air pas mal moins loyal que les filles.

Pis c’est des gars. Y’a pas besoin de me justifier pour quoi que ce soit. Pis les gars, ils sont tous nuls et y’en a jamais eu un qui était mieux que l’autre.

J’ai tellement été absorbé par tout ce que nous avons dit, que je n’ai pas prêté attention à l’heure. Je prends un petit moment pour regarder mon téléphone de ce qui en est en ce moment. J’écartille les yeux, WOAH ! S’parce que … OUIN, j’ai des choses à faire genre. FUUUUUUUUUUUUUUH. J’ai même failli m’étouffer avec ma propre salive.

- Ah zût ! Je viens de voir l’heure, il faut vraiment que je file !

Je me sens vraiment mal de la laisser en plan, même si, initialement, elle était présente seulement pour chiller ou faire ce qu’elle avait à faire. C’est nul quand même.

- Je suis vraiment heureuse d’avoir fait ta connaissance. J’espère vraiment qu’on va avoir la chance de se recroiser prochainement ! Je te remercie vraiment d’avoir pris le temps de m’écouter. C’était vraiment sympa de ta part !

Nous ne sommes pas vraiment assez « intimes » pour que je lui laisse mon numéro de téléphone ou inversement. Par contre, lorsque nous allons nous revoir, je me ferais honneur de lui offrir un petit quelque chose. Que ce soit un cookie ou… Ou j’sais pas, on verra rendu-là ! Chose certaine, c’est que si j’ai besoin de décompresser concernant des garçons, c’est Maya que j’irais voir.

Je me lève, mettant mon sac à dos sur mon épaule, lui souriant doucement.