Encore une journée tranquille au lycée, aucun incident particulier à signaler, avec un peu de chances ça continuera comme ça jusqu’à la fin de la journée. Mais évidemment j’ai parlé trop vite, peu de temps après j’entends quelqu’un toquer à la porte de mon bureau. J’ai encore l’espoir qu’on va juste me demander un renseignement ou de singer un papier.

Malheureusement quand la porte s’ouvre j’y vois une des surveillantes, Anzou quelque chose il me semble, je n’ai pas encore eu le temps de retenir les prénoms de tous les surveillants. De ce fait, je ne sais pas trop quoi penser d’elle vu que je ne la connais pas vraiment. Mais à son air irrité je me doute qu’il s’est passé quelque chose avec cet élève.

Avant même que j’ai besoin de demander une explication elle me dit qu’elle l’a surpris en train de dégrader, je lève un sourcil en le regardant, déjà parce que ce n’est pas très malin mais aussi parce que je ne comprends pas trop comment il comptait ne pas se faire prendre. La situation semble donc simple mais il se plaint directement de s’être fait trainer physiquement.

Loin de moi l’idée de remettre en doute sa parole mais c’est un comportement assez étonnant venant d’un surveillant. Cependant lorsque je regarde Anzou-san mes doutes se dissipent, elle l’a bien fait et ne semble pas trouver qu’il y a quoi que ce soit de mal avec ça.

« Merci Anzou-san, vous pouvez nous laisser je vais m’occuper de ça, mais veuillez rester près de mon bureau s’il vous plait, nous n’en aurons pas pour longtemps et il faut que je vous parle de quelque chose. »

Chaque chose en son temps, il commence par nier mais avoue vite une fois qu’il comprend que cela ne lui attirera que des ennuis supplémentaires. Son dossier ne fait pas mention d’incident avant celui-ci donc je le laisse partir avec une simple heure de retenue ainsi que l’obligation de nettoyer le casier qu’il à dégradé. Je le fais donc sortir et lui dit de retourner en cours immédiatement.

Comme je le lui ai demandé, Anzou-san est toujours devant ma porte lorsque je sors, je l’invite donc à rentrer et viens m’asseoir sur le devant de mon bureau. Je ne sais pas pourquoi mais mon intuition me dit qu’une attitude informelle passera plus facilement.

« Tout d’abord merci de votre réactivité, en effet la dégradation ne doit pas être laissé sans conséquence. Cependant, nos élèves sont notre responsabilité et je suis une fervente défenseuse de la discussion plutôt que la force. »

Ce n’est pas vraiment vrai pour ce qui est de ma vie personnelle mais ici c’est différent, ce n’est pas en maltraitant les élèves que nous leur apprendrons quoi que ce soit. Ou plutôt ça leur apprendra juste à ne plus se faire prendre.

« Vous êtes surveillantes, il vous aurait suffit de lui dire de vous suivre ici et il l’aurait fait, ce n’est pas comme s’il pouvait s’enfuir après tout. Ce n’est acceptable en aucune circonstance de lever la main sur un élève. »

Est-ce que c’est un comportement récurant chez elle ? Dans le doute je lui lance un la regarde droit dans les yeux un peu plus sérieusement que précédemment et sur un ton un peu moins amical.

« Est-ce que je me suis bien fait comprendre ? »

« Ce n’est pas grave, on n’apprend pas ce genre de choses aux surveillants, la plupart d’entre vous sont encore étudiant eux même ou savent très bien qu’ils n’en feront pas leur carrière. Je le sais je l’ai moi-même été durant mes études. »[/color][/b]

Il y a un flottement quand je lui dis quels sont pour moi les plus durs à gérer et je pense qu’elle comprend. Puis sa prochaine question assombrit un peu mon regard.

« Parfois, il n’y a rien à faire, certaines personnes ne veulent pas être aidé, je ne vais pas mentir, c’est une des pires facettes du métier. Au Danemark j’ai eu un élève que j’ai essayé d’aider par tous les moyens. J’étais au tout début de ma carrière, je pensais encore que je pourrais tout arranger pour tout le monde. »

Je me souviens très bien, j’avais passé tout une soirée à pleurer sur l’épaule de Magnus, à l’époque ou sa présence m’apportait encore du réconfort.

« J’ai regardé plus tard ce qu’il était devenu. Aux dernières nouvelles il lui reste quelques années à purger en prison. Autant dire que oui, c’est un coup à déprimer comme vous dites. On apprend à accepter qu’il y ait une limite à ce qu’on peut faire et on continue d’avancer. »

Je prends une pause, ça m’apporte toujours un pincement au cœur de repenser à ma vie au Danemark, pas que je ne sois pas plus heureuse ici. Mais le fait de savoir que je n’y remettrais surement jamais les pieds est difficile à accepter.

« Le truc avec les surveillants c’est que comme vous êtes proche d’eux en âge, ils sont plus susceptibles de vous prendre comme modèles. Mais oui il y a toujours des choses cachées comme ça. Et ce sera surement le cas dans la plupart des prochains travails que vous ferez. »

Au final je n’ai pas l’impression qu’elle ait un mauvais fond. Tout le monde a le droit à un peu d’aide, sans Magnus pour m’aider à me cacher j’aurais été exclue bien plus rapidement et j’aurais surement même fini à la rue.

« En tout cas j’espère que vous vous plairez ici tant que vous y travaillerez et qu’ensuite vous trouverez quelque chose qui vous passionne. »