Le soleil s'était caché depuis ce qui semblait être une éternité maintenez, timide, derrière le merveilleux paysage qu'offrait la nature au loin. Il avait laissé place à une douce brise printanière, brise qui ne cessait de se réchauffer de jour en jours, annonçant l'arrivée iminante de l'été. Le regard perdu dans la noiceur de la nuit, tu songes. À tes prochaines vacances. À cette rencontre que tu redoutes tant avec ton grand-père. Mais surtout, à cette rencontre avec ton filleul, petit bout humain ayant pointé le bout de son nez le mois précédent. Petit bout que tu n'as, jusque là, vu qu'en photo, toi qui aurait tant voulu le prendre dans tes bras et déposer tes lèvres sur ses petites joues roses. Mais tu dois prendre ton mal en patience et attendre. Encore et toujours.

Soupire.

Il est tant pour toi de faire une pause. De toute façon, tu as déjà perdu toute ton attention concernant ton cours. Autant la porter sur autre chose, quelque chose qui te changera les idées. Et tu sais très bien vers quoi t'orienter ; Stephen King ! Un auteur que tu apprécies particulièrement. Et ce soir, tu as décidé de t'orienter vers l'une de ses plus belles œuvres, celle d'un homme condamné aux ténèbres, lui qui a si peur du noir.

Tes pas t'amènent en salle commune ou l'ambiance est agréable, paisible, animée par quelques rires discrets ici et là. Tu n'as spécialement envie de te mêler aux autres mais tu ne souhaitais pas rester toute seule durant tout le reste de la soirée. Alors tu t'installes dans un canapé libre, à moitié allongée, juste en face d'une de tes camarades à laquelle tu ne prêtes pas grande attention au début, déjà accostée par quelqu'un d'autre alors que ton livre est déjà ouvert, entre tes mains. Un léger sourire, des politesses, quelques paroles échangées et te voilà enfin seule. Tu baisses les yeux vers ton livre, avant de remarquer du coin de l'œil un détail qui t'attire. Instinctivement, tu tournes doucement la tête afin de mieux observer l'activité de ta camarade.
Léger sourire étirant tes lèvres lorsque tu remarques cette forme si particulière. Un début d'animal semble-t-il.

▬ C'est joli ! Dis-tu sincèrement.

Cette fille... Elle ne t'est pas inconnue. Une très grande amie à Neil, que tu as pu apercevoir quelques fois de loin,  mais avec qui tu n'as jamais discuté. Et c'était sans doute mieux ainsi...

Tu lui rendis son sourire. Peut-être en moins resplendissant mais tu n'asaucune raison d'en faire des tonnes. Ce n'est pas ton genre ; tu te contentes de dire ce que tu penses, sans forcément chercher à aller plus loin. Et alors que tu t'attendais à ce que la brune retourne à ses occupations, sans en rajouter, voilà que sa voix s'élève de nouveau. Tu es surprise, ne le cachons pas, mais nullement dérangée. Au contraire, tu aimes toujours discuter avec les autres, apprendre à les connaître, etc. Il n'y a aucune raison qu'Emily soit une exception et ce malgré la relation que vous entretenez avec Neil. Ça passe ou ça casse...

▬ C'est bien ça. Tu lui souris. ▬ Entendu, à condition que tu m'appelles aussi par mon prénom.

Tu n'aimes pas trop toutes les politesses japonaises. Appelez les gens par leur nom de famille t'a toujours donné l'impression de mettre une barrière entre vous, de les prendre de haut. Donc tu préfères qu'on ne se gêne pas avec toi.

▬ Et j'étudie la philosophie ainsi que l'histoire-géo. Et toi ?

Question de politesse mais également d'intérêt. Tu aimes te faire ta propre opinion sur les autres sans passer par l'avis du peuple, sans te fier aux premières impressions. Alors forcément, tu t'intéresses aux choses qui peuvent sembler futiles.

▬ Ça fait longtemps que tu tricotes ?

La psychologie ? Tu hausses un sourcil à cette réponse, surprise. Tu savais qu'elle était en section scientifique sans pour autant connaître sa branche mais... Tu n'as pas l'impression qu'elle était en psychologie à la base. Enfin, tu crois... Mais peu importe. Tu ne poses pas de questions car tu estimes ne pas en savoir assez sur cette jeune femme et que de toute façon, elle a le droit de faire ce qu'elle veut. Si tu ne te trompes pas, elle a dû changer d'études et ça n'a rien de criminel. À la place, tu t'attardes sur ce pour quoi tu l'as abordée. Le tricot, le crochet.

▬ Oh c'est récent !

Tu regardes ce qu'elle fait de plus près. Il faut avouer qu'elle se débrouille très bien, surtout pour quelqu'un qui en fait depuis si peu de temps. Tu te souviens avoir mis du temps à atteindre ton niveau actuel mais il faut dire que quand tu étais jeune, tu ne pensais pas forcément à tricoter, crocheter et coudre. Tu préférerais t'amuser à l'extérieur. C'était donc assez occasionnel. Rien d'étonnant à ce que tu aies mis un certain temps à t'améliorer. T'es ce genre de personne qui évolue de manière constante, qui apprend doucement mais sûrement.

Tu lui souris doucement. C'est vrai que c'est une occupation reposante, du moins quand la personnalité de la personne s'y prête. Pour certains, cette activité peut être une véritable source de nervosité, de crises de nerfs. Il faut être méticuleux, patient, précis, faire des gestes répétés... Ce n'est pas donné à tout le monde.

▬ Heureusement que ça ne s'oublie pas facilement.

Tu hausses à ton tour les épaules.

▬ Oui. Je fais également du crochet et je sais coudre. C'est ma grand-mère qui m'a appris quand j'étais petite, même si j'ai commencé à m'y mettre sérieusement durant mon adolescence afin de me détendre un peu.


À une époque où ton manque de confiance en toi était très grand, où tu t'éparpillais un peu trop. Bien plus qu'aujourd'hui en tout cas...

▬ Il y a une raison particulière qui t'a donné envie de commencer ?

Une questions sans intentions particulières. Tu es juste curieuse. Beaucoup disent que c'est un truc de vieux et estiment avoir mieux à faire que crocheter, tricoter ou même coudre... Alors à moins d'y être habitués depuis son plus jeune âge, c'est assez rare de voir des étudiants se lancer dans ce type d'activité.
Tu sors ton téléphone de ta poche, fouille un peu avant de le tendre à la jeune femme.

▬ J'ai fais ça récemment pour mon filleul.

Sur une image, on peut voir un petit renard fait en tricot, l'air joueur. Sur une autre, un petit ours avec un gilet, etc. Comme tu as l'habitude et que ça fait plusieurs années que tu fais ce genre de chose, on voit que ce sont pas les œuvres d'une débutante, loin de là.

▬ Je voudrais bien faire quelque chose de plus complexe pour le prochain. Comme un cerf ou un hibou avec plusieurs couleurs.

▬ Merci...

Les joues légèrement rosées, tu lui souris. Tu as beau avoir passé le cap de la timidité en ce qui concerne les nouvelles rencontres, il t'arrive encore de rougir un peu aux compliments lorsqu'ils ne concernent pas ton physique. Pas à chaque fois certes, mais ça arrive selon tes interlocuteurs.

▬ Aucun doute là-dessus !

Tu es un peu arrogante là, non ? Mais tu as des raisons de l'être. Tu es douée et travailleuse, tu sais déjà faire beaucoup de choses dans le domaine. C'est juste que tu as rarement eu l'occasion de faire de telles formes tout en utilisant plusieurs couleurs.
Enfin, tu n'es pas non plus "trop" arrogante... Juste ce qu'il faut pour montrer que tu as confiance en tes capacités.

La brune répond à ta question et tu l'écoutes avec attention, comme à chaque fois qu'on t'explique quelque chose. Les grand-mères sont vraiment des personne d'exception ; enfant, on pourrait penser qu'elle savent tout et tout faire, qu'il n'y a pas meilleur livre et vidéo tuto qu'elles.
Tu lui réponds donc d'un petit sourire et d'un mouvement de tête ; elle soit aisément pouvoir deviner à quoi tu penses en te regardant. Tu ne cherches pas à te faire passer pour une fille inexpressive.
En revanche, tu tiques un peu quand elle dit que certains proches nous connaissent mieux que nous-même.

▬ C'est possible...

Même si tu as parfois l'impression que, d'une certaine manière, qu'on change pour quelqu'un d'autre et qu'on se convainc que c'est nous... Tu es songeuse l'espace d'un instant mais tu te reprends vite. C'est la première fois que tu lui parles et tu ne vas certainement pas entrer dans ce genre de débat.

▬ C'est pour quelqu'un ou pour toi ?

C'est une façon comme une autre de changer de sujet et de te faire passer pour plus bizarre que tu ne l'es déjà.

Ainsi, elle a un petit frère et une petite sœur qui sont jumeaux. Ce n'est pas vraiment que tu es surprises, même si tu ignorais cette information. Rien de surprenant ; Vous ne savez rien l'une de l'autre. Enfin, ce n'est pas censé être le cas, nuance. Tu ignores si Neil lui a déjà parlé de toi mais ça t'est bien égal du moment qu'il a tenu sa promesse, comme toi tu l'as toujours tenue. Toi, tu ne sais rien d'Emily et tu n'as jamais cherché à changé cela, dans le sens où si tu dois apprendre à connaître quelqu'un, c'est à travers tes échanges avec cette personne. Pas l'avis des autres, meilleur ami ou pas.

▬ Je vois. J'espère pour toi que ça va leur plaire !

Toi, tu aimes encore bien les peluches. Enfin, pas trop quand même... Disons qu'il faut vraiment que tu craques sur une en particulier pour en acheter. Ou alors on doit simplement de l'offrir : un cadeau reste un cadeau après tout, et même le plus simple et le moins utile de tous est précieux à tes yeux si c'est un proche qui te l'a offert.

▬ Oh il n'a qu'un mois ! Il est né en mai. Tu lâches un bref rire, nerveux. ▬ C'est pour ça que j'ai veillé à utiliser une laine sans lanoline... et adaptée.

C'est à dire avec peu de poils et facile à laver. Vous avez toujours accordé de l'importance au "fait maison" dans ta famille, dans la limite du possible bien entendu. Vous faites vos plats vous-même. Si avez un talent, vous le mettez à profit. Sans oublier les travaux ménagés. On a presque tendance à oublier où vous vivez, que vous avez de l'argent ; même votre maison est modeste - pour une de Los Angeles. Faire faire vos corvées par les autres n'a jamais été très louable aux yeux de ta famille, comme jeter l'argent par les fenêtres. Vous préférez l'utiliser à bon escient ou pour vous faire plaisir à l'occasion, ou pour des personnes dans le besoin. Et ce qu'il vous reste ira à vos enfants, et ainsi de suite...

▬ C'est le fils de mon ancienne baby-sitter. Elle est un peu comme une grande sœur pour moi, alors je ne pouvais pas refuser sa proposition quand elle m'a demandé de devenir la marraine de son enfant. Même si je ne suis pas très douée avec les plus jeunes...

Surtout quand tu n'as pas l'habitude de les voir, que tu les connais mal. En faite, tu n'es pas  très orientée enfant... Mais tu sais assumer ton rôle quand il le faut ; tu sais gérer tes petits cousins quand ta tante te demande de t'en occuper. Parce que tu les connais. Car tu en as l'habitude maintenant. Car ils sont à un âge où c'est assez facile de communiquer avec eux.
Et tu t'entends également bien avec le fils de ton ex petit-ami. Ouais, tout est une question d'âge mais surtout d'habitude...

Tu souris doucement aux paroles de ton interlocutrice dont tu sembles avoir l'attention, peu certaine. Sans doute ne sont-ils qu'amour oui, et franchise aussi. Comme on dit "la vérité sort de la bouche des enfants" et souvent, c'est violent. Mais difficile de leurs en vouloir ; c'est aux parents de rectifier le tire. Et puis, tu ne te trouves pas si courageuse que ça pour avoir accepté ; peut-être qu'au fond, tu n'as simplement pas su dire non... Ou que tu espères justement pouvoir t'habituer à ces petits diables en étant particulièrement proche de l'un d'eux. Être aimée et admirée par ces petites créatures, ça apporte une certaine fierté. C'est drôle ; tu t'entends parfaitement bien avec tes petits cousins, même s'ils t'appellent "tante Lizzy"... Et très bien avec le fils de ton ex qui est adorable tout en ayant son petit caractère. C'est un enfant très intelligent. Tu devrais être rassurée mais... Tu ne sais pas.

▬ C'était censé me rassurer ? dis-tu sur le ton de la plaisanterie avant d'être un peu plus sérieuse. ▬ C'est vrai qu'il y a cette peur de leur faire mal, même lorsqu'on est très délicates.

C'est comme si on vous refilait un petit animal, comme un chaton ou petite souris ; on veut les serrer très fort pour un étreinte mais on ne le fait pas car on sait qu'on peut les briser. C'est un peu frustrant mais c'est normal, en même temps.

▬ Tu as l'air de bien t'entendre avec ton petit frère et ta petite sœur, quand je t'entends. À croire qu'il faut une grosse différence d'âge pour qu'une entente soit possible !

T'en as entendu combien se plaindre de leur frère ou de leur sœur ? Les voyant s'insulter et se disputer pour un oui ou pour un non ? Tu ne les as jamais enviés ; tu te plais trop dans ton rôle d'enfant unique.